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2e dimanche de Carême C - 21 février 2016
 

Citoyens des cieux, point final!

La Transfiguration

Mosaïque byzantine de la Transfiguration - Monastère Sainte Catherine au Sinaï

 

 

 

La Transfiguration de Jésus : Luc 9, 28-36
Autres lectures : Genèse 15, 5-12.17-18; Psaume 26(27); Philippiens 3, 17 - 4,1

 

Nous sommes encore sous le choc. Des citoyens de pays instables voient leurs vies et leurs droits bouleversés par des vagues de barbarie sans précédent à notre époque. Des familles fuient en perdant tout, y compris leur appartenance plus que millénaire à la terre de leurs ancêtres. La vague des réfugiés qui balaie la Méditerranée secoue notre indifférence. Le problème de citoyenneté bafouée qu’on croyait « lointain » nous concerne tous. Il nous révèle l’importance d’être « citoyen quelque part »...

     Le déni de citoyenneté, répété à des milliers d’exemplaires, nous apprend aussi quelque chose d’important pour notre vie de foi. On nous demande souvent (avec mépris) : « Qu’est-ce que ça donne de croire aujourd’hui? » Aujourd’hui, nous entendons avec intérêt la réponse de saint Paul : nous, nous sommes citoyens des cieux(Philippiens 3, 20). Ce langage de saint Paul décrit la portée de l’alliance offerte à notre bénéfice par le Dieu de Jésus Christ. Notre langage aurait avantage à intégrer ce « chemin citoyen » qui enthousiasmait les premiers chrétiens. Le beau titre de « citoyens des cieux » confirme les bienfaits de l’alliance conclue jadis par Dieu avec Abraham, le père des croyants.

L’alliance à l’infini
Genèse 15, 5-12. 17-18

     Au sortir de nos torpeurs, comme Abraham (Genèse 15, 12) nous prenons conscience des splendeurs de l’alliance où Dieu nous a fait entrer. Dieu s'est engagé envers Abraham à devenir son pourvoyeur de biens supérieurs: une descendance, un pays...  Bref, des indicateurs certains d’une prospérité bienvenue dans un environnement aux ressources limitées. Cet engagement de Dieu est scellé au moment où Abraham lâche prise, dans un sommeil profond. Cette alliance, confirmée avec brasier et torche fumante, fait des flammèches, c’est le cas de le dire!

     L’appartenance à Dieu peut être définitive. Il s’agit désormais de vivre en s’ajustant aux exigences du Dieu très saint, à l’exemple de notre ancêtre dans la foi : Abraham eut foi dans le Seigneur, et le Seigneur estima qu’il était juste (Genèse 15, 6).  Dans l’évangile, Jésus transfiguré tient conversation avec les deux envoyés par excellence de Dieu, Moïse et Élie. Cette discussion au sujet de la montée de Jésus vers Jérusalem démontre que Jésus continue l'action des messagers divins de jadis. Il offre un statut d’alliance permanent, un lien définitif avec Dieu.

La transfiguration sans entraves
Luc 9, 28b-36

     La saison bénie du Carême est un moment de retour aux sources de la foi. Il convient d’y revenir en nous laissant guider par l’expérience de la Transfiguration de Jésus. Car, c’est bien vrai, le terrible quotidien est souvent opaque. Malgré la grande noirceur qui semble envahir nos cœurs, nous sommes invités à voir la vie autrement. Telle fut l’expérience de Pierre, de Jean et de Jacques (Luc 9, 28). Notre quotidien s’illumine quand nous prenons conscience des effets de la relation unique que Jésus vit avec le Père éternel, le Dieu de toutes les miséricordes. Malgré les obscurités du quotidien, l’appartenance profonde de Jésus finit par transparaître dans notre vécu. Elle offre des issues lumineuses au-delà de tous les obstacles. Nous vivons alors l’expérience spirituelle positive et réconfortante dont témoigne l’évangile, quand il raconte que le visage de Jésus apparaît tout autre!

