chronique
du 3 septembre 2002
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La page blanche
Retour de vacances. Retour au travail. Et retour de la question : Vais-je continuer ma chronique ? Je savais que la direction de la revue me la poserait avant la première livraison de septembre. « Je pense que oui, ai-je répondu, si le temps me le permet et que l'inspiration est au rendez-vous ». Ah ! La fameuse inspiration ! On s'imagine qu'elle vient sur commande comme si on était devant un guichet automatique ou une machine distributrice. Le syndrome de la page blanche est bien connu des écrivains. J'en ai été victime au moment d'écrire ces lignes. Quel sujet choisir pour cette chronique ? Saura-t-il intéresser le lecteur ? Comment le développer ? De quelle manière commencer ? Et si la page blanche devenait le sujet de cette première chronique ? Pourquoi pas ? Mais que dire, sans donner l'impression de me plaindre d'avoir à écrire. J'ai d'abord pensé aux écrivains bibliques. Devant leur feuille de papyrus ou de parchemin, stylet en main, connaissaient-ils le syndrome de la page blanche ? Les textes sont muets là-dessus, comme les livres de tous les écrivains actuels. Les lecteurs ont toujours un produit fini entre les mains, comme s'il n'avait coûté aucun effort. Et pourtant ! J'ai alors pensé à l'évangéliste Jean. Lui, il avait tellement de matériel qu'il a dû faire des choix : « Jésus a fait sous les yeux de ses disciples encore beaucoup d'autres signes, qui ne sont pas écrits dans ce livre. Ceux-là ont été mis par écrit, pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu'en croyant vous ayez la vie en son nom » (Jean 20, 30-31). Avec un si abondant matériel, pourquoi ne pas avoir écrit un second tome, comme Luc avec les Actes des Apôtres, ou bien allongé son évangile de quelques chapitres. À vrai dire, un disciple de la communauté de Jean l'a fait en ajoutant un chapitre et lui aussi jouissait d'un abondant matériel : « Il y a encore bien d'autres choses qu'a faites Jésus. Si on les mettait par écrit une à une, je pense que le monde lui-même ne suffirait pas à contenir les livres qu'on en écrirait » (Jean 21, 25). Décidément ! L'inspiration ne manquait pas ! C'était peut-être le parchemin ? Qui sait ? Toujours en cherchant quel sujet aborder, je me suis dit que nos vies sont probablement le parchemin sur lequel l'Évangile devait continuer de s'écrire dans le cours de l'histoire. Ces écrivains bibliques ne nous auraient-il pas laissé une page blanche pour témoigner de l'oeuvre du Christ dans notre vie ? Saint Paul n'écrivait-il pas aux Corinthiens : « Aurions-nous besoin, comme certains, de lettres de recommandation pour vous ou de vous? Notre lettre, c'est vous, une lettre écrite en nos coeurs, connue et lue par tous les hommes. Vous êtes manifestement une lettre du Christ remise à nos soins, écrite non avec de l'encre, mais avec l'Esprit du Dieu vivant, non sur des tables de pierre, mais sur des tables de chair, sur les coeurs » (2 Corinthiens 3, 1-3) ? En jetant un regard sur sa vie, il se peut que des gens aient l'impression d'avoir une page blanche entre les mains. Mais avec un petit effort de discernement, on découvre que l'influence du Christ et de son Évangile est plus présente que l'on pense. Combien de gestes sont marqués par notre foi en lui, sans même que nous y ayons pensé. Heureux ceux et celles qui un jour se rendent compte que leur vie est une page bien remplie. Yves Guillemette, ptre
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