Jésus marchant sur les eaux. Alexander Ivanov, c. 1855 (WikiArt).
La marche sur la mer
Sylvain Campeau | 29 juin 2020
Lire : Marc 6, 45-52 ; Matthieu 14, 22-33 ; Jean 6, 16-21
Le récit de la marche sur la mer offre peu d’intérêt si on tente de cerner l’événement historique qui lui a donné naissance. C’est plutôt sa valeur symbolique qui mérite d’être mise en relief car on nous parle ici de l’identité de Jésus comprise à la lumière de l’événement pascal. En d’autres termes, le récit nous parle du Christ ressuscité qui a vaincu la mort.
La mer et la mort dans l’Ancien Testament
Dès le livre de la Genèse, on nous présente le pouvoir destructeur de l’eau avec le récit du déluge (Gn 7,6-23). Le livre suivant continue dans le même sens avec l’anéantissement de la nuée de sauterelles jetées « dans la mer » par Seigneur qui met fin à l’une des plaies d’Égypte (Ex 10,19). Mais le passage de la mer est probablement l’un des récits fondateurs de la foi d’Israël qui illustre très bien notre propos : « Il a jeté à la mer chevaux et cavaliers » (Ex 15,1.21), mettant fin à la poursuite des Égyptiens. Le peuple est ainsi libéré de ses ennemis par les flots de la mer, un thème qui revient à quelques reprises dans la Bible hébraïque (par exemple Jos 24,7 ; Né 9,11 ; Ps 78,53 ; Sg 5,22). En résumé, la mer est une créature de Dieu et il est le seul à pouvoir la maîtriser.
Marcher sur la mer
Le pouvoir de marcher sur la mer est réservé à Dieu seul dans l’Ancien Testament. Le texte qui présente le parallèle le plus intéressant pour comprendre le geste de Jésus est ce passage du livre de Job : « Il étend les cieux, lui seul, et il marche sur les hauteurs de la mer. » (9,8) En présentant Jésus investi d’un pouvoir divin, il est clair que les évangélistes nous parlent du Ressuscité, c’est-à-dire celui qui a vaincu la mort et qui veille maintenant sur ses disciples en dissipant les vents contraires. Le récit présente d’ailleurs des ressemblances avec les apparitions du Christ. Par exemple, il souligne la difficulté de reconnaître Jésus que les disciples confondent avec un « fantôme » (Mc 6,49). Cette difficulté à le reconnaître se retrouve dans plusieurs récits d’apparition (Lc 24,16.37 ; Jn 20,14 ; 21,4).
Le récit de la marche sur la mer est donc une anticipation de la résurrection de Jésus. Il réaffirme la question laissée en suspens dans le récit semblable de la tempête apaisée : « Qui donc est-il, celui-là, pour que le vent et la mer lui obéissent? » (4,41) C’est au disciple, celui d’hier comme celui d’aujourd’hui, d’apporter la réponse en relisant les épisodes de turbulence de sa vie à la lumière de son expérience avec Celui qui est au cœur de sa foi et son espérance.
Diplômé de l'Université de Montréal, Sylvain Campeau est bibliste et responsable de la rédaction.