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3e dimanche de l'Avent A - 16 décembre 2007

 

Ne pas se tromper de messie!

Question de Jean et réponse de Jésus : Matthieu 11, 2-11
Autres lectures : Isaïe 35, 1-6a.10; Psaume 145(146); Jacques 5, 7-10

Au premier siècle de notre ère, le Proche Orient est déjà une zone de tensions. Alors qu’ailleurs dans l’Empire romain Auguste fait régner la Pax romana et qu’une relative stabilité s’installe après les troubles presque continus du siècle précédent, la région de Judée demeure un sujet de préoccupations pour les autorités romaines. Des soi-disant prophètes ou messies surgissent périodiquement (cf. Actes 5, 36-37); souvent, ils confondent le Royaume de Dieu et le royaume terrestre d’Israël, même les disciples de Jésus se sont parfois laissés prendre par cette perspective nationaliste (cf. Ac 1, 6). L’histoire connaît plusieurs tentatives de soulèvements avant l’explosion finale qui débouchera sur la grande guerre des années 66–73. C’est pourquoi Jésus constate : Depuis les jours de Jean le Baptiste jusqu’à présent le Royaume des cieux souffre violence et des violents s’en emparent (Matthieu 11, 12). On comprend facilement la perplexité de Jean et le message qu’il fait porter à Jésus : Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre? (v. 3).


Le point de vue de Jean

  L’évangile de dimanche dernier (Mt 3, 1-12) fournit l’essentiel de ce que nous pouvons savoir au sujet de Jean Baptiste. Il apparaît comme un prophète solitaire qui reprend à son compte les thèmes principaux de ses devanciers : le jugement de Dieu, l’arrivée imminente du Jour où Dieu purifiera son peuple de manière définitive et inaugurera son Règne. À sa prédication il ajoute un rite de purification, le baptême, en quoi il se rapproche d’autres mouvements spirituels de son temps. Même s’il n’avait probablement aucune ambition personnelle, son langage ne pouvait pas ne pas avoir d’incidences politiques, c’est pourquoi il suscita l’inquiétude des dirigeants officiels du monde juif (cf. Jean 1, 19-23) et de Hérode Antipas qui finit par le faire arrêter (cf. v. 2 et Mt 14, 3).

  Selon l’Évangile de Matthieu – et celui de Marc – Jean et Jésus se sont rencontrés une seule fois, lors du baptême de Jésus (Mt 3, 13-17). Il est clair que la tonalité donnée par Jésus à son ministère contrastait avec la prédication de Jean. Jésus annonçait lui aussi la venue du Règne de Dieu mais comme une bonne nouvelle, source de joie, de paix, de guérison. On peut, dès lors, comprendre l’étonnement de Jean et son désir d’en savoir plus au sujet de Jésus.

La bonne nouvelle est annoncée... (v. 5)

  L’annonce de la Bonne Nouvelle aux pauvres constitue le cœur de la mission du mystérieux personnage qui prend la parole en Isaïe 61, 1. Luc a repris ce thème dans le discours programme de Jésus à la synagogue de Nazareth (Lc 4, 18-19). Dans sa réponse aux envoyés de Jean, Jésus en fait la note caractéristique de son ministère (cf. Lc 7, 22).

  Les autres activités de Jésus : les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent (v. 5) sont les signes visibles de cette Bonne Nouvelle non seulement annoncée mais déjà mise en œuvre. En reprenant à son compte la prophétie de Isaïe 35, 5-6 et en l’amplifiant (voir la première lecture), Jésus montre aux envoyés de Jean que les temps nouveaux sont déjà commencés même si leur accomplissement n’est pas encore pleinement réalisé.

  Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et voyez (v. 4) : c’est le propre du témoin de rapporter ce qu’il a vu et entendu. Les disciples du Baptiste sont donc institués témoins de la Bonne Nouvelle de Jésus; ils deviennent missionnaires auprès de leur maître. Selon la tradition chrétienne, Jean a été satisfait de la réponse de Jésus. En fait, l’évangile n’en dit rien. La béatitude du v. 6 : Heureux celui qui ne tombera pas à cause de moi ressemble fort à un appel lancé par Jésus à Jean, l’invitant à ne pas se laisser décourager même si le Royaume advient par des chemins autres que ceux qu’il avait annoncés.

