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Dimanche des Rameaux A - 16 mars 2008

 

 

Le chemin du Christ

L'entrée triomphale à Jérusalem : Matthieu 21, 1-11
Autres lectures : Isaïe 50, 4-7; Psaume 21(22); Philippiens 2, 6-11

Quand Matthieu raconte l’entrée de Jésus à Jérusalem, il précise que cela s’est passé pour accomplir la promesse transmise par le prophète : Dites à la fille de Sion : Voici ton roi qui vient vers toi, humble, monté sur une ânesse et un petit âne, le petit d’une bête de somme (21, 5, citant Isaïe 62, 11 ; Zacharie 9, 9). Pourtant, quand Jésus entra dans la ville, on se demandait : Qui est cet homme ? Et les foules répondaient : C’est le prophète Jésus (Mt 21, 10-11).


  Tout cela reflète bien le contexte dans lequel nous lisons cette année la Passion selon saint Matthieu. En effet, pour nous qui avons la foi, la Semaine sainte et la fête de Pâques seront l’occasion de laisser à nouveau entrer chez nous le roi de douceur et de paix. Mais pour ceux qui ne croient pas et qui parfois même s’opposent à toute manifestation religieuse dans le domaine public, Jésus n’est rien de plus qu’un grand homme, un prophète comme tant d’autres. De Nazareth! Peut-il sortir de là quelque chose de bon ? (Jn 1, 46).

À la suite du Christ

  À nous qui voyons en lui le messie promis, Jésus redit aujourd’hui : Mon temps est proche; c’est chez toi que je veux célébrer la Pâque (Mt 26, 18). Pour cela, il importe de suivre Jésus jusqu’à la croix. Notre présence à l’église à tous les dimanches et les efforts que nous faisons pour ajuster nos vies à l’Évangile témoignent déjà de notre volonté de suivre le Christ jusqu’au bout. Comme Pierre, nous sommes prêts à déclarer : Si tous viennent à tomber à cause de toi, moi, je ne tomberai jamais (26, 33). Même si je dois mourir avec toi, je ne te renierai pas (26, 35). Pourtant, quand la croix se dresse à l’horizon, nos beaux discours ne tiennent pas toujours la route. Heureusement, au moment d’offrir sa vie, Jésus précise que son sang est répandu en rémission des péchés (26, 28). Et il promet : Je boirai un vin nouveau avec vous dans le Royaume de mon Père (26, 29).

Se fortifier par la prière

  En gravissant la route du calvaire, Jésus nous montre le chemin. Il nous invite d’abord à trouver comme lui la force d’aller jusqu’au bout dans la prière : Demeurez ici et veillez avec moi (26, 38). Aurons-nous la force de veiller avec lui? Ou bien tomberons-nous endormis comme Pierre, Jacques et Jean? Dans sa prière, Jésus demande : s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi! (26, 39). Et, comme il nous l’a enseigné dans le Notre Père, il s’empresse d’ajouter : Cependant, non pas comme je veux, mais comme tu veux (26, 39), que ta volonté soit faite! (26, 42). Que le Seigneur nous éveille à la vraie prière. Malgré tout ce qui nous engourdit et nous rend lourds de sommeil, qu’il continue de nous offrir son amitié, lui qui a répondu au baiser de Judas en l’appelant mon ami… (26, 50).

  En contemplant la prière de Jésus, nous nous étonnons de ce que Dieu le Père ne semble pas lui répondre. À cause du silence de Dieu, nous sommes parfois tentés, comme l’un des disciples d’alors, de prendre les choses en main. À celui qui a dégainé son épée et tranché l’oreille du serviteur du grand prêtre, Jésus déclare que tous ceux qui prennent l’épée périront par l’épée (26, 52). Dieu aurait pu choisir d’envoyer plus de douze légions (26, 53), soixante-douze mille anges pour éviter la croix à son Fils! Mais alors, comment s’accompliraient les Écritures? (26, 54) Dit autrement, Dieu aurait pu révéler sa puissance à la manière des hommes, mais alors, nous n’aurions pas su jusqu’où peut aller l’amour, la véritable puissance de Dieu!

