(Leonid Tit / 123RF)
Neige et pureté
Sylvain Campeau | 10 février 2020
« Es-tu entré dans les trésors de la neige? »
(Job 38,22 : traduction de la Bible Martin)
Les citadins qui voient ces deux mots accolés – neige et pureté – trouveront étrange cette association. Le couvert de neige dans une ville est magnifique pendant une tempête mais la circulation routière dégrade rapidement la beauté du paysage et surtout… la couleur de la neige!
Dans la Bible, la neige est rarement évoquée et on comprend pourquoi : il s’agit d’un phénomène qui survient rarement en Terre Sainte. Sa beauté éphémère inspire toutefois l’allégresse : « Louez le Seigneur […] ; feu et grêle, neige et brouillard, vent d'ouragan qui accomplis sa parole » (Psaume 148,8 ; voir aussi Daniel grec 3,70). On reconnaît ici, et dans d’autres passages, que c’est Dieu qui en est le maître : « Par son ordre il précipite la neige » (Siracide 43,13 ; Job 37,6 ; Psaume 147,16).
Blancheur et pureté
La neige comme symbole de pureté dérive sans doute de celui de l’eau et de sa couleur blanche. Il n’est pas étonnant de lire cette demande que le psalmiste adresse au Seigneur : « Lave-moi et je serai plus blanc, plus que la neige. » (Psaume 50,9) La même idée se retrouve chez Daniel en parlant cette fois d’un vêtement : « Son vêtement était blanc comme la neige. » (Daniel 7,9) Dans les deux cas, la neige évoque la pureté, un état essentiel dans l’Ancien Testament pour les personnes qui désirent accomplir des gestes rituels.
Neige et impureté
Comme plusieurs éléments symboliques, la neige a son petit côté « sombre ». Mais cet aspect a été peu exploité dans la Bible. La première occurrence du mot doit être comprise en ce sens : « La main de Moïse était blanche comme la neige. » (Exode 4,6 ; voir aussi 2 Rois 5,27) On parle ici de la lèpre, une maladie qui avait de graves conséquences dans l’Antiquité. Un premier symptôme est l’apparition de taches blanches sur la peau. Puisque la maladie est contagieuse et qu’on ne savait pas comment la soigner, les porteurs du bacille étaient mis à l’écart ; la maladie rongeait leurs chairs et pouvaient provoquer la mort, un état où le corps devient froid comme la neige. Mais avant d’en arriver là, les lépreux continuaient à vivre en étant écartés de la vie sociale. Leur guérison était un véritable miracle qui demandait toutefois la confirmation d’un prêtre (Lv 14,3).
En terminant, si vous avez de la difficulté à apprécier la neige, je vous suggère d’aller à la campagne après une bonne bordée, de chausser des raquettes et d’emprunter un sentier forestier. Un spectacle magnifique s’offrira alors à vos yeux en entrant « dans les trésors de la neige ».
Diplômé de l'Université de Montréal, Sylvain Campeau est bibliste et responsable de la rédaction.