chronique
du 5 avril 2005
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Avec eux... avec nous
Il les rejoint sur la route et marche avec eux. À l'approche du village, ayant cédé à leur insistance, il reste avec eux. Pendant qu'il est à table avec eux, il se fait reconnaître à la fraction du pain et disparaît à leurs yeux. Mais ce dernier signe, comme un éclair qui traverse le ciel, ravive le souvenir du feu qui brûlait leur cur pendant que, sur la route, il leur partageait la Parole. Cette expérience de la rencontre du Ressuscité par les disciples d'Emmaüs n'est-elle pas destinée à être la nôtre? Lui qui était avec eux n'est-il pas toujours avec nous aujourd'hui? Disciples d'Emmaüs des temps modernes, nous ne sommes pas différents des premiers chrétiens qui devaient se demander sans doute comment le Christ ressuscité leur était présent. Laissons l'évangéliste Luc identifier quelques lieux où nous pouvons le rencontrer. La route du quotidien semble être un premier lieu de rencontre du Ressuscité. C'est lui qui prend l'initiative de nous rejoindre pour marcher avec nous, et non l'inverse. Il se présente comme un inconnu, car il ne se révèle pas dans l'évidence d'une présence physique. Inconnu, disions-nous, mais pas étranger, car il se montre fort intéressé par ce que nous vivons. Il engage le dialogue par une question qui pourra peut-être surgir à l'occasion d'un événement qui brise la routine : « De quoi discutiez-vous ? » Les disciples d'Emmaüs avaient l'air de naufragés de l'espérance; ils avaient le cur gros et beaucoup à dire. Désireux de nous entendre, il nous amène à relire notre vie en profondeur. C'est après avoir écouté avec attention, que le Ressuscité prend la parole. Il se lance à son tour dans une relecture de sa propre vie en continuité avec la révélation de Dieu, comme en témoignent les Écritures. Celles-ci paraissent alors d'une étonnante actualité : aujourd'hui, en Jésus, le projet de salut de Dieu atteint son plein accomplissement. Avoir l'intelligence des Écritures, ce n'est pas seulement les comprendre, c'est aussi discerner que ce projet de salut se réalise maintenant dans notre vie. Nous avons souvent besoin de nous référer à la Parole de Dieu pour reconnaître le Christ qui marche avec nous et pour nouer le dialogue avec lui. Et comme chacun de nous n'est pas seul à suivre le Christ, pourquoi ne pas converser avec nos compagnons et compagnes de route. Nous pouvons rencontrer le Christ dans le partage de nos expériences. La rencontre du Christ se réalise aussi dans la prière. La prière exprime le désir d'une présence que l'on veut plus intime; une présence à prolonger parce que pressentie sur la route. Elle est cet espace intérieur que nous ouvrons pour qu'il reste avec nous. La prière se fait invitation, et attente de la venue du Christ par le chemin qu'il choisira. Ce chemin sera celui de la fraction du pain. C'est par ce geste d'une rare densité que l'inconnu se dévoile aux deux disciples. Seul le Christ Jésus a la capacité de poser un tel geste qui ouvre les yeux et instaure une relation nouvelle entre lui et les disciples. La fraction du pain récapitule l'histoire du salut et plus particulièrement la mort et la résurrection du Christ. Au moment où ils reconnaissent le Ressuscité, celui-ci se soustrait à leur regard, mais sa présence ne disparaît pas pour autant. Elle sera désormais reconnue à travers le pain partagé, signe d'une vie donnée par amour. Puissent nos eucharisties être un nouveau chemin d'Emmaüs où le Christ nous rejoint dans nos existences pour les éclairer et les nourrir de la sienne. Yves Guillemette, ptre
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