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chronique du 27 octobre 2006
 

Sur la route de Jéricho

Jéricho est à une journée de marche de Jérusalem. Il est possible, encore aujourd’hui, de se rendre à Jéricho en empruntant l’antique route sinueuse qui dévale les monts de Judée jusqu’au fond de la dépression du Jourdain. Et on comprend mieux l’expression qu’utilise Jésus, dans la parabole du bon Samaritain, à propos de cet homme qui, partit de Jérusalem, « descendait vers Jéricho » (Lc 10,30-37). En effet, Jérusalem est située en montagne, à environ 800 mètres d’altitude, alors que Jéricho, la ville la plus basse de la planète, est située à plus de 250 mètres sous le niveau de la mer!
 

Désert

Une partie du désert de Judée, entre Jérusalem et Jéricho.
(photo : C. Boyer)

     Avant la région désertique, et au-delà du mont des Oliviers, se trouve la colonie israélienne de Maalé Adoumim. Érigée à la fin des années 1970, cette banlieue de Jérusalem constitue aujourd’hui la plus grosse colonie de Cisjordanie. Je m’y étais rendu afin de visiter les ruines du monastère de Martyrius, du nom d’un patriarche de Jérusalem au Ve siècle, qui se trouvent dans le périmètre de la colonie. J’en ai profité pour me promener un peu dans les petites rues. Rien de particulièrement intéressant à voir, me disais-je, jusqu’à ce que je tombe sur un joli panorama : comme tous les visiteurs de Jérusalem, j’étais habitué à observer le versant du mont des Oliviers qui fait face à Jérusalem, mais cette fois-ci, j’avais sous les yeux l’autre versant du mont des Oliviers.
 

mont des Oliviers

Le versant Est du mont des Oliviers (au fond) à partir de Maalé Adoumim.
(photo : C. Boyer)

     En poursuivant vers l’Est, la région devient de plus en plus désertique, et il n’est pas rare de voir des campements bédouins installés en bordure de la route. Traditionnellement, les Bédouins sont des nomades. Ils changent de lieu au gré des saisons et en fonction des besoins des animaux qu’ils élèvent, des chèvres principalement. Depuis la deuxième moitié du XXe siècle, leurs conditions de vie se sont progressivement détériorées, car ils ont été de plus en plus repoussés hors des sections du désert qu’Israël a constitué en zones militaires. Pour ajouter à leur malheur, il leur est devenu interdit de vendre des produits animaliers aux Israéliens, et c’est ainsi que, pour subvenir à leur besoins, beaucoup de Bédouins délaissent leur mode de vie traditionnel, le nomadisme et l’élevage, et se font engager dans les usines ou comme travailleurs de la construction, y compris sur les chantiers de nouvelles colonies...
 

Bédouins

Le logis d’une famille bédouine en bordure de la route de Jéricho.
(photo : C. Boyer)

     On arrive bientôt au wadi Qelt. En arabe, le terme « wadi » désigne une rivière dont le lit reste sec toute l’année sauf lors de la saison des pluies. La route de Jéricho, longeant le wadi Qelt, permet d’admirer le paysage magnifique de cette partie du désert de Judée : la mince bande de végétation encadrant le wadi contraste avec l’extrême aridité de la région. On peut aussi croiser, ici et là, les restes d’anciens aqueducs dont certains remontent à l’époque du roi Hérode.
 

wadi Qelt

Au mois de mars, l’eau coule encore un peu dans le wadi Qelt.
(photo : C. Boyer)

     On sait que l’on n’est plus très loin de Jéricho lorsque l’on aperçoit le monastère Saint-Georges de Choziba, érigé sur un des versants du wadi. Fondé à la fin du Ve siècle, ce monastère permettait aux ermites vivant dans les grottes environnantes de célébrer les fêtes en commun et de partager leurs repas. Selon la légende, le prophète Élie se serait déjà reposé dans une de ces grottes en se rendant dans le Sinaï, alors qu’une seconde grotte aurait été le lieu où Joachim aurait apprit d’un ange que sa femme stérile, Anne, serait bientôt enceinte de la Vierge Marie. Au VIIe siècle, le monastère a été lourdement endommagé par les Perses et les crânes de quatorze moines martyrs y sont encore conservés. Depuis qu’il a été reconstruit, au XIXe siècle, le monastère abrite une petite communauté de moines chrétiens grecs orthodoxes.
 

monastère Saint-Georges

Le monastère Saint-Georges de Choziba.
(photo : C. Boyer)

     Pas très loin de là, et juste un peu au sud de la route de Jéricho, il y a un endroit appelé Nabi Mousa d’où on peut voir, de loin, le mont Nébo (dans l’actuelle Jordanie) où Moïse mourut, selon la Bible (Dt 34,1-6). C’est à cet endroit que depuis le XIIIe siècle les musulmans commémorent la mort de Moïse et qu’une mosquée et un cénotaphe y ont été érigés. Nabi Mousa (signifiant « Prophète Moïse  ») a longtemps constitué la première halte du pèlerinage de La Mecque par les musulmans de la région, mais a fini par devenir lui-même le point d’arrivée d’un pèlerinage indépendant. Chaque année, des milliers de musulmans partaient de la mosquée al-Aqsa, à Jérusalem, et se rendaient à Nabi Mousa pour participer à cinq jours de prières et de danses. La date du pèlerinage était calculée à partir du calendrier chrétien, car à l’origine ce pèlerinage musulman avait été inspiré par la procession chrétienne du Vendredi Saint et voulait plus ou moins y faire concurrence. Malgré tout, ce pèlerinage est rapidement devenu une tradition importante pour les musulmans de la région. Malheureusement, il a finalement été interdit en 1948 en raison du caractère politique qu’il avait pris depuis le début du XXe siècle.
 

Nabi Moussa

À Nabi Moussa, les pèlerins pouvaient loger dans les petites chambres à l’étage,
ou encore avec leurs montures au rez-de-chaussée sous les arcades et dans la cour centrale.
(photo : C. Boyer)

     Enfin, au bout de la route, surgissent peu à peu du désert les palmiers d’un oasis où s’est développée une des plus vieilles villes du monde. On arrive à Jéricho.

Chrystian Boyer

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Gaza, une Bande à part

 

 

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