Crois-tu
cela?
Mort de Lazare et retour de Jésus en Judée
: Jean
11, 1-45
Autres lectures : Isaïe
58, 7-10;
Psaume
111(112); 1
Corinthiens 2, 1-5
Cette question de Jésus
est au cur du récit appelé « la résurrection
de Lazare » mais qui pourrait aussi bien être connu
comme « la profession de foi de Marthe ». La suite des
événements paraît dépendre de sa réponse
: Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu (v. 40). Jésus,
certes, pouvait rappeler Lazare à la vie sans condition préalable
mais cet événement ne pouvait prendre valeur de «
signe » quaux yeux de la foi. Cest seulement ainsi
quon peut comprendre que la maladie de Lazare ne conduit pas
à la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que, par
elle, le Fils de Dieu soit glorifié (v.
4).
Lazare
s'est endormi (v. 11)
Lévangéliste semble avoir voulu
éliminer tout doute possible au sujet de la mort de Lazare.
La fille de Jaïre venait tout juste dexpirer (cf. Mc
5, 35); le jeune homme de Naïm navait pas encore
été enterré (cf. Lc
7, 11-17). Dans lun et lautre cas les sceptiques
pouvaient prétendre que la mort nétait quapparente.
Selon la croyance populaire, entérinée par les rabbins,
lâme des défunts ne séloignait définitivement
du corps que le quatrième jour, lorsque la corruption commençait
à se manifester. Le récit de Jean met en relief le
fait que Lazare est bel et bien mort (cf. vv. 7.
39); lintervention de Jésus nen sera que
plus éclatante et le signe plus indiscutable.
Après une présentation un peu embarrassée
des principaux personnages (vv.
1-2), on lit une longue introduction (vv.
3-16) qui occupe le tiers du récit total. Sy entremêlent
plusieurs thèmes parallèles : lumière/ténèbres,
jour/nuit, réveil/sommeil, vie/mort. En plus de faire le
lien avec le signe précédent, la guérison de
laveugle-né (ch.
9), ce développement permet dentrevoir comment
la maladie de Lazare peut être pour la gloire de Dieu
(v.
4). En ramenant Lazare de la mort à la vie, Jésus
va illustrer la parole quil avait dite après la multiplication
des pains : Le pain de Dieu, cest celui qui descend du
ciel et donne la vie au monde
Je suis le pain de la vie
(Jn 6, 33.35). Jésus va ainsi manifester sa gloire
(v. 4) de sorte que ses disciples puissent croire (cf. v.
15; voir aussi Jn
2,11) ainsi que les nombreux Juifs qui étaient venus
entourer Marie (v.
45). Par ailleurs le signe accompli par Jésus sera la
cause immédiate de la décision de le faire mourir
(Jn
11, 45-54). Ainsi la maladie de Lazare conduit Jésus
à la mort mais cette mort est la véritable porte dentrée
dans la gloire (cf. Jn
3,14; 12,
23.32 etc.).
Cette introduction ne sert donc pas seulement à
donner à Lazare le temps de mourir mais encore à expliquer
davance le sens de lévénement en faisant
appel à des images et des symboles.
Ton
frère ressuscitera (v. 23)
Dans la section suivante, le dialogue de Jésus
et de Marthe (vv.
17-27), lévangéliste reprend la même
question, cette fois-ci en termes beaucoup plus explicites. Au centre
de cet échange se trouve la déclaration de Jésus
citée en exergue. Laffirmation solennelle de la résurrection
correspond à la croyance des Pharisiens, et Marthe la partage
: Je sais quil ressuscitera au dernier jour, à la
résurrection (v. 24). La nouveauté réside
dans le lien que Jésus établit entre sa propre personne
et la résurrection : Moi, je suis la résurrection
et la vie (v.
25). Jésus avait déjà affirmé que
le Père lui avait transmis le pouvoir de ressusciter les
morts : Comme le Père, en effet, ressuscite les morts
et leur donne la vie, ainsi le Fils donne la vie à qui il
veut (Jn 5,21 avec un vocabulaire différent de
celui du chapitre
11). Il ajoute maintenant que la foi en lui est une garantie
de résurrection : Celui qui croit en moi, même sil
meurt, vivra (v. 25).
