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L'enfance de Jésus selon Matthieu (5/6)
 

L'injustice du massacre des Innocents
Matthieu 2, 16-18

 

Le massacre des enfants de la région de Bethléem par le roi Hérode étonne plus d’un lecteur. L’indifférence apparente du narrateur envers les enfants assassinés ne semble pas causer de problème dans le récit, et ne fait qu’augmenter le choc des lecteurs d’aujourd’hui qui se posent bien des questions. Pourquoi Dieu a-t-il permis cela ? Pourquoi Jésus est-il sauvé alors que les autres enfants ne le sont pas ? Est-ce que Jésus et sa famille ont ressenti de la culpabilité pour avoir été épargnés ? Ces questions ne semblent pas déranger l’auteur de l’évangile.

     S’agit-il d’un événement historique? Peut-être que Matthieu fait référence à un événement particulier, mais comme aucune autre source n’en parle, il est impossible de se prononcer à ce niveau. Pourtant, le récit est certainement conforme à l’image de cruauté du roi Hérode tel que dépeinte par Flavius Josèph, un historien de cette époque.

Un nouveau Moïse

     Les nombreux liens entre ce récit et des textes de l’Ancien Testament permettent une meilleure compréhension. Cette histoire rappelle la naissance de Moïse lorsque les bébés mâles des hébreux étaient systématiquement tués par les Égyptiens. Quelques chapitres plus loin, ce sont les premiers-nés égyptiens qui sont frappés, à leur tour, par la mort, dans le cadre de la dernière plaie. Les rapports entre le livre de l’Exode et l’Évangile de Matthieu sont tellement nombreux qu’on dit que cet évangile présente Jésus comme un nouveau Moïse qui aura la tâche de sauver son peuple et renouveler l’Alliance avec Dieu.

Les pleurs de Rachel

     Dans le récit du massacre des enfants de Bethléem, Matthieu cite Jérémie : Dans Rama, on entend une voix plaintive, des pleurs amers : Rachel pleure sur ses enfants, elle refuse tout réconfort, car ses enfants ont disparu (Jr 31,15). Le prophète évoque le souvenir de Rachel, la femme préférée de Jacob et la mère des Israélites des tribus du Nord, qui est morte en donnant le jour à Benjamin (Gn 35, 16-18) et dont la descendance a été réduite en esclavage en Égypte. Jérémie en parle alors qu’il cherche des mots pour décrire la souffrance incroyable de la destruction de Jérusalem et de l’exil à Babylone. De sa tombe, Rachel pleure le sort de ses enfants qui partent sur les routes de l’Exil et ceux qui sont morts dans la destruction de Jérusalem. Étonnamment, ces pleurs sont évoqués alors que le prophète décrit le retour de l’Exil. Le Seigneur a entendu la voix de Rachel, il permet un avenir d’espérance. Rachel devient alors un modèle de foi et d’espérance alors qu’il n’y a plus rien à espérer.

     L’Évangile de Matthieu fait de même lorsqu’il raconte le massacre, ordonné par Hérode, des enfants de Bethléem âgés de moins de deux ans (Mt 2,16-18). Devant cette souffrance injuste, il cite Jérémie qui évoque les pleurs de Rachel sur ses enfants.

L’injustice de Dieu ?

     Comment un Dieu juste peut-il permettre que des enfants innocents soient assassinés à cause de la naissance de son fils? Une des façons de réfléchir à cette question est de voir Jésus comme représentant du peuple de Dieu. Jésus et sa famille se retirent en Égypte pour fuir la violence d’Hérode, mais ils reviennent et s’installent parmi le peuple. Ce retour représente l’espoir de la restauration du peuple d’Israël. Cette interprétation rejoint aussi l’histoire de Moïse qui, après s’être retiré au désert, revient pour libérer son peuple. Une partie de la réponse à la question se trouve dans le retour de Jésus : il représente l’espérance pour tous ceux qui souffrent, d’autant plus que sa mort sera celle d’un innocent condamné injustement.

     Les noms que Matthieu attribue à Jésus illustrent le lien étroit entre Jésus et son peuple ainsi que la présence active de Dieu dans la mission de Jésus : Tu donneras le nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés (Mt 1,21); On lui donnera le nom d’Emmanuel, ce qui se traduit : “Dieu avec nous” (Mt 1,23)

     Ainsi, loin d’être injuste et insensible à la mort des innocents, l’Évangile de Matthieu présente Jésus comme celui qui sera solidaire du peuple et lui apportera le salut à travers sa mort. La mort des enfants de Bethléem reflète la tragédie de la mort de chaque humain. La bonne nouvelle de Matthieu est que la mort n’a pas le dernier mot.

 

Sébastien Doane, bibliste

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2383. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

Chronique précédente :
L'enfance de Jésus selon Matthieu (4/6)
Où le Messie va-t-il naître ?
Matthieu 2, 1-12

 

 

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