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Dimanche de la Sainte-Trinité C - 22 mai 2016
 

La Trinité est miséricorde

La Sainte Trinité, miniature des Grandes Heures d'Anne de Bretagne illustrées par Jean Bourdichon.

La Sainte Trinité, miniature des Grandes Heures d'Anne de Bretagne illustrées par Jean Bourdichon.

 

 

Le départ de Jésus et la venue du Défenseur : Jean 16, 12-15
Autres lectures : Proverbes 8, 22-31; Psaume 8; Romains 5, 1-5

 

Dans la Bulle d'Indiction de l'Année jubilaire extraordinaire de la Miséricorde, on trouve, dès le paragraphe 2, cette très forte affirmation : « Miséricorde est le mot qui révèle le mystère de la Sainte Trinité ».  Au moment où notre Église célèbre la solennité de la Trinité, se pourrait-il que le texte évangélique proposé nous offre la possibilité d'approfondir cette affirmation du pape François?  Le texte Jean 16,12-15 fait, en effet, partie de ce qu'on désigne souvent comme le second discours d'adieu de Jésus, tant il semble reprendre des thèmes déjà abordés dans la première partie de cette section de l'évangile.

L’Esprit de sainteté et de vérité

     Une première lecture des versets 12-15 nous porterait à dire que c'est surtout la personne de l'Esprit qui y est mise en lumière, désignée comme « Esprit de Vérité ».  À noter que dans le livre des signes (Jn 1-12) et dans le récit de la passion-résurrection de Jésus (Jn 18-20) l'Esprit est évoqué sous deux appellations : Esprit et Esprit Saint. Dans l'ensemble du discours d’adieu (Jn 14-17), on a deux autres appellations: celle que nous avons identifiée en Jn 16, 13 : l’Esprit de Vérité, et une autre que l'on retrouve dans 4 des 5 passages du discours qui parlent de l'Esprit comme le Paraclet. Comme le passage Jn 14, 16-17 utilise, pour évoquer l'Esprit, les deux appellations : « Esprit de Vérité » et « Paraclet » et que Jn 14, 26 porte « Paraclet » et « Esprit Saint », il ne fait pas l'ombre d'un doute que nos appellations du discours d'adieu se réfèrent bien à l'Esprit Saint.

     Mais, poursuivons un peu plus loin notre réflexion en essayant de cerner quel rôle le discours d'adieu donne à cet Esprit Saint appelé aussi « Paraclet » et « Esprit  de Vérité ».  Selon Jn 16, 13, « l'Esprit de Vérité » conduira à la vérité tout entière; il parlera de ce qu'il a entendu et non de lui-même; il dévoilera les choses à venir. Il glorifiera Jésus, car c'est le bien de Jésus qu'il recevra, puis, dévoilera.  Au compte de « l'Esprit de Vérité » et du « Paraclet », Jn 14, 16s met le fait d'être avec les disciples à jamais, de demeurer auprès d'eux, de rendre témoignage à Jésus parce qu'ils sont avec lui depuis le commencement.

