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Ascension et déchéance du Roi-Berger d'Israël (2/4)
 

Analyse narrative de récits davidiques des livres de Samuel (1 S 16-18 et 2 S 11 - 12, 25)

2- Le choix de Dieu

 

 

Les hommes voient l’apparence, mais le Seigneur voit le cœur (1 S 16,7). Quel regard le Seigneur pose-t-il sur Saül – et sur d’éventuels successeurs faits sur le même modèle (Éliav par exemple) – pour qu’il soit rejeté ? Quel regard pose-t-il sur David pour qu’il soit choisi ? Dans l’épisode de l’onction de David (1 S 16,1-13), seuls deux personnages sont l’objet d’une description physique, deux candidats possibles à la succession de Saül : Éliav (réplique de Saül) et David. Deux typologies du roi opposées et incarnées respectivement par Saül et David se dégagent : le grand et bel homme de guerre et le jeune berger qui n’a pas de titre à faire valoir sinon celui de bien prendre soin de son troupeau. Le roi-guerrier et le roi-berger.

     Le contraste entre ces deux types deviendra une clef de lecture des chapitres suivants. Essayons de cerner les logiques qui sous-tendent aux agissements de ces deux types d’être humain obéissants à des lois différentes : le modèle berger et le modèle chasseur (dont le guerrier n’est qu’une variante)1.

Le berger

     Le berger entretient avec son troupeau une relation d’alliance en ce sens où le bien de l’un rejoint le bien de l’autre. Le berger détient une mainmise sur son troupeau, mais pour son bien, lui procurant nourriture, logis, soins et le protégeant des bêtes féroces. En revanche, le troupeau fournit au berger de quoi vivre : laine, lait et viande à l’occasion. Si la violence est utilisée par le berger, elle ne l’est que pour la défense du troupeau contre les prédateurs. Une logique d’alliance préside à la relation entre le berger et son troupeau. « Donner » serait le verbe décrivant le mieux le mode de fonctionnement du type « berger ».

Le chasseur (guerrier)

     La relation qu’entretient le chasseur envers l’animal est au contraire une relation à sens unique de type prédateur-proie. C’est la loi du plus fort où le bien de l’un (du chasseur) implique le mal de l’autre (proie tuée et dévorée). Une logique d’envie, de convoitise, de concurrence anime le type « chasseur » qui aura recours inévitablement à la violence pour arriver à ses fins. C’est une logique identique qui anime le guerrier qui doit éliminer son rival ou l’assujettir s’il veut survivre. « Prendre » serait le verbe décrivant le mieux le mode de fonctionnement du type « chasseur ».

À l’image du Seigneur…

     Une fois ces paradigmes bien définis, l’hypothèse est la suivante : c’est un berger que Dieu se choisit comme roi, qu’il place à la tête de son troupeau (son peuple) dans une logique d’alliance. Car le vrai berger d’Israël, c’est le Seigneur, mais il délègue ce rôle à celui qu’Il choisit comme roi, dans l’espoir de le voir exercer cette charge avec la houlette du berger plutôt qu’avec l’épée sanguinaire du guerrier. Tant que David se comporte en berger sous le mode du « donner », défendant le peuple de ses ennemis en légitime défense, le Seigneur est avec lui et son ascension est fulgurante. Mais dès que David se transforme, oublie son rôle de berger et commence à se comporter comme un tyran sous le mode du « prendre », cherchant son propre intérêt plutôt que le bien de son peuple, c’est alors que le Seigneur se retire de lui, il perd du coup sa légitimité d’être roi et s’amorce son déclin : s’en suivent les révoltes de ses fils et leurs tentatives pour le déloger.

L’esprit du Seigneur fondit sur David…

     Partons donc à la recherche des indices littéraires qui valident notre hypothèse. Les chapitres 16 à 18 du Premier livre de Samuel relatent les débuts de David dans l’histoire d’Israël. Avec une célérité époustouflante, en l’espace de trois chapitres, on y voit un jeune pâtre jusque-là inconnu, passer du troupeau de son père à la cour royale, fort d’une onction divine, bardé de succès militaires et gendre du roi. Voilà de bien belles lettres de créance offrant à David une sérieuse option sur le poste de roi bientôt disponible. Les thèmes de la présence de l’esprit du Seigneur avec David (1 S 16,13.18; 17,37.45-47; 18,12.28) et de son pendant négatif, c’est-à-dire le retrait de ce même esprit d’auprès de Saül (1 S 16,1.14; 18,12), viennent scander cette séquence narrative, ne laissant aucun doute au lecteur quant à l’interprétation que fait le narrateur de cette ascension de David.

___________________

1 La présente analyse est inspirée fortement de deux auteurs : A. Wenin, David, Goliath et Saül. Le récit de 1 Samuel 16-18 (Coll. Connaître la Bible 3 ; Bruxelles 1997) et D.M. Gunn, The Story of King David. Genre and Interpretation (JSOTSS 6 ; Sheffield 1978).

 

Patrice Bergeron, ptre

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2485. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

Début de la série :
Ascension et déchéance du Roi-Berger d'Israël

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Ascension et déchéance du Roi-Berger d'Israël : 1- Introduction

 

 


 

 

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