chronique du 5 mai 2000 |
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De l'argent pour le temple de Yahweh!On vient de publier deux ostraca (textes écrits sur des fragments de poterie), propriété d'un collectionneur de Londres. Le premier (voir la figure plus bas) concerne le don de trois sicles d'argent (environ 35 grammes) pour le temple de Yahweh, et le deuxième rapporte la plainte d'une veuve esseulée (que vous lirez dans une prochaine chronique).
L'authenticité de ces textes ne fait pas question. La poterie comme l'écriture sont des VIIIe et VIIe siècles av. J.-C. (fin du VIIIe et partie du VIIe). Malheureusement, nous ignorons le lieu et les circonstances de leur découverte, ce qui rend leur interprétation plus difficile. C'est un autre cas de fouilles clandestines, un fléau de plus en plus répandu partout dans le monde! Le décretVoici la traduction de ce premier texte: « Comme t'a ordonné Ashyyahou, le roi, de donner par l'intermédiaire de Zakaryahou l'argent de Tarshish pour le temple de Yahweh: 3 sicles. » C'est en vertu d'un décret royal que Zakaryahou (Zacharie) doit poser le geste de verser trois sicles pour le temple de Yahweh. Nous ne connaissons ce décret que par le nom de son auteur: le roi Ashyyahou, mais l'histoire d'Israël ni celle de Juda ne mentionnent aucun roi de ce nom! Le ministre chargé de cette collecte d'argent s'appelle Zacharie. Ce détail permettra peut-être de résoudre l'énigme. L'argent provient de Tarshish, un lieu relié, dans l'Ancien Testament, à l'abondance d'or et d'argent (1 R 10,22; Jr 10,9; Es 60,9; Ez 27,12). Cet endroit se trouverait à l'ouest de la mer Méditerranée (Espagne?), d'après quelques textes bibliques et assyriens. Quel temple?L'argent est destiné au temple de Yahweh (bet Yahweh, voir nos soulignés à la ligne 4); c'est la première fois qu'un tel don est mentionné dans un texte autre que biblique. De quel temple s'agit-il? Le roi Josias (640-609) décida qu'un seul temple de Yahweh pouvait exister, soit celui de Jérusalem, ce dont témoigne la loi deutéronomique (2 R 23; Dt 12). Avant lui, on pouvait construire partout des temples de Yahweh. La réponse à notre question repose donc sur la datation du texte étudié et, par ricochet, sur l'identification du roi Ashyyahou. Somme toute, c'est le seul problème sérieux de cette courte inscription. Quel roi?On l'a dit, aucun roi de l'Ancien Testament ne porte ce nom d'Ashyyahou (voir notre souligné aux lignes 1 et 2). Et pourtant, nous y trouvons une succession ininterrompue de rois, aussi bien en Israël qu'en Juda! Qui est donc le mystérieux roi de l'inscription? Pour le découvrir, voyons la composition de la majorité des noms propres hébreux. Chacun constitue une phrase comportant un sujet, ordinairement un nom divin, et un verbe; ainsi Isaïe (Yasha'yahou) veut dire: « Yahweh » (yahou) «a sauvé» (yasha'). Selon qu'on place le sujet (nom divin) avant ou après le verbe, on obtient deux formes différentes d'un même nom. Voilà pourquoi le nom du petit roi Joiakin, qui ne régna qu'un an avant son exil à Babylone (en 598), nous est connu sous deux formes: Yôyakin (Yo: «Yahweh»; yahin: « il établit », Ez 1,2; 2 R 24,6) et Kânyahou (Kân: « il a établi »; yahou: «Yahweh», Jr 22,24.28). Le nom de «notre» roi comporte le verbe rare asha, signifiant «il existe, il est». Ainsi Ashyyahou veut dire «il exista Yahweh», dans l'ordre verbe-sujet, un nom que la Bible ne rapporte pas tel quel. Par contre, la séquence sujet-verbe est connue. Yeho'ash et Joas (Yahweh existe), l'un, roi d'Israël (798-783), l'autre, roi de Juda (835-796), pourraient tous deux être les auteurs du décret mentionné ici. Le nom du grand roi Josias de Juda comporte aussi le verbe asha, à l'imparfait (futur ou présent): « Il existe / existera Yahweh » (Yo'shyyahou), ce qui est très près de «notre» Ashyyahou (« il exista Yahweh »), le verbe étant au parfait. On aurait donc pu connaîre ce roi sous deux formes très proches d'un même nom, comme c'est le cas pour le roi Joiakin. Comment ne pas penser que c'est à Josias qu'il faut attribuer le décret royal du texte? Ce roi fit recueillir de l'argent pour la restauration du temple de Jérusalem (2 R 22,3-7), et l'un des officiers chargés de l'opération s'appelait Zacharie (2 Ch 35,8). La datation de l'inscription par l'étude de l'écriture et de la poterie permet de conclure à une concordance avec cet événement. Nous serions donc en présence d'un témoin direct de cette importante réforme religieuse. Source : Parabole 21/4 (1999) 16. Article précédent
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