Unité,
Amour et Paix
Le fils médiateur et le jugement : Jean
3, 16-18
Autres lectures : Exode
34, 4b-6.8-9; Psaume
: (Daniel 3) ; 2
Corinthiens 13, 11-13
Dieu a tant aimé le monde
quil a donné son Fils unique. Ce verset résume,
en fait, tout le quatrième évangile. Dans la langue
originale, tant est mis en relief et a donné correspond à
« a livré ». Lexpression le monde, comporte
une nuance péjorative qui ajoute à lamour une
dimension héroïque.
Dieu aime
et se donne
Dans son amour, Dieu ne se contente pas de donner un
cadeau immense au monde, il se donne lui-même tout entier
en son Fils. Et la réponse à cet amour na quune
alternative : ou lon se sauve ou lon périt. Pourquoi
ce radicalisme ? Cest que, être chrétien, cest
justement croire que Dieu aime le monde en communiant à lui,
en lui pardonnant : Tu pardonneras nos fautes et nos péchés
et tu feras de nous un peuple qui tappartienne (Exode
34, 9). Dieu na pas envoyé son Fils dans notre monde
pour le condamner, ni pour le juger, mais pour que, par lui,
le monde soit sauvé (Jn 3, 17). La condamnation
ne trouve aucune place dans une théologie de lamour.
Sil y a condamnation, elle vient de lêtre humain.
Elle origine de son choix face à loffre du don divin.
Dieu
aime et sauve
Si nous reprenons lexpression « Dieu sauve
le monde » en son Fils, daucuns y verront limage
dun Dieu colérique qui punit ceux et celles qui lui
ont désobéi mais qui reporte son agressivité
sur son Fils Jésus. Grâce à Jésus, on
se sauve de Dieu. Vieille image, vieux cliché qui nont
plus cours me direz-vous? Attention, limaginaire collectif
a de profondes racines et est plein de souterrains qui gardent prisonniers
beaucoup de monstres.
Pourtant, ce nest pas de sa punition que Dieu
nous a sauvés, cest de notre tentative de nous détruire.
Pour employer une comparaison dun Père de lÉglise,
disons que nous ressemblions un peu à ces suicidaires enjambant
la rambarde dun pont pour sauter vers labîme.
Dieu a plongé pour nous sauver in extremis et nous
a redonné la vie.
Dieu
aime et nous donne son Verbe
Dieu voulait entrer en communication avec nous. Pour
ce faire, il nous a envoyé son Verbe. Dieu sest
fait chair (Jn 1, 14). Comme son message était
un message damour, il nous a offert ce quil avait de
plus précieux : le fruit de son amour. Dieu en sincarnant
est entré dans notre histoire. Il a emprunté nos livrées.
Par ce don inouï, non seulement il nous a arrachés au
suicide, mais il nous a fait don de sa vie à jamais.
Nous voyons hélas, trop souvent, la Sainte Trinité
comme un mystère impossible à percer, étranger
à notre intelligence humaine. Pour ma part, jaime bien
cette définition du mystère : « Le mystère,
cest la révélation progressive des secrets de
Dieu à lêtre humain ». Quel plus beau secret
que celui qui révèle à lautre quil
est lobjet de son amour!
Le Dieu
éternellement trinitaire
La Trinité, cest-à-dire le mystère
des trois personnes divines, existait avant même que le monde
fût créé. La grâce du Seigneur Jésus
Christ, lamour de Dieu le Père et la communion de lEsprit
Saint (2 Corinthiens 13, 13) étaient et sont toujours
avec nous, comme le dit lapôtre Paul aux gens de Corinthe.
Si cette bienveillance des Trois subsiste au-dessus de lunivers
créé, il nous faut cependant la considérer
comme en « avant » de nous, comme si nous étions
en marche vers la découverte de ce mystère. Par le
péché nous avons brisé notre relation avec
Dieu, mais avec le Christ, nous sommes en mesure de recoller cette
brisure afin datteindre lunité dans lEsprit,
de reconquérir lamour et retrouver la paix. Unité,
Amour et Paix sont pour ainsi dire les autres noms des personnes
trinitaires.
Le mystère
du don de soi
Reprenons cet aspect du mystère du don de soi
qui se concrétise dans la mort de Jésus sur la croix.
Cette mort salvatrice senracine dans une longue histoire damour
de Dieu pour son peuple. Pour Dieu, créer cest aimer.
Et cest dans cet océan damour quest plongé
le don de Dieu. Cette vérité fondamentale se lit à
toutes les lignes des Écritures, de la Genèse
à lApocalypse. Cest bien ce que veut exprimer
le passage du livre de lExode où Dieu se révèle
à Moïse sur le mont Sinaï, comme étant un
Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère,
plein damour et de fidélité (Ex 34,
6). Un Dieu qui sapproche (v.
5) et aussi un Dieu qui suscite ladoration (v.
8).
Un mystère
difficile à vivre
Ce mystère damour divin jusquà
la démesure, nous ne pouvons lintégrer à
notre vie par nos seules forces. La quête de lunité,
de lamour et de la paix sera toujours au-dessus de nos forces,
de nos pauvres forces dêtres limités. Un seul
regard sur notre monde déchiré par les guerres fratricides
autant que par les déchirures familiales suffit à
nous en convaincre. Mais cest pourtant là notre vocation
: unir, aimer, faire la paix ici-bas sur terre.
Pour y arriver, sans que la perfection soit atteinte,
il nous faut nous laisser saisir par un Autre plus grand que nous
: lEsprit de sainteté que Paul appelle lEsprit
de communion (2
Co 13, 13).
L'amour
de communion se reçoit
Lamour de communion est un amour qui se donne
mais surtout un amour qui se reçoit. Cest ce mystère,
cest ce secret qui se déploie, qui se révèle
peu à peu, tout au long de cette histoire du salut qui est,
en fait, notre propre histoire humaine.
Cest pour cette raison que lÉglise
ne cesse de nous inviter à scruter la Parole de Dieu, à
relire les saintes Écritures pour y entendre battre le cur
de Dieu. Cest le lieu par excellence pour apprendre à
aimer comme Lui. Cette conviction ne doit jamais cesser de sapprofondir
au cur même de notre vie de foi : nous sommes au service
de ce monde pour refaire léquilibre rompu par le mal
et le péché. Chaque communauté, chaque famille
sont appelées à devenir un espace de communion où
lamour senseigne comme les bonnes manières, comme
sapprennent les rudiments de la vie en commun. Aimer comme
Dieu aime, cest possible mais toujours à la mesure
de notre cur.
Une liberté
à saisir
Si nous réalisons le rêve de Dieu, si
nous aimons comme il nous le commande, cela ne risque-t-il pas denlever
à notre existence sa véritable consistance ? Notre
liberté ne serait alors que factice, ne serait quun
vain mot ? Notre vie ne serait donc quun jeu, quune
comédie ou quun drame écrit par le grand Dramaturge
qui en détermine lissue? Pour saisir ce que Jésus
nous dit dans lévangile, nous sommes contraints dabandonner
nos raisonnements à courte vue pour nous situer dans la logique
de lamour. Cest là, justement, où Jésus
nous demande dancrer notre existence quand il affirme «
quil a tant aimé le monde ». Lamour ne
simpose pas. Il sexpose toujours à un refus.
Cest là sa grandeur et sa fragilité!
Source: Le Feuillet biblique,
no 2144. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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biblique de Montréal.
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