chronique du 11 février 2000 |
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La monnaie, convoitise des archéologuesBien avant la monnaie, il y eut le troc, cet échange direct de biens de consommation : quatre ou cinq moutons contre un boeuf, par exemple. C'était la coutume au temps des patriarches. La pratique a survécu sous le règne de Salomon. Ce monarque livre au roi de Tyr de grandes quantités de froment et d'huile en échange du bois requis pour ses constructions à Jérusalem (1 R 5,24-25). Le mot latin pecunia « argent » vient de pecus « troupeau ». Il rappelle cette pratique du troc tout comme le mot français pécuniaire. Du troc à la monnaieOn franchit un pas quand le métal commence à tenir lieu de « monnaie d'échange ». Un procédé plus commode surtout si on tient à conserver ses propres biens ou qu'on se retrouve loin de chez soi. On peut alors recourir à une pesée de métaux. Avec une pesée d'argent, Abraham achète un champ (Gn 23,16) et Saül obtient de Samuel une information sur le sort de ses ânesses (1 S 9,8). Encore une fois, en passant par le latin argentum, « métal », « monnaie » et « richesses », nous trouvons l'origine du mot français argent, dans ses diverses acceptions. Des poids de différentes valeurs, étalonnés d'un coin sous surveillance, garantissent la pureté du métal et l'exactitude de la pesée. Le nombre croissant des achats, menus et importants, augmente et les faux coins se multiplient. La monnaie frappée fait alors son apparition, à la fois en Grèce et en Asie Mineure, une pratique qui dure toujours. Il s'agit d'authentifier une pièce de métal (or, argent, bronze), de forme ronde, par l'effigie du monarque ou d'un dieu, à l'avers, et la mention de son poids, au revers. Les premières monnaies perses, les dariques (Darius I, roi de 521 à 486), sont encore grossières. Très tôt, ce type de monnaie se répand dans toute l'Europe et le Proche-Orient. Des précisions s'ajoutent : le nom du monarque et l'année de la frappe, qui est toujours celle de son accession au trône. À chaque nouveau règne correspond une nouvelle frappe. Ce détail permet de dater avec précision les ruines où on retrouve une pièce. Voilà pourquoi la monnaie est devenue la convoitise des archéologues. La monnaie « juive »fig. 1 : monnaie frappée sous la domination perse La première monnaie « juive » paraît au IVe siècle. À la figure 1, une inscription entoure la tête d'un dieu assis sur une roue ailée. Elle se lit : YHD (Yehud ou Juda). L'autorité garante est perse, et non juive, ce qui explique l'image d'un dieu païen. Il faudra attendre le temps des Maccabées (deuxième moitié du IIe siècle), pour que l'autorité juive puisse garantir elle-même l'authenticité des monnaies en usage.
fig. 2 : avers et revers d'une monnaie frappée sous Hérode le Grand Au temps de l'Empire romain, Hérode le Grand (36-4 av. J.-C.) jouit d'une certaine autonomie. Rome lui permet donc de frapper sa propre monnaie. Il respecte la loi anicônique et l'inscription est toujours en grec. Sur notre illustration, un vase surmonte un trépied qu'entoure une inscription « Roi Hérode ». De l'autre côté de la même pièce : un brûle-parfum et une palme (fig. 2).
fig. 3 : monnaie frappée sous Ponce Pilate De l'an 5 à l'an 58/59 de notre ère, des gouverneurs romains exercent le pouvoir. Ils ne peuvent frapper que de menues monnaies de bronze telle l'obole de la veuve (Lc 21,1-4); la monnaie des riches, la drachme par exemple, est de Rome ou d'Athènes. Ces monnaies ne donnent que deux indications : le nom de l'empereur et l'année de son règne. Ainsi, les monnaies de Ponce Pilate représentent le sceptre sacerdotal (lituus) entouré de l'inscription (grecque) : « Empereur Tibère »; et l'année de la frappe 20/30 encerclée de lauriers (fig. 3). Les Juifs se révoltent contre Rome et se proclament indépendants de 66 à 70. La frappe de monnaies d'argent, privilège réservé à Rome, concrétise cette indépendance. Trois inscriptions en hébreu sont utilisées: « Jérusalem la sainte », « Pour la liberté d'Israël », « Pour la rédemption de Sion ».
La monnaie de Vespasien clôt notre série. Cet empereur conquiert Jérusalem, en 70, grâce à son fils Titus. Côté face, l'effigie de Vespasien, en gros plan, entourée de ses titres en abrégé; côté pile, sous un palmier, l'image émouvante d'une juive éplorée (Jérusalem? La Judée?). Derrière cette femme, se tient un soldat romain, javelot et glaive à la main, pied droit sur un casque. Autour de la pièce, une inscription latine : IUDAEA CAPTA « Judée conquise »: (fig. 4). Série d'articles
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