Débranche,
mon vieux!
S'ils n'écoutent pas Moïse ni les prophètes,
quelqu'un pourra bien ressusciter des morts: ils ne seront pas convaincus(Luc
16, 31).
Montréal, un jour de froid. On a la tête saturée
des bruits de la grande ville, le corps moulu d'avoir tant marché,
le regard assombri par le triste paysage de la laideur qui s'offre
un peu partout : maisons grises, papiers gras et graffiti ... Et
témoin d'un monde blessé, la pauvreté partout,
elle aussi : celle qui dort affalée sur un banc, celle qui
vous mendie quelques sous que vous avez le coeur de refuser. Mais,
même en donnant, le coeur n'y est pas.
Et puis, clin de soleil au détour
d'une rue. Six violonistes qui jouent un concerto de Bach. On s'approche.
On se dit : c'est trop beau, c'est pas vrai! Si. On s'arrête
pour un second, un troisième morceau de cette musique céleste
qui nous réconcilie avec le monde et nous y renvoie comme
allégés. Pressé, indifférent, un gars
traverse l'attroupement, presque sur nos pieds ... Pas au diapason,
celui-là, avec ses écouteurs branchés sur sa
sono personnelle! Quelqu'un lui fait signe : débranche, mon
vieux! Écoute donc! En vain. Ainsi en est-il des signes de
Dieu : c'est une rencontre au détour de la grisaille ou de
la fatigue, un violon qui fait danser le quotidien. Là est
le miracle. Au même endroit, certains ne voient, n'entendent
rien ... (Chantal Berhin).
LIEN: Ne sommes-nous pas trop fermés aux autres? Ne sommes-nous
pas parfois aveugles, insensibles à la misère de nos
frères et surs? N'avons-nous pas été
avertis? L'appel à la justice n'a cessé de nous être
adressé à travers l'histoire du peuple de Dieu: tel
est le sens de la parabole, très imagée, de Lazare
et du mauvais riche.
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