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Des mages jusqu'à nos jours
Ils étaient trois mages à s'être levés pour suivre une étoile, apparue à l'Orient, et se laisser conduire par elle jusqu’au petit village de Bethléem (Matthieu 2, 1). Trois mages, forcément, car il y avait trois cadeaux : l’or, l’encens et la myrrhe. Plus tard, on leur a donné des noms : Gaspar, Melchior, Balthasar. Ils se sont arrêtés à Bethléem, au terme de leur quête, pour y adorer Dieu dans l’enfant de la crèche. Mais leurs reliques, quant à elles, ont poursuivi leur route jusqu’à la cathédrale de Cologne où l'archevêque Rainald de Dassel les fit venir en 1164.
Que ce soit à cause d'une étoile ou d'un appel intérieur à chercher Dieu ou à se découvrir soi-même, les mages de jadis et les pèlerins d'aujourd'hui ont en commun de faire l'expérience de la foi comme un chemin de vie qui conduit vers un ailleurs où le Tout-Autre se donne à rencontrer. Le premier auquel fut attribuée la paternité d'une telle expérience est Abraham. Depuis lors, les croyants et croyantes sont devenus des routiers, des marcheurs de Dieu, où ils avancent sur les routes de la vie, saisis par un appel intérieur au dépassement, par un secret désir de se dépasser dans leur recherche de l'absolu jusqu'à faire la rencontre d'un Être personnel qui se révèle totalement Amour et Vie.
Libre aux curieux de chercher un quelconque phénomène astronomique pour expliquer l'astre qui a lancé les mages sur la route. Ceux-ci auraient dû marcher de nuit pour suivre l'étoile. C'est plutôt la course du soleil, de l'Orient jusqu'à l'Occident, qui a tracé leur parcours et qui, à son zénith, a fait reculer la nuit de leur ignorance en leur révélant la vérité qu'ils cherchaient. La route qu'ils ont suivie n'est pas qu'une simple piste de désert. Elle est surtout un cheminement intérieur, une route sans cesse créée par l'insatiable désir de répondre à l'appel de Dieu jusqu'à ce que se précise l'objet de la recherche : Où est le roi des Juifs qui vient de naître? (Mt 2, 2).
Poser la question, c'est reconnaître que le chemin n'est pas terminé; c'est associer d'autres personnes à sa propre recherche, les obligeant peut-être à quitter une certitude devenue accoutumance; c'est accepter de faire une expérience de Dieu à la fois différente et complémentaire, pouvant influer sur la direction suivie jusqu'au moment où l’on a posé la question. C'est aussi se compromettre et engager sa liberté car, une fois la réponse donnée, un choix s'impose comme à la croisée des chemins. La réponse vient des Écritures, comme un pain qui donne la force de poursuivre la route, comme une lumière qui désormais guide leurs pas. Les mages ne sont plus seuls, ils font désormais partie du cortège imposant d'un peuple qui a reconnu la présence agissante de Dieu dans son histoire. La rencontre des Écritures opère un tournant dans la démarche des mages dans le dernier droit et les rend déjà proches de celui qu'ils cherchent, comme Bethléem est tout près de Jérusalem.
Les mages poursuivent leur route tout à la joie de retrouver l'astre qui brille maintenant d'un éclat nouveau. Ils ne sont plus guidés par leur seule intuition, mais illuminés par la révélation que Dieu donne de lui-même. La fourberie d'Hérode n'a pas pu empêcher l'accomplissement du projet de Dieu d'attirer à lui tout être humain qui cherche la vérité avec sincérité. En se prosternant devant l'enfant de Bethléem, les mages reconnaissent en lui la manifestation, l'épiphanie, de Dieu. Leur cheminement de foi n'est pas pour autant terminé. Jésus est désormais l'autre chemin, ou le chemin autre, qu'ils vont maintenant suivre pour garder le cap sur Dieu, sachant que Dieu n'est pas au-delà des étoiles, mais le Tout-Autre qui nous surprend en se faisait l'Emmanuel, Dieu-avec-nous.
Source: Le Feuillet biblique, no 2254. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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Chronique précédente :
L'enfance de Jésus selon Matthieu (6/6)
Qui est le Messie qui vient de naître ?
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