La montée invincible de l'amour

  Dans le reste du récit de la Passion, Jésus nous montre jusqu’où va l’amour. Avant même le procès devant le Sanhédrin, son sort est déjà décidé : On cherche un faux témoignage contre Jésus pour le faire condamner à mort (26, 5.9). Heureux serez-vous […] si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous (5, 11)! Voilà pourquoi Jésus ne se révolte pas. Il se contente de dire la vérité sur ce qu’il est : Le Fils de l’homme siégeant à la droite du Tout-Puissant (26, 64). Au même moment, Pierre, qui était assis dehors dans la cour (26, 68) renie son maître : Je jure que je ne connais pas cet homme (26, 72). Le chant du coq lui rafraîchira la mémoire et provoquera les larmes qui marqueront le début de sa conversion. Chez Judas, la condamnation de Jésus aura un effet contraire. Pris de remords, il rapporte le salaire de sa trahison et va se pendre. Pierre et Judas avaient tous deux trahi leur maître. Tous deux avaient péché. Le premier a cru en la miséricorde de Dieu et, pardonné, il est devenu l’apôtre sur lequel Jésus a bâti son Église (voir 16, 18). L’autre n’a pas cru en la miséricorde et a choisi la mort!

  Devant Pilate, les chefs des prêtres et les anciens du peuple ne changent pas de stratégie : Ils tinrent conseil contre Jésus pour le faire condamner à mort (27, 1). Cette fois, Jésus choisit le silence. Pilate cherche à intervenir en sa faveur. Sa femme l’avertit : Ne te mêle pas de l’affaire de ce juste (27, 19). Finalement Pilate s’en lave les mains et déclare : Je ne suis pas responsable du sang de cet homme (27, 24). Et le peuple de répondre : Son sang, qu’il soit sur nous et sur nos enfants! (27, 25). Cette répartie qu’on ne trouve que chez Matthieu risque d’être mal interprétée. « Ce n’est pas une automalédiction du peuple juif ; c’est une formule légale prenant la responsabilité d’un homme jugé criminel. Matthieu sait ce que le peuple ignore : Jésus est innocent ; et selon lui la responsabilité (et la punition) de la mort de ce juste est retombé plus tard sur tout le peuple quand les Romains ont détruit Jérusalem et le Temple »1.

La création d'un monde nouveau

  La suite de la Passion selon Matthieu ressemble beaucoup à ce que nous retrouvons chez Marc, Luc et Jean : chemin de croix; crucifiement; moquerie des passants, des grands prêtres, des scribes, des anciens et même des bandits crucifiés avec lui ; mort de Jésus. Mais une fois que Jésus a rendu l’esprit, Matthieu est le seul à préciser : La terre trembla et les rochers se fendirent. Les tombeaux s’ouvrirent; les corps de nombreux saints qui étaient morts ressuscitèrent, et, sortant des tombeaux après la résurrection de Jésus, ils entrèrent dans la ville sainte, et se montrèrent à un grand nombre de gens (Mt 27, 51-52). Ces événements rappellent la réponse de Jésus au questionnement de Jean Baptiste un peu plus tôt dans l’Évangile de Matthieu : Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre? Jésus leur répondit : Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et voyez : Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres. Heureux celui qui ne tombera pas à cause de moi ! (11, 3-6). Pas étonnant donc que, à la vue du tremblement de terre et de tous ces événements, le centurion et ceux qui gardaient Jésus furent saisis d’une grande frayeur et dirent : Vraiment, celui-ci était le Fils de Dieu ! (27, 54).

  En suivant Jésus dans sa Passion, puissions-nous reconnaître en lui notre roi, le Fils de Dieu, qui rend présent dans notre quotidien le Royaume des cieux.

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1 R.E. Brown, Que sait-on du Nouveau Testament ?, Paris, Bayard, 2000, p. 243.

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2135. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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