Lac Moraine en Alberta, Canada (John Lee / Unsplash).
En Dieu seul ma confiance : Psaume 62 (61)
Jean Grou | 28 mars 2022
Lire le psaume (version liturgique)
Apparenté aux écrits sapientiaux en raison de ses thèmes et de son vocabulaire, le Psaume 62 (61) s’inscrit néanmoins parmi les psaumes de confiance. C’est ce qui en ressort le plus nettement. S’il en est ainsi, c’est notamment parce que son auteur recourt à un jeu d’alternance entre les expressions de confiance en Dieu et des interpellations adressées aux humains :
- Versets 2-3 = expression de confiance en Dieu
- Versets 4-5 = interpellation adressée aux humains
- Versets 6-9 = expression de confiance en Dieu
- Versets 10-11 = interpellation adressée aux humains
- Versets 12-13 = expression de confiance en Dieu
Ce procédé lui permet d’établir des contrastes entre les humains et Dieu de manière à mettre en lumière toute la confiance que ce dernier mérite.
Cette confiance en Dieu s’exprime avec des termes qui reviennent régulièrement dans les psaumes : le Seigneur est un rocher, une citadelle, le salut, un refuge… C’est donc l’image de la solidité, de la fiabilité, de la protection qui se dégage ici. S’appuyer sur lui rend « inébranlable » (v. 3.7)
Le psaume interpelle les humains à deux reprises. La première fois (v. 4-5), c’est pour invectiver les méchants qui s’en prennent aux plus faibles, se plaisent à entacher la réputation des autres, sont menteurs et hypocrites. Ils apparaissent comme des gens à éviter, de qui il faut se méfier. Tout le contraire de Dieu, à qui l’on peut faire pleinement confiance.
La deuxième interpellation (v. 10-11) s’adresse manifestement à une autre catégorie de personnes, plus ouvertes à se laisser toucher par des paroles de sagesse. Ces deux versets en effet rappellent les maximes des écrits sapientiaux, tout particulièrement celles du livre des Proverbes. Il n’est aucunement question de Dieu dans ces quelques lignes, mais de la condition humaine, vulnérable et limitée. De tels propos permettent néanmoins de suggérer à quel point le Seigneur est un roc inébranlable et que s’éloigner de lui, c’est courir à sa perte.
De façon globale, le Psaume 62 (61) fait preuve d’une remarquable lucidité quant à la nature humaine et se révèle d’une indéniable actualité. Lorsqu’il dénonce ceux qui s’en prennent aux plus faibles, qui salissent des réputations ou qui mentent (v. 5-6), comment ne pas penser à toutes ces condamnations sans appel, cette désinformation et ces attaques personnelles qui sévissent sur les réseaux sociaux? Ces phénomènes ne sont certes pas nouveaux, mais l’accélération de la circulation de l’information les ont exacerbés.
Et lorsque le psalmiste rappelle à quel point la vie humaine est fragile, « moins qu’un souffle » (v. 10-11), n’est-ce pas ce dont nous avons pris conscience plus que jamais depuis le début de la pandémie?
C’est donc dans le concret de l’existence quotidienne que nous plonge le Psaume 62 (61). Par bonheur, il n’en reste pas là. Au contraire, il veut nous élever en nous ramenant au cœur de notre foi, qui donne à croire que l’être humain, bien que faillible, imparfait et limité, est créé à l’image de Dieu et a le potentiel de refléter son visage sans trop le déformer.
Jean Grou est bibliste et rédacteur en chef de Vie liturgique et Prions en Église.