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L'apôtre des nations
C’est dans l’œuvre de Luc que l’on trouve exposé de façon explicite le programme missionnaire de Jésus. Avant de quitter ses apôtres, le Ressuscité leur confie la mission d’annoncer l’Évangile qui, en partant de Jérusalem, est destiné à s’étendre par vagues successives jusqu’aux limites du monde connu, l’oikoumenè, la demeure commune des hommes : « Vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit, qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre » (Actes 1, 8).
L’Évangile aux confins du monde
Luc raconte dans la première partie des Actes des apôtres comment le message de l’Évangile prit la route, d’abord dans les campagnes de Judée et de Samarie où s’étaient dispersés les chrétiens hellénistes à cause d’une première persécution contre l’Église de Jérusalem (Actes 8, 1). Il y eut aussi l’incursion de Pierre à Césarée où il baptisa la maisonnée du centurion Corneille après leur avoir annoncé l’Évangile. Mais c’est l’arrivée insoupçonnée de Paul qui donna le coup de barre nécessaire pour que l’Évangile entreprenne sa course jusqu’aux extrémités de la terre. Dans sa harangue aux Juifs de Jérusalem, lors de son arrestation, Paul déclare que le Christ l’avait expressément choisi pour annoncer l’Évangile aux nations : « Va, c’est au loin, vers les païens, que moi, je veux t’envoyer » (Ac 22, 21).
L’activité missionnaire de Paul et de Barnabé accentua l’adhésion des païens à la foi au Christ. Il fallut cependant attendre l’assemblée de Jérusalem pour que soit débattue la question de l’entrée des païens dans l’Église. La question du salut divisait les chrétiens entre les tenants de la médiation préalable de la Loi mosaïque et la position de Paul qui enseignait que le salut était donné par la seule foi au Christ, le sauveur de tous. L’assemblée, après une vive discussion, accepta la position de Paul mais confirma surtout sa mission auprès des païens. C’est ainsi que la seconde partie des Actes raconte les voyages missionnaires de Paul au cours desquels il annonce l’Évangile, fonde des églises dans les principales villes de l’empire romain, maintient le contact avec elles par ses envoyés et sa correspondance. Le récit s’achève enfin sur la captivité de Paul à Rome où, avec une certaine liberté, il annonce l’Évangile au cœur même de la capitale politique du monde. Mais il l’aura auparavant annoncé dans une autre capitale, culturelle celle-là, Athènes.
Une rencontre au sommet
Le discours devant l’Aréopage d’Athènes est le deuxième discours important de Paul qui nous est rapporté par Luc dans les Actes des apôtres (17, 22-31). Il est placé entre le discours aux Juifs à la synagogue d’Antioche de Pisidie (Ac 13, 16-41; voir le numéro 2187 du Feuillet biblique) et celui adressé aux responsables de l’Église qui est à Éphèse (20, 18-35). Luc fait de ce discours le sommet de la prédication missionnaire de Paul.
L’Aréopage est d’abord un lieu-dit : la colline d’Arès (areios pagos) au nord-ouest de l’Acropole. C’est là que le Conseil de ville se réunissait pour régler les affaires publiques, civiles et judiciaires. À l’époque romaine, l’Aréopage administrait aussi l’enseignement dispensé aux Athéniens et aux étrangers. Ce Conseil aristocratique était l’équivalent du Sénat romain. Ne pouvaient en être membres que ceux qui avaient exercé la magistrature suprême, celle de l’archontat, soit vers l’âge de 35 ans. On estime que l’Aréopage était composé de 200 à 300 personnes nommées à vie. Avec le temps, le Conseil se déplaça vers l’agora, la grande place publique de la ville, où il tint ses réunions dans l’une des halles du marché. C’est dans cet environnement urbain que Paul discute avec les philosophes stoïciens et épicuriens qui, après un moment, le conduisent devant l’Aréopage pour qu’il puisse leur exposer sa doctrine et obtenir ou non son « permis d’enseignement » (Ac 17, 17-18).
L’analyse de ce discours a donné lieu à plusieurs interprétations. Certains affirment qu’il reflète réellement la prédication de Paul aux Grecs alors que d’autres y voient plutôt le modèle de la prédication chrétienne aux païens à l’époque où Luc produit son œuvre. Quelles que soient les hypothèses, il est indéniable que le discours de Paul devant l’Aréopage est le lieu de rencontre du christianisme et de l’hellénisme. En effet, bien qu’Athènes ait perdu son influence politique, la ville demeure la capitale culturelle et intellectuelle de l’empire romain. C’est donc dans cette ville « lumière » que le message évangélique fera la rencontre de la sagesse grecque représentée par les stoïciens et les épicuriens.
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Suggestion de lecture
Chapitres 13 à 15 des Actes des Apôtres.
Source: Le Feuillet biblique, no 2188. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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Chronique précédente :
Visage de Paul - La prédication aux Juifs (6/12)
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