La prédication de Pierre à Jérusalem. Charles Poërson, 1642. Huile sur toile, 76 x 62 cm. Musée d’Art du comté de Los Angeles (Wikipedia).

De la parole annoncée à la prise de risque

Roland BugnonRoland Bugnon, CSSP | 9 décembre 2019

À la suite de cette irruption de l’Esprit, une communauté d’hommes et de femmes se rassemblent autour de la Parole, l’annonce de Jésus comme Christ et Seigneur, ainsi que la reprise de son enseignement. Trois mille sont baptisés ce jour-là, disent les Actes. Leur enthousiasme est tel qu’il finit par déranger les autorités du Temple, d’autant plus que Pierre et Jean, devant les membres du Sanhédrin, n’hésitent pas à les mettre directement en cause : « Sachez-le donc, vous tous, ainsi que tout le peuple d’Israël : c’est par le nom de Jésus le Nazaréen, lui que vous avez crucifié mais que Dieu a ressuscité d’entre les morts…  » (4,10) En entendant ces mots, on se rend compte que le Pierre des évangiles a bien changé. Non seulement il prend publiquement la parole devant une foule bigarrée, mais en plus il remet les autorités du temple en place en les accusant directement d’être responsables de la crucifixion de Jésus. Il ne craint pas de dire que le salut promis passe désormais par le nom de Jésus et le chemin qu’il a tracé. L’étonnement des scribes est d’autant plus grand qu’ils se rendent compte que ces hommes sont d’origine modeste et n’ont aucune formation théologique. Ils veulent les contraindre à se taire. La réponse de Pierre est imparable : « Est-il juste devant Dieu de vous écouter, plutôt que d’écouter Dieu ? À vous de juger. Quant à nous, il nous est impossible de nous taire sur ce que nous avons vu et entendu. » (4,19-20)

Il n’y a aucune arrogance dans ces paroles, mais une grande assurance. Ils sont convaincus de la vérité des paroles qu’ils prononcent devant le peuple et tiennent à souligner nettement qu’ils ne pourront pas se taire. Le message qu’ils annoncent est trop fort pour ne pas le proclamer à pleine voix et l’autorité morale et spirituelle dont jouissent le Sanhédrin et les grands prêtres, n’a plus d’effet sur eux. La liberté de parole et l’assurance intérieure qui sont les leurs, viennent de plus loin qu’eux. Ils sont mus par le souffle de l’Esprit qui les a libérés de la peur. Les menaces ne servent à rien ; ils vivent désormais de cette liberté qui était celle de Jésus face à ses adversaires. Rien ne pourra plus les arrêter dans leur tâche nouvelle. Le grand-prêtre peut les menacer et leur interdire d’évoquer encore le nom de Jésus. Ils restent fidèles à la mission qu’ils ont reçue, parlent et appellent celles et ceux qui les écoutent à la conversion. De plus, note Luc l’auteur de ce livre, chaque jour le groupe s’agrandit.

La communauté qui commence, dans les premiers temps du Christianisme, est encore loin d’être ce qu’elle sera bientôt. Ses membres sont des Juifs de Palestine ou de la Diaspora venus en pèlerinage pour les célébrations pascales à Jérusalem. Ils vivent dans la fidélité à la Loi mosaïque, vont au Temple pour prier comme l’ont fait Pierre et Jean. Mais désormais s’ajoute une particularité autour de laquelle se développe la nouvelle communauté : « Ils étaient assidus à l’enseignement des Apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. » (2,42) La jeune Église s’édifie autour de ces quatre pôles.

Le premier est fondamental. Il s’agit de l’écoute de la Parole ou de l’enseignement de Jésus dont les apôtres sont les témoins et qui, dans un deuxième temps, inspire un nouveau style de vie appelé « communion fraternelle » dans lequel l’amour et le partage sont premiers ainsi que la solidarité et le souci des plus pauvres. À cela s’ajoutent les prières et surtout la reprise du geste de Jésus avant de mourir, « la fraction du pain » dans laquelle chacune et chacun peut retrouver la présence active de l’Esprit de Jésus au milieu d’eux. Les nouveaux disciples n’ont pas le sentiment de trahir la foi de leurs ancêtres ; ils en suivent scrupuleusement les rituels et les lois. Tout cela s’inscrit dans une profonde fidélité à l’enseignement de Jésus. Ils sont loin d’imaginer tous les bouleversements que cette foi nouvelle va provoquer. Pour l’auteur des Actes, l’Esprit de Jésus est à l’œuvre et les événements que vivront peu à peu ses disciples, vont les conduire à se libérer de la souche à laquelle ils sont restés attachés. Pour l’heure, ils sont regroupés à Jérusalem, autour du Temple. Rien ne les différencie nettement de leurs frères juifs. De nouveaux événements les projetteront hors de Jérusalem et leur feront inventer un type de communauté nouvelle.

Seigneur, avant de quitter tes disciples, tu leur as promis de mettre en eux ton Esprit. Il est présent dans la réponse libre que Pierre et Jean donnent aux membres du Sanhédrin qui veulent les faire taire. Il est également leur guide dans la façon d’organiser et de vivre dans cette nouvelle communauté d’hommes et de femmes qui se nourrissent de ta Parole et de ton Pain et cherchent à mettre en application dans leur vie de tous les jours l’enseignement que tu leur as laissé. Donne-moi, donne-nous cette capacité de réagir à ta Parole et de trouver aujourd’hui la manière de la vivre et d’en témoigner. Dans un monde qui tend souvent à décrédibiliser ou dénigrer toute forme de croyance en toi, donne-moi la liberté et l’audace d’affirmer sans crainte mon adhésion au message que tu nous as laissé.

Pierre et Jean ne peuvent taire la Parole qui a bouleversé leur vie. Mis dans une situation similaire, aurais-je la même audace ? [Lire la suite]

Roland Bugnon est membre de la congrégation du Saint-Esprit. Après 17 ans de ministère pastoral et d’enseignement en Centrafrique, il est revenu dans son pays, la Suisse. D’abord à Bâle, puis à Fribourg, il s’est  investi dans des tâches d’animation spirituelle et biblique. 

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La lampe de ma vie

Les événements de la vie nous confrontent et suscitent des questions. Si la Bible n’a pas la réponse à toutes nos questions, telle une lampe, elle éclaire nos existences et nous offre un certain nombre de repères.