Marche pour le climat de Montréal du 27 septembre 2019 (photo © Valeria Lau)
Changements climatiques : des jeunes réclament des actions concrètes
Marie-Claude Lalonde | 21 octobre 2019
Il dit encore aux foules : « Quand vous voyez un nuage se lever au couchant vous dites aussitôt : « La pluie vient » et c’est ce qui arrive. Et quand vous voyez souffler le vent du midi vous dites : « Il va faire une chaleur accablante », et c’est ce qui arrive. Et quand vous savez reconnaitre l’aspect de la terre et du ciel, et le temps présent, comment ne savez-vous pas le reconnaître ? (Luc 12,54-56)
« Les jeunes nous réclament un changement. Ils se demandent comment il est possible de prétendre construire un avenir meilleur sans penser à la crise de l’environnement et aux souffrances des exclus. » (Laudato Si, 13) Ils ont bien raison. Tous les jours devraient être un Jour de sauvegarde de la création [1]. Nous les avons vus ces centaines de milliers de jeunes marchant dans les rues du monde entier pour nous dire qu’ils en ont assez du « discours vert » et qu’ils veulent un « agir vert ».
Ces jeunes et moins jeunes (heureusement qu’il y en a) se basent sur des arguments solides pour demander ces changements. Ils se fondent sur la science qui est de plus en plus claire à ce sujet, sauf pour les climatosceptiques qui vivent parmi nous. Et si, comme nous le dis Luc, nous savons bien reconnaitre les signes de la terre et du ciel, comment se fait-il que nous ne sachions par reconnaitre les signes du temps présent en matière d’environnement ?
Les signes sont pourtant bien là sous la forme de bouleversements climatiques, de déplacés climatiques, de pauvreté liée à l’environnement et surtout à l’exploitation outrancière de la terre qui implique souvent aussi l’exploitation des personnes. Malheureusement. Nous les voyons ces signes dans les bulletins de nouvelles et dans ce qui se passe autour de nous. La vraie question est donc de savoir pourquoi nous ne réagissons pas face à ce qui est devenu une urgence.
Il est possible que le phénomène nous paraisse si gros qu’il nous semble impossible de faire quoi que ce soit. Il y a également un problème politique. Les démocraties élisent des gouvernements qui siègent quelques années et sont remplacés. Cela n’est vraiment pas une mauvaise chose, mais il n’est pas possible de gérer la crise climatique à courte vue, c’est-à-dire, sur la durée d’un mandat. Changer les habitudes, les technologies, notre vision même de l’environnement et de la maison commune ne prend pas quatre ans, mais s’échelonne possiblement sur toute une vie voire sur plus d’une vie. Justement, peut-être est-ce parce que nous ne sommes pas sur terre pour l’éternité que nous ne la gérons pas comme un « bien » durable et éternel ? À tort, on nous renvoie l’image d’une économie qui ne peut être prospère si on inclut le facteur écologique dans l’équation. Et pourtant, nous savons depuis des décennies que l’environnement et la pauvreté vont de pair, qu’il nous faut penser en termes de développement durable [2]. En fait, les seules choses qui semblent durables pour le moment sont les problèmes environnementaux. Nous avons oublié le bien commun et nous semblons nous obstiner à dominer la terre qui, soyons-en certains, nous dominera à son tour à coup d’événements climatiques extrêmes et de pauvreté endémique.
Et le Créateur – notre Créateur – dans tout ça ? Dieu a pourtant fait d’innombrables merveilles dont nous faisons partie intégrante. Et voilà que l’homme et la femme qu’il a créés à son image, fort de la liberté qui leur est donnée, n’ont aucun égard pour la création qui les entoure. Notre Dieu nous a donné les nuages et le vent pour savoir ce qui arrivera et malgré les signes du temps présent, l’être humain ne se sent pas pressé d’agir. Il est pourtant élémentaire, si l’on croit au Dieu créateur, de porter une attention particulière à tout ce qu’il a créé. Cela fait partie intégrante de notre foi. Nous ne pouvons pas célébrer notre foi le dimanche et détruire l’environnement du lundi au samedi.
La beauté de la création semble étrangère aux sens de ceux qui ne rêvent que de profits et de productivité dans le but, bien entendu, de faire de l’argent aux dépens même de la terre et de ceux qui l’habitent. Toutefois, la création mérite qu’on s’y attarde, qu’on loue son créateur pour l’abondance et la richesse données au monde en toute gratuité et amour. Il faut cesser de « soumettre » la nature; il faut plutôt en faire un partenaire de tous les instants dans l’ensemble des sphères d’activités, incluant l’économie. S’occuper de la création, c’est s’occuper du Créateur, s’occuper de ses habitants et s’occuper de nous.
« Car la grandeur et la beauté des créatures conduisent, par analogie, à contempler leur Créateur. » (Sagesse 13,5)
Marie-Claude Lalonde est directrice nationale de l’Aide à l’Église en détresse (AÉD Canada).
[1] La journée de prière pour la sauvegarde de la création a été instituée par le pape François le 6 août 2015.
[2] Notre avenir à tous, commission mondiale sur l’environnement et le développement, 1988.