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Célébrer la Parole

 

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6e dimanche ordinaire A - 16 février 2014

 

Comme un filet d'eau claire!

 

Jésus et la Loi : Matthieu 5, 17-37
Autres lectures : Siracide 15, 15-20; Psaume 118(119); 1 Corinthiens 2, 6-10


Nous trouvons dans cet évangile, une synthèse de l’enseignement de Jésus concernant la Loi juive. Il va sans dire que Jésus a abordé la manière de respecter et d’observer la Loi plusieurs fois mais le rédacteur a voulu tout regrouper dans ce passage. Nous avons donc là, un document d’une grande importance car la mission de Jésus est justement non pas d’abolir la Loi mais de l’accomplir. Différence de taille!

La valeur de la loi selon Jésus

     D’emblée, Jésus affirme qu’il n’est pas venu pour abolir la Loi ou les Prophètes mais accomplir (Matthieu 5, 17). Qu’est-ce à dire? Cela signifie qu’il est venu donner à la Loi (la Torah) son sens plénier. Jésus révèle ce qui est là pour durer dans la loi et ce qui passera : Avant que le ciel et la terre disparaissent, pas une lettre ne disparaîtra jusqu’à ce que tout se réalise (v. 18). L’enseignement de Jésus concernant la Loi, en ces versets, est présenté comme celui d’un Juif pieux, soucieux de respecter les usages de la Loi mosaïque mais aussi celui d’un observateur éclairé qui juge important d’en faire ressortir la relativité. Et cela, autant en ce qui a trait à la relation des hommes entre eux qu’à leur relation avec Dieu.

La justice des scribes et des pharisiens

     Lorsque Jésus parle de la justice des scribes et des pharisiens il veut souligner par là une observance méticuleuse des prescriptions à laquelle il manquerait l’intériorisation de leur valeur. Voilà donc le sens à donner à ces paroles : Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux (v. 20). En effet, cette observance toute matérielle peut illusionner les personnes qui s’y adonnent. C’est la mise en garde de l’apôtre Jacques : Mettez la Parole (la loi) en application, ne vous contentez pas de l’écouter : ce serait pour vous faire illusion (Jacques 1, 22). Cette scrupuleuse observance peut même corrompre toute la Loi, même dans ce qu’elle a de meilleur. Jésus insiste car il veut que ses disciples comprennent que la loi doit être au service de la liberté intérieure et non pas asservir ses fidèles observateurs.

Les prescriptions fondamentales de la Loi

     Jésus trouve essentiel de reprendre certaines affirmations les plus fondamentales concernant la Loi mosaïque. Affirmations qui viennent aussi rejoindre la loi morale : Tu ne commettras pas de meurtre. Tu ne commettras pas d’adultère. Tu ne feras pas de faux serments (vv. 23.27.33). Cela vaut pour tout le monde. De plus, une première dans cette culture, il va montrer clairement que tout se joue à l’intérieur de la personne, c’est-à-dire dans son cœur. C’est là que se joue le combat du bien et du mal et non dans l’observance littérale des prescriptions. C’est bien connu : La lettre tue, c’est l’esprit qui fait vivre (2 Co 3,6).Que de troubles de conscience, que de scrupules ont été engendrés par cette observance minutieuse et cela depuis toujours. Une loi salutaire doit protéger les plus faibles contre ces déviances.

