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La lampe de ma vie
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chronique du 28 octobre 2011

 

Le divorce à la lumière de la Bible

QuestionQue pensez-vous des chrétiens mariés qui se divorcent? Qu'en dit la Bible? (Johnny)

RéponseJe suis bien conscient, en abordant la question des chrétiens divorcés, que je touche un sujet difficile et douloureux. Le sujet est difficile, parce qu’il concerne aujourd’hui de plus en plus de personnes, que le divorce peut se produire très vite dans la vie d’un couple ou longtemps après la célébration du mariage, pour des motifs très divers. Ces derniers vont de la violence intra-conjugale à l’indifférence mutuelle progressive après une longue période de vie commune. La séparation se règle aujourd’hui soit par consentement mutuel, soit au terme d’un procès douloureux pour les deux parties. Et puis comment parler « de manière générale » de la question des chrétiens qui divorcent, alors que chaque situation est particulière?

     Le sujet est aussi douloureux parce qu’il se produit au terme d’un conflit entre deux personnes et qu’il implique le destin des enfants qui sont nés de l’union. Qu’il soit prononcé par un juge ou par consentent mutuel, il laisse une trace, une blessure, un sentiment d’échec dans la vie des deux personnes directement impliquées et dans celle de leurs proches.

     Ajoutons à cela que les paroles de l’Église catholique, sur les divorcés remariés, ne sont pas toujours bien comprises et viennent ajouter une culpabilité latente à la situation de ces personnes, en leur interdisant le libre accès à la communion. Si la décision du divorce est prise à deux, elle fait suite souvent à l’abandon unilatéral d’un des conjoints. Celui ou celle qui reste, peine alors à comprendre que le départ d’un mari ou d’une épouse, lui interdise à tout jamais un nouveau mariage et l’empêche de vivre « normalement » sa foi chrétienne. Certains ressentent cette règle de l’Église catholique romaine comme une condamnation, une exclusion ou encore comme une intrusion indue dans leur vie privée.

Que dit la Bible?

     Lorsqu’elle parle de cette question, l’Église catholique s’appuie généralement sur le texte que l’on trouve dans l’évangile selon Matthieu (19,3-9). Comme c’est souvent le cas dans les évangiles, des scribes et pharisiens essaient de mettre Jésus en difficulté avec la Loi mosaïque, par les questions qu’ils lui posent : v. 3 « Est-il permis de répudier sa femme pour n'importe quel motif? » La Loi mosaïque prévoit en effet des cas de répudiation de la femme, si celle-ci, après consommation du mariage, n’a pas trouvé grâce aux yeux de son mari (voir BJ Dt 24,1). Une telle expression permet toutes les interprétations et, dans les écoles rabbiniques, on en discutait beaucoup. Remarquons que la femme, elle, n’a aucun droit de répudiation. C’était la situation de l’époque. Que dit Jésus? Il ne dit ni oui, ni non. Il situe le débat dans un cadre plus vaste, celui du désir de Dieu : v. 4  « N'avez-vous pas lu que le Créateur, dès l'origine, les fit homme et femme. Puis il ajoute, v. 5-6 Ainsi donc l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à sa femme, et les deux ne feront qu'une seule chair? Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Eh bien! ce que Dieu a uni, l'homme ne doit point le séparer ». — « Alors pourquoi Moïse permet-il cette répudiation? » ripostent les interlocuteurs. La réponse tombe : v. 8 « C'est, leur dit-il, en raison de votre dureté de cœur que Moïse vous a permis de répudier vos femmes; mais dès l'origine, il n'en fut pas ainsi. 9 Or je vous le dis : quiconque répudie sa femme -- pas pour “prostitution” -- et en épouse une autre, commet un adultère. »

Comment entendre ces paroles?

     Jésus renvoie ses interlocuteurs au texte de la Genèse qui parle du premier couple humain. L’homme et la femme sont appelés à « s’attacher l’un à l’autre » – dans la libre réciprocité du don mutuel – et à « ne faire qu’une seule chair ». Et cette alliance-là, Jésus demande que l’homme ne la rompe pas parce que, dira Paul, elle figure ou symbolise l’alliance que Dieu veut établir entre lui et l’humanité. Telle est la vocation des chrétiens qui s’engagent devant le Seigneur, à vivre une relation d’amour pleine et authentique. Mais Jésus reconnaît en même temps que la dureté du cœur humain peut pousser le législateur à accepter la rupture. Son rappel n’est pas un diktat auquel il faut obéir de manière servile. Il reflète le désir divin de voir l’être humain s’engager à un niveau de profondeur où l’amour devient donation mutuelle gratuite et totale réciprocité. C’est l’amour auquel Jésus appelle ses disciples, on le trouve dans les paroles du sermon sur la montagne (Mt 5-7). Il est résumé dans les Béatitudes et la compréhension nouvelle de la Loi qui doit aller, dit-il, jusqu’à l’amour des ennemis. Il conclut cet appel pour une invitation à vivre la perfection du Père céleste (Mt 5,48).

Que pensez-vous des chrétiens mariés qui se divorcent?

     Je n’ai pas oublié la question du début, mais je ne veux y répondre qu’en perspective avec l’appel de Jésus à la perfection ou la sainteté. Tous les chrétiens, quelle que soit leur situation sont appelés à vivre la perfection de l’amour, telle qu’on la trouve exprimée dans le cœur du Père céleste. Est-ce que nous y parvenons dans tous les domaines de nos existences? Le moins que l’on puisse dire c’est que nous en sommes souvent très loin. Nous sommes tous appelés à la sainteté, mais c’est un travail sans cesse à reprendre. À l’exception de celle de certains témoins exceptionnels, nos vies sont loin d’être un authentique reflet de la sainteté du Père. Nous connaissons ou avons pu connaître des ratés plus ou moins graves, tel un divorce ou un type de comportement dont nous ne sommes pas fiers. Tout est-il perdu pour autant? La parole de Jésus – comme celle des prophètes – nous rappelle dans quel sens va le désir de Dieu. On ne peut pas oublier l’appel à la conversion du cœur qui traverse l’Évangile. Mais, avec tout autant de force, la même parole nous invite à ne jamais nous décourager parce que l’amour de Dieu est premier et inconditionnel. La parabole du fils retrouvé (Lc 15,11-32) illustre magnifiquement l’accueil de Dieu pour celui ou celle qui vient tout simplement se jeter dans ses bras, après avoir connu l’échec dans sa vie. La bonté de Dieu fonde notre espérance et remet l’être humain debout.

Roland Bugnon

Chronique précédente :
Une Église peut-elle détenir la vérité ?

 

 

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