Étonnante synagogue
 

Séduits par un climat hivernal fort agréable, les Hasmonéens (descendants des Maccabées) se bâtirent un palais d'hiver, à Jéricho vers l'an 130 av. J.-C. En 31 av. J.-C., un tremblement de terre dévasta toute la région. Quelques années plus tard, Hérode le Grand releva une partie des ruines et construisit un deuxième palais. Une découverte pour le moins surprenante attendait les archéologues israéliens qui ont fouillé tout récemment ce palais.

     Sur les ruines de ce qui devait être une synagogue, Hérode établit les fondements du nouveau palais. Des fouilles soignées permettent de reconstituer le plan d'un ensemble architectural édifié entre 75 et 50 av. J.-C. (plan).

Une découverte impressionnante

     Les archéologues ont pu distinguer les trois phases de la construction de la synagogue. La plus ancienne partie consiste en un bâtiment rectangulaire (A). De part et d'autre d'une cour à ciel ouvert (a), on aperçoit sept salles: une de chaque côté de l'entrée, cinq autres derrière la cour. Le plan d'une maison assez confortable.

Plan de la synagogue

     À gauche de la maison, on construit bientôt une grande salle de 16,2 m x 11,1 m (B) dont le plan, conforme à celui d'une salle de réunion (« basilique ») des Grecs, fut aussi adopté par les Romains. Pour loger plus de monde, on laisse ouvert tout le bâtiment au plafond soutenu sur ses quatre côtés par des rangées de colonnes. On ajoute des sièges en gradins le long du mur nord. Quel genre de réunions pouvait se tenir dans cette salle? La réponse est dans la présence au sud d'un autre bâtiment rectangulaire (C) aux dimensions plus modestes. Ici, deux petites salles conduisent à autant de minuscules bassins à peu près carrés (2,6 m x 2,5 m x 3,2 m) alimentés par des canaux creusés dans le sol. Un escalier longe le mur de l'un des bassins. L'installation sert aux bains rituels qui précèdent la prière. La grande salle devait être une synagogue. Un détail le confirme. Dans le coin nord-est, on a construit une sorte de petite niche carrée (1,5 m²), divisée en deux compartiments, meublée d'armoires en bois, en pierre et en plâtre (b).Tout juste l'espace requis pour remiser les livres sacrés utilisés dans les cérémonies.

     La troisième extension ne manque pas d'étonner. Il s'agit d'une petite salle (6,4 m x 5,1 m) à l'ouest de la synagogue (D). Pour dégager son entrée, on supprime la quasi-totalité du mur ouest, et on déplace un pilier. Une large banquette en forme de « U » occupe la majeure partie de la pièce, large de 1,4 m. Demeurent vacants un passage derrière les trois côtés de la banquette de même que l'espace du centre. Là aussi, l'usage de ce type d'aménagement est connu: salle à manger où les convives s'allongent sur des coussins disposés sur une banquette. Un élément confirme cette interprétation: le petit espace triangulaire accolé à cette salle à manger est une cuisine, équipée de ses fours! (d)

Une certitude et des questions

     Ce « complexe » a bel et bien servi de lieu de prière. C'est même, à ce jour, la plus ancienne synagogue connue (elle précède de quelque cent ans celle de Massada, bâtie durant les années 66-70 de notre ère). Le personnel du palais des Hasmonéens devait la fréquenter, puisqu'elle s'élèvait dans leur quartier. Son plan constitue un emprunt à l'architecture civile. C'est essentiellement une maison consacrée à la lecture de la Bible, à son étude, et à la prière des psaumes. Il n'est pas question d'y offrir des sacrifices! Ce même plan sera utilisé par les chrétiens, pour leurs édifices religieux (églises).

     Que penser du seul exemple connu de la présence d'une salle à manger? La course aux hypothèses est ouverte. Et qui pouvait bien occuper le bâtiment résidentiel? Des invités de passage? Je serais porté à croire que le chef de la synagogue y demeurait. Enfin, dans la partie arrière de cette résidence, tout au fond, on remarque une autre salle sans porte d'entrée (e): Y accédait-on par une trappe dans le plancher? S'agirait-il d'une chambre où garder l'argent ou les objets précieux de la communauté? À poursuivre!

Guy Couturier, CSC
Professeur émérite, Université de Montréal

Source: Parabole xxiii/5 (2001) 16.

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