     Pour les croyants sensibles à l’identité réelle de Jésus, les moindres détails de la description du Transfiguré sont un motif de joie. Même ses vêtements s’avèrent dignes d’un roi (Luc 9, 29)! En noble Fils de son Père (Luc 9, 35), Jésus est tellement plus que ce que les yeux des disciples pouvaient normalement percevoir. Il est porteur de la même gloire que Dieu (Luc 9, 32).  On comprend alors l’exclamation enthousiaste de Pierre: Maître, il est heureux que nous soyons ici… (Luc 9, 33). Puisse cette grande émotion trouver écho dans la discrétion de notre silence intérieur! C’est du moins une étape stratégique, tant que la transfiguration définitive, la résurrection, n'aura pas eu lieu : Les disciples gardèrent le silence… (Luc 9, 36).

La citoyenneté qui transfigure
Philippiens 3, 17 – 4, 1

     La résurrection du Fils de Dieu marque le début d'une ère historique absolument différente de tout ce qui l'a précédé. En effet, désormais, nous sommes citoyens des cieux! Il y a « quelque chose » au-delà des limites physiques et biologiques du corps humain. Le passage de Jésus dans notre histoire humaine a libéré nos corps de la perspective d'une destruction totale : Nous attendons comme sauveur le Seigneur Jésus Christ, lui qui transformera nos pauvres corps à l'image de son corps glorieux, avec la puissance qui le rend capable aussi de tout dominer (Philippiens 3, 20b-21).

     Nous bénéficions déjà d'une appartenance indéniable à la famille de Dieu, avec les avantages d'un statut que seul Dieu peut conférer. À l'époque de Paul, ce n'est pas la seule richesse qui était le critère de classification des gens. C'était la place dans le groupe, le statut social. De toute évidence, Paul croit que la transformation vécue par Jésus (d'un corps de chair à un corps de gloire) va bénéficier à ceux et celles qui le suivent.  Cette foi transforme notre identité. Nous appartenons à la maison de Dieu, nous sommes citoyens des cieux (Philippiens 3, 20).  Déjà, nous percevons autrement le terme de l’aventure humaine.  La foi donne à toute chose une perspective nouvelle. On se surprend à rêver : que cela dure longtemps…

Une citoyenneté à partager

     Revenons à notre époque. La perte du statut de citoyens vécue par les réfugiés est vraiment grave. Dès le début de son pontificat, le pape François a sonné l’alarme. Il se révélait déjà comme le pape de la miséricorde lorsqu’il osa sonner l’alarme sur ce problème. Dans sa première visite en dehors de Rome, le pape visite Lampedusa, un des points d’arrivée en Italie des personnes déracinées par la guerre et la haine. Le pape qualifie de «honte» le manque d’accueil et d’intégration subi par des milliers de migrants. Le pape propose un autre comportement : l’intégration qui doit être offerte à des citoyens déracinés de leur patrie contre leur volonté.

     Petit à petit, les pays d’Europe, puis nos pays ont été touchés par la vague. Vague d’indignation d’abord, puis vague de compassion active. Plusieurs personnes se sont portées volontaires pour intégrer des réfugiés avec toute la dignité qui convient à des êtres humains. Un des ingrédients du succès de cette intégration réside dans la capacité des nations à reconnaître rapidement la qualité de citoyens à ces nouveaux venus.

     Nous pouvons nous engager dans cette vague de solidarité pour toutes sortes de raisons. Nous serons sensibles à la présence, parmi les réfugiés, de croyants et de croyantes qui sont les héritiers directs des promesses faites à Abraham. Les chrétiens des Églises orientales, déracinés dans ce tsunami sociétal, trouveront-ils auprès de nous un accueil fraternel? Une autre raison valable consiste à nous souvenir qu’en plus de notre citoyenneté territoriale, nous participons à la vie de la maison de Dieu. Nous sommes inclus dans l’alliance donnée à Abraham.  « Nous sommes citoyens des cieux ».  C’est immense.  C’est tout un programme de solidarité!

     Les événements actuels nous démontrent que les progrès de la conscience trouvent un appui fondamental dans les certitudes du christianisme. Les valeurs de démocratie, de pacifisme, d'écologie, de respect des personnes sont hautement compatibles avec notre conscience d'être enfants de Dieu. Que ce Carême nous incite à partager cette appartenance commune imaginée par Dieu pour notre bénéfice!

 

Alain Faucher, ptre

Source : Le Feuillet biblique, no 2478. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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