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20e dimanche ordinaire B - 16 août 2015

 

Nourrir pour faire vivre

Miche de pain

 

 

Discours sur le pain de vie : Jean 6, 51-58
Autres lectures : Proverbes 9, 1-6; Psaume 33(34); Éphésiens 5, 15-20

 

Le mot chair revient encore en tout début de l’évangile de ce dimanche : Le pain que je donnerai, dit Jésus, c’est ma chair donnée pour que le monde aie la vie (Jn 6, 51). Et les juifs de s’en étonner : Comment peut-il nous donner sa chair à manger?. Cette expression a été longuement explicitée. Aujourd’hui j’emprunterai une autre avenue. J’insisterai sur le geste de donner à manger, de nourrir. Ces expressions peuvent nous permettre de faire des liens intéressants avec les paroles de Jésus : celui qui me mangera vivra par moi (v. 57).

Donner à manger par amour

     J’ai lu un ouvrage du neurologue Boris Cyrulnik qui s’intitule : Les nourritures affectives. Il avance que « lorsqu’une femme cuisine, ce n’est pas pour se nourrir, c’est pour créer un scénario d’amour ». On le sait, manger en solitaire est souvent accompagné d’une certaine tristesse. Le repas est un geste communautaire. Quand une personne cuisine c’est la plupart du temps pour nourrir les autres. Il est juste alors de dire qu’elle crée un « scénario d’amour » en saupoudrant, en assaisonnant, en ajoutant une bougie, des fleurs. Les convives sont continuellement dans la pensée de celui ou celle qui casse les œufs ou qui met au four.

Donner à manger par compassion

     On m’a raconté qu’une dame allait chaque jour donner à manger à la cuillère à son mari, alité dans un centre pour malade chronique. Un mari qui l’avait quittée depuis de nombreuses années. Un mari qui l’avait violentée. Un mari qui l’avait réduite à travailler comme domestique alors qu’elle était mère de dix enfants. Pourquoi donc un tel geste? Parce que, disait-elle, il est le père de mes enfants. Parce que nous nous sommes aimés aux premiers jours et que nous avons lié nos vies devant Dieu.

Nourrir de sa moelle

     On se souvient de cette asiatique aux prises avec une maladie qui nécessitait une greffe de moelle osseuse et pour qui un appel à tous a été lancé ? Des milliers d’offres venant des quatre coins du globe sont parvenus au centre hospitalier. On privilégiait ses compatriotes, bien sûr, mais des individus n’ayant aucun lien ethnique se sont portés volontaires. Tous étaient conscients que leur substance vitale pouvait sauver la vie de cette mère de famille. La vie humaine s’entend. Mais, quoi qu’il en soit, ce geste était un geste salvifique.

Nourrir de son lait

     Notre culture avait délaissé la manière traditionnelle de nourrir son enfant en lui donnant le sein. Cette manière ancestrale revient semble-t-il malgré la tendance de vouloir tout accomplir rapidement. Si nourrir le nourrisson prend du temps, l’expérience est unique. Il existe une symbiose exceptionnelle entre celle qui nourrit et l’enfant qui se nourrit. On va même jusqu’à dire que c’est une expérience fondatrice pour le développement de ce petit être. La femme donne de sa substance, le produit de sa propre chair afin que la vie circule dans le corps l’enfant.

Nourrir pour la fête

     Récemment j’ai été invitée chez une nièce pour mon anniversaire de naissance. J’y suis allée sans être vraiment affamée de pain mais heureuse de me nourrir de l’affection de mes proches qui partageraient le repas avec moi. Le désir de la rencontre primait celui de nourrir le corps. La présence joyeuse et le dévouement de l’hôtesse ajoutaient une saveur particulière aux mets.

Donner sa vie à manger

     Le film Des hommes et des dieux sorti en salle en 2010 racontant l’histoire de sept moines assassinés par des extrémistes musulmans a fait couler beaucoup d’encre. Fallait-il aller jusque là? Dieu leur demandait-il de risquer leur vie, de la donner, de la sacrifier? Ces moines sont les seuls à pouvoir répondre à ces questions existentielles mais un fait est certain : Ils l’ont fait en connaissance de cause et en fidélité pour ce peuple algérien qu’ils aimaient et par amour du Seigneur à qui ils avaient consacré leur vie.

Le Don du Christ se perpétue

     Dans notre monde taxé souvent d’être un monde axé sur l’individualisme et la rentabilité, il y a malgré tout ce bonheur que l’on éprouve à donner de sa personne, de sa chair en somme, pour aider ou sauver les autres. Cet altruisme tout humain est le même qui, une fois christianisé, donnera la force de passer du simple geste à l’héroïsme du martyre. Jésus, ce frère universel, fut le premier à nous assurer de cette mystérieuse réalité : Celui qui mange ma chair demeure en moi et moi je demeure en lui (v. 56). C’est justement cette osmose qui nous permet de donner à manger à nos frères et sœurs comme Jésus l’a fait.

 

Ghislaine Salvail, SJSH

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2451. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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