Illustration accompagnant le Psaume 84. Psautier d’Utrecht. Manuscrit enluminé du IXe siècle.
L’attente du salut qui vient : Psaume 85 (84)
Pierre Bougie | 10 décembre 2004
Le Psaume 84 est le psaume par excellence de la préparation à Noël. Il exprime magnifiquement les thèmes de l’Avent. Surtout, il parle en poésie de la naissance de Jésus. « La Vérité (Jésus) germera de la terre... notre terre donnera son fruit. (vv. 12 et 13). » La Vierge Marie est figurée comme une terre fertile d’où grandira une petite pousse, le Germe.
La Bible décrit souvent Dieu comme s’il était un être humain ; c’est ce qu’on appelle un anthropomorphisme. Le psaume 84 en est un bel exemple et il va très loin dans ce sens. Le Seigneur est décrit comme quelqu’un qui change d’idée. Il a connu des moments de colère et d’indignation mais il peut adopter une autre attitude. Il n’est pas immuable comme le Dieu des philosophes grecs : « Tu as mis fin à toutes tes colères. »
Les mots les plus touchants du psaume sont : « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent ; la vérité germera de la terre et du ciel se penchera la justice. » (vv. 11-12)
La justice existe en Dieu. La justice peut être ce qui, en Dieu, fait qu’il rend l’homme juste et saint, mais ce peut être aussi ce qui lui fait prononcer une sentence sévère à l’égard du mauvais. Le psalmiste nous rappelle alors qu’en Dieu, il y a aussi l’amour et la paix. C’est ce qu’il convient d’attendre de lui en ce temps de célébration de Nöel.
Saint Bernard a reconstitué une petite pièce de théâtre à partir de ce psaume. Il s’agit de discussions dramatiques des quatre Vertus avec le Père des lumières, en vue de résoudre le cas d’Adam après sa chute. Vérité et Justice réclament la mort d’Adam au nom des engagements pris par le Seigneur. Amour s’écrie alors : « Pourquoi , Père, m’as-tu donné le jour, si je dois vivre si peu de temps? » Paix intervient : « Il ne convient pas aux Vertus de se disputer entre elles! » et suggère de s’en remettre au Fils. Celui-ci en vrai Salomon prononce : « L’Une dit : C’en est fait de moi, si Adam ne meurt! - L’Autre reprend : Je suis perdue s’il ne lui est pas fait miséricorde! - Donc que la mort devienne bonne, et chacune aura gagné son procès! »
Étonnement général devant tant de sagesse: mais comment faire? Le Fils, souverain Juge, reprend : « Il en sera ainsi, s’il se trouve quelqu’un qui, ne devant rien à la mort, veuille bien souffrir la mort par amour pour l’homme...Car l’amour est plus fort que la mort! » On devine le reste : le Fils trace son propre destin car il sera celui-là. Il assume par amour une condition mortelle.
Pierre Bougie, PSS est professeur au Grand séminaire de Montréal.