chronique
du 18 octobre 2002
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Des toilettes...
privées! Je me souviens d'une petite discussion que j'avais provoquée, au terme d'une longue journée passée à « fouiller » une fosse de trois mètres de profondeur, partiellement remplie d'une fine poussière grisâtre s'attaquant à tous les orifices de mon corps! Quelle était donc la fonction de ce trou, creusé au milieu d'un pâté de maisons? Chacun y allait de son hypothèse. Le directeur les rejeta toutes. Sur un ton mi-badin, mi-sérieux, je m'interrogeai soudain: mais ne serait-ce pas des « toilettes » publiques? Une autre suggestion qui rejoignit ses consoeurs dans la poubelle! Et pourtant, ai-je ajouté, cette « utilité » devait bien exister, mais personne n'a encore cru bon de s'y arrêter! Enfin ma question vient d'être reconnue, dans les faits, comme fort pertinente! Quels ouvrages? Figure 1 : Plan des maisons (toilettes indiquées par une flèche) Voilà une quinzaine d'années,
un archéologue israélien fouillait le quartier bâti
au pied de la citadelle de la ville de David, à Jérusalem.
Il y découvrit une petite salle carrée de 1,5 mètre
de côté dans une des maisons qui ne mesurait que 8 mètres
x 12 mètres de côté (fig. 1). Son sol était
recouvert d'un plâtrage épais. Dans un coin, un gros bloc
de calcaire était encore bien en place au-dessus d'une fosse de
2,6 mètres de profondeur (fig. 2). La face supérieure
du bloc était taillée en forme de siège et les parois
de ce siège, polies. Un large trou traversait le bloc à
la verticale ; devant le premier trou, un second, plus petit, le
traversait de façon oblique, pour déboucher sur un des côtés
verticaux. Un peu plus bas, sur la pente, un deuxième ouvrage de
même nature était déplacé de sa position première.
Récemment, un jeune anglais étudiait les notes d'un vieil
archéologue de Londres; il tomba sur le croquis et la description
d'un ouvrage en pierre qui correspondait tout à fait à « nos »
sièges. On avait découvert ce « nouveau »
siège au même endroit, dans la ville de David, en 1925! On
n'émettait alors aucune hypothèse sur son utilisation. Il
faut noter que le deuxième trou, percé à l'oblique,
ne se trouve que sur l'un des trois sièges. Figure 2 : Le siège des toilettes et l'écuelle Quel usage? Une telle installation aurait-elle servi de toilettes privées? Une écuelle en céramique déposée près du siège encore en place dans la « petite salle », permet de le croire. L'analyse du contenu de la fosse creusée sous le siège a révélé la présence d'une certaine quantité de chaux. L'écuelle devait servir à répandre cette chaux dont on connaît l'action antibactérienne. La même analyse a permis d'identifier des pollens provenant tous de plantes comestibles de même qu'un grand nombre d'oeufs de parasites intestinaux. Sous le siège troué, la fosse d'aisances témoigne donc encore de la présence de résidus alimentaires où les bactéries proliféraient, causant de graves troubles intestinaux. Un temps insuffisant de cuisson des viandes et une contamination de la nourriture par des matières fécales engendraient ces maladies. Ces toilettes privées sont les premières connues, du moins en Palestine; elles existaient cependant dès la période des rois de Juda, car elles furent détruites par les troupes de Nabuchodonosor, en 586 avant J.-C. Deux questions en guise de conclusion: ces toilettes étaient-elles une particularité de Jérusalem, puisqu'on n'en a pas trouvé ailleurs dans le pays? Le siège, percé d'un second trou à l'oblique, était-il conçu en fonction de l'anatomie masculine, ce qui supposerait des toilettes différentes pour chaque sexe? Le saura-t-on jamais? Guy Couturier, CSC Source: Parabole xix/4 (1997). Article précédent
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