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chronique du 8 novembre 2013
 

Un miracle de Jésus qui ne fonctionne pas (Marc 8, 22-26)

Le Christ guérissant l'aveugle

Le Christ guérissant l'aveugle
Gioacchino Assereto (1600–1649)
circa 1640
Huile sur toile, 138 x 97 cm
Carnegie Museum of Art, Pittsburgh, USA

Les lecteurs et les lectrices des évangiles peuvent avoir l’impression que Jésus fait beaucoup de miracles et de guérisons sans trop d’effort. Pourtant, à lire ce récit, on découvre que parfois ses gestes et ses paroles ne sont pas suivis d’effets.

Ils arrivent à Bethsaïda; on lui amène un aveugle et on le supplie de le toucher. Prenant l’aveugle par la main, il le conduisit hors du village. Il lui mit de la salive sur les yeux, lui imposa les mains et lui demandait : « Vois-tu quelque chose? »

Ayant ouvert les yeux, il disait : « J’aperçois les gens, je les vois comme des arbres, mais ils marchent. »

Puis, Jésus lui pose de nouveau les mains sur les yeux et l’homme vit clair; il était guéri et voyait tout distinctement. Jésus le renvoya chez lui en disant : « N’entre même pas dans le village ». (Marc 8, 22-26)

La salive de Jésus

     L’utilisation de la salive peut nous sembler dégoûtante, au regard des règles modernes d’hygiène. Dans l’évangile de Marc, Jésus opère une autre guérison en plaçant ses doigts dans les oreilles d’un sourd-muet, en crachant et en touchant sa langue (7,32-37). Dans l’Antiquité, on attribuait à la salive des vertus curatives. Jésus l’utilise donc comme d’autres guérisseurs de son époque, mais il donne à ce geste une efficacité miraculeuse.

Une deuxième chance

     Il est surtout curieux de constater qu’il opère cette guérison en deux temps. Au premier contact, l’aveugle ouvre bien les yeux, mais sa vision reste floue. Pour lui, les personnes ressemblent à des arbres qui marchent. Jésus doit donc poser de nouveau les mains sur ses yeux et cette fois-ci l’homme voit clair. Le récit de cette guérison lente, en deux étapes, peut avoir comme but de nous faire découvrir un Jésus plus humain et plus proche de nous. Mais il a une signification symbolique plus importante.

Une métaphore de l’incompréhension

     Dans l’ensemble de l’évangile de Marc, ce récit se situe après un passage traitant de l’incompréhension des disciples. Jésus vient de leur dire, citant les prophètes Jérémie (5,21) et Ézéchiel (12, 2) : « Vous avez des yeux, mais ne voyez pas » (Marc 8,18). Après la guérison de l’aveugle, Marc place la profession de foi de Pierre : « “Et vous, qui dites-vous que je suis?” Prenant la parole, Pierre lui répond : “Tu es le Christ.” » (8,29) Le récit de la guérison de l’aveugle agit donc comme une plaque tournante, dans la foi des disciples. Il parle des efforts que Jésus doit déployer pour ouvrir les yeux de ses disciples afin qu’ils voient clair et comprennent qui il est.

     Dans les évangiles , l’aveuglement est souvent utilisé comme une métaphore de l’incompréhension. Voir, c’est opérer le discernement qu’il faut pour comprendre. La visée du récit est donc que tous, disciples et lecteurs, puissent voir et comprendre l’identité de Jésus.

Sébastien Doane

Texte complet dans :
Mais d’où vient la femme de Caïn. Les récits insolites de la Bible
Sébastien Doane, Montréal, Novalis ; Paris, Médiaspaul, 2010.

Article précédent :
Un nu-vite dans l’évangile (Marc 14, 50-52)