Jésus demande à Marthe : Crois-tu
cela? (v. 26), cest-à-dire : « crois-tu que
je suis la source de la résurrection et que je partage avec
le Père le pouvoir de donner la vie? » Dans sa réponse
Marthe semble un peu dépassée par ces affirmations
théologiques très profondes; par contre, elle croit
en Jésus, elle est sûre de lui, de sa mission, de sa
parole; elle est prête à lui faire entièrement
confiance : Oui Seigneur, tu es le messie, je le crois, tu es
le Fils de Dieu, celui qui vient dans le monde (v. 27). À
défaut dune profession de foi de Lazare qui est bien
incapable de la faire, cest la foi de sa sur qui va
maintenant forcer les portes de la mort.
Voyez
comme il l'aimait (v. 36)
La section suivante (vv.
28-37) permet à lauteur de faire entrer en scène
les personnages qui seront témoins du retour de Lazare à
la vie. Les disciples sont disparus depuis le v.
16; à leur pla-ce on trouve, en plus de Marthe, sa sur
Marie (vv.
28-29) et des Juifs venus de Jérusalem (v.
31; déjà mentionnés au v.
19, ils ne jouent aucun rôle dans laction à
ce moment-là).
La séquence est centrée sur lémotion
de Jésus (vv.
33.35), émotion quil partage avec Marie, la sur
du défunt et avec les Juifs venus la consoler (v.33).
Cette scène est surprenante car Jésus, surtout dans
le quatrième évangile, paraît le plus souvent
hiératique et détaché par rapport aux contingences
de la vie quotidienne (voir, par exemple, Jn
4, 32; en sens contraire, voir Jn
12, 27). Lévangéliste laisse paraître
ici plus pleinement lhumanité de Jésus. En même
temps, il ne faut pas oublier que lamitié de Jésus
nest pas un simple attachement sentimental, elle a une valeur
théologique (cf. Jn
15, 14-15). Être ami de Jésus signifie entrer dans
son intimité, partager ses secrets, non seulement sur le
plan humain mais aussi dans sa mission et dans sa relation avec
le Père. Lazare, Marthe et Marie sont identifiés comme
faisant partie de la communauté des amis (cf.
v. 5).
Lazare,
ici ! Dehors ! (v. 43)
Lhistoire atteint son sommet avec le commandement
de Jésus exprimé en trois mots, un vocatif et deux
adverbes. Avant darriver à cet aboutissement lauteur
a ménagé encore deux courtes séquences : larrivée
au tombeau et son ouverture (vv.
38-40) et la prière de Jésus (vv.
41-42). La première section souligne, une fois de plus,
la réalité incontestable de la mort de Lazare (v.
39). La prière de Jésus est une action de grâce.
Il parle comme si le miracle avait déjà eu lieu, certain
de la réponse du Père. Il reprend ainsi une pratique
familière dans les Psaumes où laction de grâce
est jointe à la supplication (voir, par exemple Ps
22(21), 23-32). En même temps, Jésus donne le sens
de tout lévénement : afin quils croient
que tu mas envoyé (v.
42). Cest aussi le sens de tout lévangile
: Ces signes ont été mis (par écrit) afin
que vous croyez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu.
Et que, par votre foi, vous ayez la vie en son nom (Jn
20,31).
Après cette longue préparation, le retour
à la vie de Lazare est mentionné en quelques mots.
Lévangéliste tient quand même à
souligner la différence entre cette réanimation et
la résurrection de Jésus. Lazare sort du tombeau encore
lié par les accessoires funéraires (v.
44). Son retour à la vie ne le fait pas échapper
définitivement au pouvoir de la mort alors que Jésus
laissera derrière lui les articles qui avaient servi à
son ensevelissement (Jn
20,6-7).
La conclusion souligne que le résultat recherché
a été atteint : De nombreux Juifs crurent en lui
(v. 45).
Source: Le Feuillet biblique,
no 2134. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre
biblique de Montréal.
Chronique
précédente :
Je suis la Lumière du monde
|