Continuité entre l’Esprit et Jésus

     Quelques versets plus loin, soit en Jn 14, 26, l'Esprit est présenté comme Celui qui enseignera tout aux disciples et qui leur rappellera tout ce que le Christ a dit. En Jn 15, 26, l'Esprit est Celui qui témoigne de Jésus. En Jn 16, 7, l'Esprit a pour rôle d'établir la culpabilité du monde en fait de péché, en fait de justice et en fait de jugement. Si l'Esprit conduit à la Vérité tout entière, est-ce dire que des vérités non révélées par Jésus nous seront communiquées, ou est-il question de l'Esprit qui explique, qui permet d'approfondir l'enseignement de Jésus?  Il semble bien qu'il s'agit d'expliquer, d'approfondir ce que Jésus qui se présente comme la Voie, la Vérité et la Vie (Jn 14, 6) a révélé aux siens. On peut noter d'ailleurs que le verbe utilisé en grec pour rendre l'action de conduire, dans l'expression « conduire vers la vérité totale » (hodègèsei), est de la même racine que « hodos » définissant Jésus comme le chemin. On remarque que l'action de l'Esprit, telle que Jn 16,13 la définit, est particulièrement bien harmonisée à la mission de Jésus comme voie et comme vérité.  Et Jn 16, 14 confirme cette continuité entre la mission de Jésus et celle de l'Esprit : Ce dernier parle de ce qu'Il a entendu, il dévoilera tout le nouveau qui va rayonner de la mort et de la résurrection de Jésus, il va glorifier Jésus; c'est le bien de Jésus qu'il va recevoir et dévoilera. Déjà Jn 14, 16 établissait le lien entre mission de Jésus et mission de l'Esprit puisque l'Esprit promis était identifié comme un « autre paraclet » (Jn 14, 16). La promesse de Jésus concernant la demeure stable de l’Esprit auprès des disciples, nous renvoie à la finale de Mt 28 où Jésus promet qu'Il sera avec les siens jusqu'à la fin du monde. On trouvera le rôle d'« enseignant » accompli par l'Esprit en Jn 14, 26 : Il enseignera tout aux disciples et il leur rappellera tout ce que le Christ a dit. Dans un magnifique développement sur Jn 14, 17, Michel Gourgues, exégète dominicain,1 note que le verbe utilisé en grec pour exprimer que l'Esprit rappellera aux disciples tout ce que le Christ leur avait dit : « hypomimnèskô » ne veut pas dire tout simplement qu'Il va rafraîchir la mémoire des disciples. Ce verbe évoque une double dimension : remettre en mémoire, oui,  mais aussi faire comprendre. La part de nouveauté de l'enseignement de l'Esprit consisterait donc à « déployer dans la perception des disciples la pleine portée de la révélation faite antérieurement par Jésus ». En Jn 15, 26, le rôle attribué à l'Esprit, c'est de rendre témoignage à Jésus. Quant à Jn 16, 7-11 qui précède immédiatement le texte de notre célébration, il donne un rôle juridique à l'Esprit : celui d'établir la culpabilité du monde parce qu'il n'a pas cru au Christ, alors que le retour du Christ au Père prouve qu'il était juste qu'il se dise fils de Dieu, et alors que sa mort, loin d'être un échec, était une victoire sur le Prince de ce monde.

L’Esprit, don de Dieu

     Notre approfondissement du rôle de l'Esprit de Vérité, du Paraclet, de l'Esprit Saint, nous a permis de saisir en Jn 16, 12-15, et ailleurs dans le discours d’adieu, combien la mission de ce dernier était intimement reliée à celle du Christ Jésus. Or, comme nous ne cessons de le répéter en cette année Sainte, le « Fils est le visage de la Miséricorde du Père ».  N'est-il pas juste alors de confesser avec le pape François que « Miséricorde est le mot qui révèle le mystère de la Sainte Trinité »?

     Cette unité des trois, ne nous est-elle pas aussi révélée dans la façon dont nos 5 textes sur l'Esprit parlent de l'origine du don de l'Esprit?  D'après Jn 14, 16, le Fils prie le Père et ce dernier donnera l'autre Paraclet, l'Esprit. Dans le même chapitre, le Père enverra le Paraclet, l'Esprit Saint au nom du Christ (Jn 14, 26). Au chapitre 15, le Christ se présente comme celui qui envoie le Paraclet au nom du Père; mais il est aussi question dans la même proposition du Christ qui envoie l'Esprit de Vérité qui vient du Père (Jn 15, 26). Dans les versets précédant immédiatement le texte de notre liturgie, Jésus dit que, s'il part, il enverra le Paraclet (Jn 16, 7).

     Une attention aimante nous a permis de découvrir combien le morceau du 4e évangile qui a été choisi pour notre liturgie de la Trinité, évoque discrètement mais puissamment que « Miséricorde » est le mot qui révèle le mystère de la Sainte Trinité.

     La Lettre de Paul aux Romains le dit d'une autre façon (Rm 5).  Notre paix avec Dieu passe par notre Seigneur Jésus Christ puisque ce dernier nous donne accès au monde de la grâce dans lequel nous sommes établis. Monde de la grâce, monde de l'amour de Dieu répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint qui nous a été donné

     Quelques siècles avant la venue en notre chair de Jésus, le Fils de Dieu, le peuple de la promesse anticipait cet incomparable don par une annonce de la Sagesse. Cette Sagesse clamait que lorsque Dieu n'avait pas encore fait ni la terre, ni les champs, ni l'argile primitive, elle était à ses côtés comme un maître d'œuvre, trouvant ses délices jour après jour…trouvant ses délices avec les fils des hommes (Pr 8, 22-31).

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1 Michel Gourgues, En Esprit et en Vérité Pistes d'exploration de l'évangile de Jean. Médiaspaul, 2002, pp 248-289.

 

Lorraine Caza, CND

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2491. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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Les premiers fruits de la résurrection