Les invités aux noces. Eugène Burnand, 1908. Gravures d’un volume consacré aux paraboles.
Compositions réalisées aux crayons et au fusain (image : eugene-burnand.com).
Des noces royales et des invités inattendus
Sylvain Campeau | 9 octobre 2023
Les prophètes ont annoncé l’union nuptiale entre Dieu et son peuple et l’évangile selon Matthieu reprend ce thème en associant l’époux à Jésus (voir 9,15 par exemple). La parabole qui suit celle des vignerons homicides (Mt 21,33-46) présente un roi qui célèbre les noces de son fils (22,1-14). Dans cette histoire, le projecteur est braqué sur ce roi car on évoque à peine le fils et on ignore complètement l’épouse.
Dans un premier temps, le roi « appelle » plusieurs personnes de son entourage qui déclinent tous l’invitation à venir prendre part aux noces de son fils. Même si leur réponse est claire, les serviteurs sont envoyés une seconde fois et l’histoire dérape complètement : certains serviteurs sont maltraités ou tués et le roi se met en colère. Le festin est mis au congélateur et le roi envoie ses troupes en représailles…
Il est clair que nous sommes ici dans le registre du symbole ou de l’allégorie. Pour les premiers destinataires de l’évangile, les premiers serviteurs (doulos, en grec) sont les prophètes mais leur message n’a pas été reçu par le peuple d’Israël. Le deuxième envoi de serviteurs (diakonos, en grec) représente l’appel lancé par les premiers missionnaires chrétiens et la colère du roi fait référence, pour plusieurs commentateurs, à la ruine du Temple et à la prise de Jérusalem en l’an 70 par les troupes romaines.
En quoi cette histoire est-elle une bonne nouvelle pour nous aujourd’hui? Le repas des noces n’a pas été annulé même si les premiers invités n’en étaient pas dignes. L’appel a été lancé une nouvelle fois à tous ceux et celles que les serviteurs trouvèrent aux départs des chemins, « bons et mauvais » (22,10). L’appel à participer aux noces du Royaume est lancé largement par un roi généreux qui réussit à remplir la salle de convives.
Mais Matthieu ajoute une petite parabole à la fin de la première histoire, celle de l’importance du vêtement de noces. Pour participer au festin du Royaume, il ne suffit pas de répondre à l’appel. Dans l’univers biblique, le vêtement exprime souvent quelque chose de l’identité de la personne. Revêtir le vêtement de noces pourrait bien signifier d’ajuster nos comportements à la foi que nous avons reçue. On peut également y voir une allusion au baptême et à la vie nouvelle qui nous est offerte. « C’est un appel à une conversion véritable et non pas superficielle, en méditant l’histoire de l’Alliance, en y reconnaissant la patience et la ténacité de Dieu malgré les réponses contrastées qu’il rencontre [1]. »
Diplômé en études bibliques (Université de Montréal), Sylvain Campeau est responsable de la rédaction.
[1] Alain Patin, Au festin des paraboles, Éditions jésuites (Fidélité), 2019, p. 84.