«
Mains d'Amour »
...Personne ne nous a embauchés... Il leur dit : Allez
vous aussi à ma vigne (Matthieu 20, 7).
Sans argent, sans toit, apparemment
sans grande organisation, le père Ceyrac, jésuite
français installé dans le Tamil Nadu indien, a réussi
à arracher de l'abandon des enfants très pauvres que
son réseau nourrit et soutient scolairement.
Ses outils: l'émerveillement, la joie et surtout l'immense
compassion de jeunes femmes indiennes veuves, ou délaissées,
venues de toute la région pour l'aider.
La première trouvaille de
ce prêtre à la retraite et de Kaley, son assistant
analphabète et sans logis: faire aider les enfants très
pauvres, parfois orphelins, par des jeunes filles ou des jeunes
femmes veuves ou condamnées par la tradition à l'isolement
et la pauvreté alors qu'elles débordent de désir
de servir et souvent de compétence. Elles récupèrent
les enfants après l'école, leur servent un repas puis
elles aideront les petits à faire leurs devoirs et apprendre
leurs leçons, souvent dehors, par terre, à la lumière
des réverbères, sans livre ni tableau mais avec une
inconcevable tendresse et une réelle compétence. Chaque
femme s'occupe ainsi de dizaines d'enfants. Moyennant un défraiement
minuscule à notre échelle, mais qui leur permet de
survivre. Le système a fait sortir d'une quasi réclusion
des centaines de veuves de 20 à 40 ans.
En tout 32 000 enfants sont actuellement
concernés dont 3 000 orphelins entièrement pris en
charge et logés chez ces jeunes veuves. Interrogé
sur le « problème de l'immense pauvreté en Inde
» le père Ceyrac répond avec un sourire : «
La meilleure manière d'entrer en contact avec ce pays, ce
n'est pas de l'aborder comme un immense problème mais comme
un mystère d'une immense beauté. Aussi beau que ces
enfants. Et un mystère vous savez, ça s'élucide
par l'amour, par la raison ».
Ce que dit le Père Ceyrac,
c'est que tous les éléments de solution sont là,
même sans grands moyens : d'immenses ressources humaines sont
prêtes à se mobiliser, à partir du moment où
une forme est esquissée, qui va dans le sens des valeurs
d'amour et de compassion. « Mon assistant Kaley a eu cette
idée géniale, en sauvant les enfants, nous sauvons
les femmes; en sauvant les femmes, nous sauvons l'Inde, car elles
sont l'avenir de ce pays » (Tiré de Les enfants
du père Ceyrac, Charles Ben Aarsil, contact: Erreur !
Référence de lien hypertexte non valide. Nouvelles
clés, no 31, 2001).
LIEN: Le père Ceyrac assisté de son Kaley a compris
l'exclusion de ces femmes, celles de la dernière heure, que
plus personne n'embauche, laissées pour compte. Il leur redonne
du travail et leur plein salaire: dignité retrouvée,
du sens à leur destinée, de l'amour à vivre
et à partager.
La justice de Dieu s'établit
bien au-delà d'un système économique ou syndical
et ne se règle pas sur les lois du marché.
* * * * *
C'est absurde d'engager des hommes
à la dernière heure, encore plus absurde de les payer
au tarif de la journée entière.
Oui, c'est absurde de parler à la samaritaine, absurde d'accueillir
Marie Madeleine, absurde d'engager Matthieu un voleur connu, Pierre
un lâche et Paul un persécuteur. C'est absurde de faire
la fête pour un fils gaspilleur, absurde de courir après
la brebis égarée en laissant les 99 autres sans surveillance.
Si nous avons peine à accueillir
l'attitude de ce propriétaire de vigne qui paie en dépit
du bon sens, l'attitude de ce Dieu qui se met à dépenser
sa grâce sans compter, c'est peut-être que nous avons
une religion trop étroite, trop calculatrice, ... ou que
nous n'avons jamais été au chômage (Gabriel
Ringlet, Éloge de la fragilité, p. 119).
Chronique
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Le pardon, libérateur de... celui
qui pardonne
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