La guérison de l’hémorroïsse. Fresque des catacombes des saints Pierre et Marcellin à Rome (photo : Wikipedia)

Ta foi t’a sauvée !

Roland BugnonRoland Bugnon, CSSP | 12 novembre 2018

Relire Marc 5, 25-34 ou revenir au début de l’article

Avant de conclure son récit, Marc insiste sur un point. La femme qui se jette aux pieds de Jésus est « saisie de crainte et toute tremblante ». Elle a su dominer sa peur pour affronter celui qui l’invite à montrer son visage et à dire toute la vérité. Cela ne l’empêche pas de craindre sa réaction et celle de ceux qui connaissent sa situation. Malgré tout, sa confiance en Jésus est la plus forte. Elle parle du mal qui la ronge depuis tant d’années, de sa souffrance et de l’espoir qui est revenu dans son cœur lorsqu’elle a entendu parler de lui et des guérisons qu’il opère. Si elle est venue par derrière, c’est pour ne pas le mettre mal à l’aise… Elle s’arrête alors de parler et attend sa réaction. J’imagine le large sourire de Jésus et son regard de tendresse posée sur elle, Sa parole est très simple : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix et sois guérie de ton mal. » Même si rien n’est dit à ce sujet, je peux imaginer ce que cette femme a ressenti à ce moment. Une immense joie et l’envie de proclamer partout la louange du rabbi de Nazareth.

Ta foi t’a sauvée. Cette petite phrase ouvre un horizon d’une grande nouveauté. Dans sa prière, le croyant, juif ou chrétien, demande à Dieu telle ou telle grâce. Il garde souvent une attitude très passive. Dans le récit qui nous occupe, cela se passe autrement. La femme se fraye un chemin dans la foule, vient vers lui par derrière, par peur d’être reconnue et chassée en raison de son état d’impureté légale. Elle veut rester dans l’ombre du rabbi, mais ce qu’elle a entendu de sa propre bouche ou dans le récit d’autres personnes, l’a touchée si fortement qu’elle a acquis l’intime conviction qu’il lui suffit de toucher la frange de son vêtement pour être guérie. Sur ce point, elle n’a aucun doute; elle a foi en Jésus. Elle sait, de cette certitude qui monte du plus profond de son être, qu’il peut la guérir. Jésus la confirme dans sa conviction. Ta foi t’a sauvée ! … tu es guérie de ton mal !

Ces paroles – dites de différentes manières – reviennent en plusieurs occasions dans les récits évangéliques. Cette insistance de Jésus sur le nécessité de la foi nous invite à revisiter ce mot qui caractérise l’univers religieux. Il va prendre différentes significations au long de l’histoire. L’Église l’utilise pour définir un ensemble d’affirmations qu’elle estime vraies et qu’elle formule dans ce que l’on appelle le Credo ou la foi de l’Église auquel le croyant est sensé adhérer de tout son être. Lors de la célébration des grandes cérémonies liturgiques, le prêtre demande aux participants de réaffirmer leur foi telle qu’elle est résumée dans le Symbole des Apôtres. Cette adhésion me semble normale. Pour qu’elle soit authentique la demande d’un baptême ou d’un mariage religieux suppose que les participants partagent les mêmes convictions. Demander quelque chose à quoi l’on est totalement indifférent n’a guère de sens. On ne baptise pas un enfant pour faire plaisir aux grands-parents ou agir comme tout le monde.

La foi qui sauve, comme dans le cas de la femme qui vient à Jésus, est d’un autre ordre. Elle est intimement persuadée qu’il peut la libérer du malheur qui l’accable et elle fait tout pour parvenir jusqu’à lui. Sa foi réside dans cette pleine confiance qu’elle lui accorde et qu’il reconnaît en elle. Elle n’est pas un acte d’adhésion intellectuel à des formules théologiques. Son attitude le montre : elle a mis sa confiance ou sa foi en Jésus lui-même qu’elle a rencontré et entendu. Sa vie est entièrement orientée vers lui et par lui. Elle est sauvée car elle a pris le chemin qui la conduit vers la plénitude de son être. Jésus ne fait qu’un constat joyeux : ta foi t’a sauvée. Au milieu de cette foule de curieux qui se pressent autour de lui, il a trouvé une personne qui lui a manifesté une confiance totale. Voilà bien ce qu’il attend de ses propres disciples et de toute personne désireuse de le suivre. Ce texte interroge : quelle est la qualité de ma foi en Jésus?

Seigneur Jésus, cette rencontre me réjouit au plus haut point car elle me rappelle combien tu apprécies cette foi toute simple et sans grandes formules, de celle ou de celui qui s’en remet à toi, en pleine confiance. Cette foi ou confiance intérieure très forte remet debout et rend, celui qui la possède, capable de renverser les obstacles, de traverser les épreuves et de se libérer de ses peurs, ses doutes et ses hésitations. Que ton Esprit me donne la force et le courage de prendre ce chemin qui conduit vers toi, notre espérance et notre joie.

 
Prêtre spiritain, Roland Bugnon est l’auteur de Voyage de Marc en Galilée : récit imaginaire et romancé de la naissance d'un livre (Saint-Augustin, 2013).

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Les événements de la vie nous confrontent et suscitent des questions. Si la Bible n’a pas la réponse à toutes nos questions, telle une lampe, elle éclaire nos existences et nous offre un certain nombre de repères.