chronique du 1er octobre 1999
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« Est-ce que Dieu me pardonne seulement si je pardonne à mon prochain ? » Chaque fois que dis le Notre Père, j'ai de la difficulté à dire « Pardonne-nous comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ». J'ai l'impression d'être incohérent. Est-ce que Dieu me pardonne seulement si je pardonne à mon prochain? (S. Lefebvre) Le texte liturgique français s'écarte assez notablement du sens littéral de l'Évangile de Matthieu: « [...] et remets-nous nos dettes comme nous aussi avons remis à nos débiteurs » (Mt 6,12). Le passage du sens matériel dettes au sens religieux péchés-offenses est assez facile à comprendre et le texte parallèle de l'évangile de Luc en fournit le meilleur exemple: « et remets-nous nos péchés car nous-mêmes nous remettons à tout (homme) qui nous doit » (Lc 11,4). La difficulté de ce verset vient de la deuxième partie de la phrase. Cette demande est la seule dans tout le Notre Père à être assortie d'une modalité précise qui risque d'être prise comme un marchandage: Dieu devrait nous pardonner puisque nous avons déjà pardonné. L'Ancien Testament nous transmet plusieurs prières de demande de pardon (voir Ps 51; Is 63,7- 64, 11; Dn 9,4-19; Ne 9,5-35). Chacune de ces prières reconnaît la responsabilité d'Israël et fait appel à la miséricorde de Dieu qui, seul, peut effacer le péché de son peuple. Souvent aussi, le suppliant reconnaît que, dans la détresse présente, le peuple est décidé à se convertir et à revenir vraiment à Dieu. Mais en aucun cas, le pardon divin n'est lié à l'obligation pour la personne qui en bénéficie, de pardonner à son tour. Alors qu'une certaine tendance du judaïsme associait le pardon de Dieu à l'accomplissement exact des rites expiatoires, Jésus fait le lien entre le pardon demandé à Dieu et celui accordé à son prochain: « Quand donc tu présentes ton offrande à l'autel, si là tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse là ton offrande, devant l'autel, et va d'abord te réconcilier avec ton frère; puis reviens, et alors présente ton offrande » (Mt 5,23-24). Pour pouvoir, en toute vérité, demander à Dieu son pardon, il faut être prêt soi-même à exercer la miséricorde (voir Mt 18 21-35). On pourrait conclure de ces textes que le pardon de Dieu est la conséquence du pardon humain. La parabole du débiteur insolvable, qui conclut le discours sur la vie de la communauté, vient apporter un éclairage différent. C'est le maître qui, le premier, efface la dette à son serviteur; en conséquence, celui-ci devait agir de la même manière envers son compagnon de service. Dans la prière de Jésus, ceux qui prient ont conscience d'être déjà sauvés; ils font déjà partie du peuple de Dieu renouvelé par la mort et la résurrection de Jésus. Ayant déjà bénéficié de la miséricorde divine, ils sont liés par l'obligation de pardonner, eux aussi, à leurs frères et soeurs. C'est la condition essentielle à la survie de la communauté. Et c'est aussi le préalable nécessaire pour pouvoir demander à nouveau le pardon du Père en toute confiance. Jérôme Longtin, ptre
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