Qui êtes-vous allé voir? (v. 7)

  Si Jean avait accepté de se taire ou s’il avait mis son influence au service des desseins politiques de Hérode Antipas, il aurait sûrement pu sauver sa vie. Mais alors il aurait été un roseau agité par le vent (v. 7) qui plie devant l’adversité et se laisse conduire par son seul intérêt. Il aurait peut-être pu se ménager une place à la cour et vivre dans les palais des rois (v. 8) mais ceux qui étaient venus l’écouter au désert et qui avaient été séduits par son message austère auraient eu toutes les raisons de se sentir trahis. Les deux questions rhétoriques posées par Jésus, aux versets 7 et 8, commandent évidemment une réponse négative. Cette entrée en matière souligne déjà, par contraste, comment Jean a pu, malgré tous les obstacles, garder son indépendance et affirmer ses convictions.

  L’attente du prophète semblable à Moïse, annoncé en Deutéronome 18, 15-19, était toujours vive en certains milieux, en particulier chez les Samaritains. D’autres espéraient plutôt le retour d’Élie, sur la base d’un passage du livre de Malachie : Voici que je vais vous envoyer Élie, le prophète, avant que n’arrive le jour de Yahvé, grand et redoutable (Malachie 3,23). En qualifiant Jean de plus qu’un prophète (v. 9), Jésus le situe dans la catégorie de ces grandes figures emblématiques de l’histoire d’Israël. Il reconnaît en lui le messager (cf. v. 10) chargé de préparer l’étape décisive de l’histoire du salut.

  L’éloge de Jean paraît inconditionnel : Parmi les enfants des femmes il ne s’en est pas levé de plus grand que Jean le Baptiste (v. 11a, traduction personnelle); pourtant, tout de suite après, intervient une nouvelle proposition qui semble contredire ce qui précède : le plus petit dans le Royaume des cieux est plus grand que lui (v. 11b). Depuis longtemps les commentateurs se questionnent sur le sens à donner à cette phrase. S’agit-il d’un « correctif » apporté à une déclaration qui laissait croire que Jésus lui-même reconnaissait la supériorité de Jean? N’est-ce pas plutôt une affirmation de la nouveauté absolue apportée par Jésus? Jean occupe une place suréminente dans l’ancienne Alliance mais il doit céder le pas devant ce qui est maintenant advenu avec Jésus : le Royaume des cieux qui commence à se réaliser. L’histoire est entrée dans une phase nouvelle, inédite et, désormais, rien ne sera plus comme avant. En somme, l’éloge de Jean débouche sur une affirmation de la supériorité de Jésus et de l’Alliance nouvelle. Oui, Jésus est bien celui qui doit venir; inutile d’en attendre un autre!

Ayez de la patience (Jacques 5, 7-10)

  Dans les quatre versets retenus par la liturgie, on trouve trois fois le verbe patienter et une fois le nom patience. On trouve aussi deux fois l’expression la venue du Seigneur. Jacques affirme que cette venue est toute proche (v. 8) mais il n’en précise évidemment pas la date. Pour lui, le plus important réside dans l’attitude intérieure des fidèles. La patience dont il est question ne consiste pas à attendre les bras croisés mais à travailler, tout comme le cultivateur qui doit s’activer durant toute la saison même si ses efforts ne peuvent faire venir plus vite le temps de la moisson.

Qu’il exulte et crie de joie (Isaïe 35, 1-6a.10)

  Traditionnellement ce dimanche est appelé dimanche de la joie. Joie de la fête de Noël toute proche mais surtout joie du salut déjà en voie de se réaliser depuis la venue de Jésus dans notre histoire. Le prophète annonçait aux exilés à Babylone un avenir merveilleux dans un univers entièrement transformé par la présence du Seigneur. Cette intervention divine devait s’accompagner d’un jugement contre les ennemis d’Israël (v. 4). On peut dire que Jean le Baptiste, dans sa prédication, avait retenu surtout cet aspect alors que Jésus met plutôt de l’avant le renouvellement de toute la création par l’amour de Dieu, ce dont il donne des signes concrets par ses miracles (cf. vv. 5-6).

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2122. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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