La loi au service de la liberté

     Comment peut-on affirmer que la loi doit être au service de la liberté de l’individu qui veut s’y conformer? Seulement si cette loi se soucie de posséder une part d’humanité et de sagesse : Une sagesse que nous proclamons devant ceux qui sont adultes dans la foi (1 Co 2, 6). L’être humain est créé pour être libre. Et les lois lui sont données pour justement aider sa liberté à choisir le bien : Il dépend de ton choix de rester fidèle, dira Ben Sirac le Sage (Si 15, 15). Tous nous savons que nous ne sommes pas tenus d’obéir à une loi qui obligerait à faire le mal. Ce qui illustre bien le sens d’une loi juste. Pour le baptisé, l’obéissance à la loi n’est que le premier mot de la liberté car c’est dans l’amour qu’elle trouve son accomplissement. C’est ainsi qu’il faut interpréter la célèbre phrase d’Augustin : Aime et fais ce que tu veux. Phrase servie à toutes les sauces et trop souvent en la déviant du sens que voulait lui donner son auteur. Parce que quand tu aimes vraiment, tu ne veux que le bien de l’autre. Que cet autre s’appelle le Jésus des évangiles ou ta femme, ou ton époux, ou ton frère, ou ta sœur : L’amour ne fait rien de mal au prochain. Donc, l’accomplissement parfait de la Loi, c’est l’amour (Romains 13, 10).

« Eh bien moi, je vous dis » (Mt 5, 22)

     En commentant trois prescriptions concernant le meurtre, l’adultère et le faux serment, Jésus en rajoute « en mettant de la chair sur les os ». Avec la fameuse exhortation : Eh bien moi, je vous dis (v. 22) Jésus ira bien au-delà de la loi. Nous constaterons vite que nous sommes à mille lieues de la stricte observance. Comment alors comprendre ces paroles? D’abord en se rappelant qu’elles sont prononcées par celui qui demande de pardonner indéfiniment, qui dit aussi que le Sabbat est fait pour l’homme et non l’homme pour le Sabbat. Commençons donc par le meurtre. Bien peu d’entre nous se sentent concernés par une telle conduite. Mais peut-on tuer autrement que par une arme? Briser les rêves, les désirs de liberté, les réputations, n’est-ce pas aussi tuer? Comment interpréter les paroles de Jésus qui condamne le simple regard sur la femme d’un autre? C’est que le regard conduit au désir et que le désir conduit souvent vers la possession du fruit défendu. Il arrive aussi que le regard fait baisser les yeux à la personne regardée. Il y a des regards infidèles. Enfin, à propos du faux serment Jésus nous met en garde contre la facilité que nous avons de jurer et de se parjurer. L’actualité nous le démontre abondamment et rendent superflus les commentaires. Que de oui sonnent faux, que de non cachentdes trahisons.

Le respect avant tout

     Un mot émerge de ces avertissements du Seigneur : Respect. Respect de la vie, de toute vie. Respect de la femme, de toute femme. Respect de la parole donnée en toute conscience. Le respect permet d’édifier un bonheur vrai ou de remettre debout les humiliés. À bien relire ce passage d’évangile on se rend bien compte que Jésus n’exagère pas, mais pas du tout. Il ne fait que donner du sens à la loi. Il lui donne ce qu’elle mérite : son vernis d’humanité. Je terminerai en situant le mot respect dans sa littéralité linguistique. Si on décortique le mot respect (re-spect) nous y découvrons le début du mot spectacle. Nous pourrions alors avancer, sans forcer le terme, que respecter veut dire : regarder à nouveau le spectacle qui s’offre à nous et y découvrir la grandeur qui s’y révèle ou qui s’y cache : la grandeur de toute vie humaine, la grandeur de toute femme, la grandeur de toute parole donnée.

Tout se passe au cœur de la personne

     Désormais, tout l’enjeu de la morale se passe au cœur de l’homme et de la femme où murmure l’Eau vive. Rien de ce qui est extérieur ne risque de le souiller ou de le purifier. La vérité et la sainteté se cachent au plus profond du puits. Là est le domaine de l’Esprit de Dieu mais aussi le repaire de l’esprit du mal. Là est le trésor des pensées de Dieu et les arcanes des pensées mauvaises. C’est le cœur qui doit être pur avant tout. En somme, accomplir la Loi pour Jésus, ce sera toujours la saisir dans sa plus profonde vérité, celle de l’amour : l’amour de Dieu et du prochain. En ces deux commandements se trouvent toute la loi nouvelle et tous les prophètes. En visant l’essentiel, Jésus libère et redonne tout son lustre à la loi. Elle devient comme un filet d’eau claire qui abreuve nos vies!

 

Ghislaine Salvail, SJSH

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2391. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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