Le roi
promis
Durant la plus grande partie de son histoire, le peuple d'Israël
a vécu sous un régime monarchique. Durant environ
350 ans(-1040 à -587), il s'agissait d'un roi national (descendant
de David au sud, appartenant à différentes familles
au nord). Après la prise de Jérusalem par les armées
de Nabuchodonozor, en -587, ce furent des rois étrangers
qui gouvernèrent la Terre promise(Babyloniens, Perses, Grecs,
puis Romains) sauf durant une brève période, aux IIe
et Ier siècles avant notre ère. En principe, il s'agit
toujours de monarchies absolues. En fait, le pouvoir du roi est
limité à sa capacité concrète de l'exercer;
ainsi certains rois régnèrent en chefs incontestés,
d'autres durent se contenter d'un semblant de pouvoir face à
l'armée, au clergé, aux notables, etc... qui exerçaient
une influence déterminante.
Il n'est pas étonnant, dans
ce contexte, que la personne du roi, et, plus encore, la figure
du roi idéal, occupent une place privilégiée
dans la piété de l'Ancien Testament. Durant toute
la période de l'indépendance nationale, on espère,
au début de chaque nouveau règne, que le nouveau roi
sera meilleur que le précédent, qu'il fera régner
la justice et établira la paix, qu'il fera vraiment respecter
les exigences de la vie dans l'Alliance. Après la perte de
l'indépendance, on rêve d'un roi qui viendra redonner
à Israël son autonomie et lui redonnera sa grandeur
passée. Les textes exprimant cette espérance se trouvent
chez les prophètes (par exemple Is
9,1-7; 11,1-9)
ou dans l'histoire deutéronomique (par exemple 2
S 7) et dans les psaumes. Les chrétiens, en relisant
ces textes, y ont vu des annonces de la venue du Christ, le roi
par excellence venu accomplir toutes les promesses de Dieu et toute
l'espérance d'Israël.
Lire
le Psaume 72(71)
1. Quelle demande adresse-t-on à Dieu au sujet du roi?
2. Quels sont les souhaits qu'on formule pour lui?
3. Quelles seront les caractéristiques de son pouvoir?
4. Quel rapport existe-t-il entre ce roi et Dieu?
Observations
La demande initiale, la seule qui s'adresse explicitement à
Dieu (v. 1) concerne l'esprit de sagesse et de discernement
dont le nouveau roi doit être investi. On reconnaît
ici l'écho de la prière que Salomon adresse à
Dieu au début de son règne (1
R 3,6-9; 2
Ch 1,7-10). C'est sans doute pour cette raison que ce psaume
est attribué à Salomon (cf. v. 1). Mais l'exercice
de la justice est le devoir premier du prince; c'est lui qui doit
appliquer les règles de l'Alliance qui sont les conditions
essentielles pour un fonctionnement harmonieux des relations du
peuple avec Dieu et des membres du peuple entre eux. Il est donc
indispensable que le roi soit rempli de l'Esprit de Dieu pour exercer
correctement sa mission.
1. Le psaume se poursuit par une évocation des grandeurs
du règne à venir. Le roi sera le défenseur
des pauvres, le protecteur de tous ceux et celles qui n'ont pas
de moyens de défense (vv. 2-3.12-14). Sous son règne
viendra la paix dans la justice (v. 7) et son empire s'étendra
à toutes les nations étrangères (vv. 8.10-11.17).
Même la nature sera renouvelée et retrouvera sa fécondité
(vv. 6.16). La Bête, c'est-à-dire l'ennemi de
Dieu, la puissance du mal qui sème le désordre dans
la création, sera dominée (v. 9).
2. À lire cette énumération, on comprend facilement
qu'il ne s'agit pas seulement d'un règne humain. Ce roi doit
d'ailleurs régner siècle après siècle
(v. 5) et sa présence constituera une bénédiction
(v. 6). Il est bien évident qu'à partir de souhaits
formulés à l'endroit d'un roi historique précis,
on est passé à l'élaboration d'un programme
qui dépasse les possibilités de n'importe quel roi
et qui nous oriente vers l'attente du règne de Dieu.
3. Les versets 18-19, qui concluent le 2e recueil du psautier (Ps
42-72), oriente aussi l'interprétation de ce psaume. Le roi,
aussi grand soit-il, n'est toujours que le lieutenant de Dieu, le
seul qui fait des merveilles (v. 18). Ainsi, le compilateur
du psautier tient à mettre en évidence le fait que
le seul vrai roi d'Israël, c'est toujours Dieu.
Notes
Deux passages de ce psaume ont connu
un destin particulier. Les versets 10-11, qui évoquent la
soumission des rois étrangers, sont à l'origine de
la tradition qui a fait des Mages, des rois (cf. Mt
2,1-12), d'où la fête des Rois.
Le verset 8, dans sa version latine,
se lit: Et dominabitur a mari usque ad mare. C'est là
l'origine de la devise du Canada, choisie par les Pères de
la confédération et du terme Dominion, aujourd'hui
tombé dans l'oubli, pour désigner le Canada.
Jérôme Longtin, ptre
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La
prière de supplication
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