Un moment crucial
Jésus en croix est insulté : Luc
23, 35-43
Autres lectures : 2
Samuel 5, 1-3;
Psaume
121(122); Colossiens
1, 12-20
La question du « mauvais » larron crucifié
à côté de Jésus est celle de bien dentre
nous, confrontés à limpuissance. La vie nous
met assez souvent dans des situations apparemment sans issue, qui
ébranlent notre foi. Nous sommes alors tentés de désespérer
de Dieu et nous lançons un cri du cur qui dit tout
notre mal : Nes-tu pas le Messie? Sauve-toi toi-même,
et nous avec! (Luc 23,39). Non, dans le quotidien de nos existences,
rien nest moins clair que la royauté triomphante du
Christ. Cest plutôt la croix qui se dresse devant nous.
Échec et dérision!
Le récit de la crucifixion nous rappelle que
Jésus lui-même a été confronté
au cul-de-sac de léchec et de la mort. Quoi quon
en dise dun point de vue spirituel, la croix signale larrêt
définitif de la mission terrestre de Jésus, un arrêt
empreint damertume et soumis à la dérision.
Déshabillé devant la foule, Jésus
agonise dune mort atroce et humiliante. Un écriteau
romain placé au-dessus de sa tête se moque de lui et
de son peuple : Celui-ci est le roi des Juifs (Luc
23,38). Regardez ce quon en fait de cet aspirant à
la royauté, semble indiquer avec sarcasme linscription.
Les soldats aussi se moquent de leur victime, soulignant son impuissance
: Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même! (Luc
23,37).
Les chefs juifs responsables de sa condamnation ricanent
devant lui : Il en a sauvé dautres : quil
se sauve lui-même, sil est le Messie de Dieu, lÉlu!
Lagonie impuissante de Jésus paraît donner raison
à leur incrédulité. Dieu naurait pas
laissé mourir comme ça son Élu. Celui-ci ne
peut être quun faux. Cest maintenant évident
pour tout le monde.
Léchec de Jésus est exposé
au regard de tous. Le peuple reste là à le regarder
mourir (Luc
23, 35). Les curieux et les voyeurs satisfont leurs passions
morbides. Accablé par la douleur et lépuisement,
Jésus ne peut tout simplement pas mourir en paix, seul devant
Dieu.
Vient alors le coup inattendu : un autre condamné
sen prend à lui! Broyé par la colère,
écumant de rage impuissante, il jette son dévolu sur
celui qui a failli à son rôle de Sauveur. Nes-tu
pas le Messie? Sauve-toi toi-même, et nous avec! (Luc
23, 39). Change, si tu peux, la fin de cette horrible histoire!
La révélation du Règne
Jésus ne dit rien, subissant la haine des uns
et des autres. Lamour ne simpose pas. Le « bon
» larron lui donnera enfin loccasion de se révéler
comme le Roi de lUnivers. Jésus, souviens-toi de
moi quand tu viendras inaugurer ton Règne, supplie-t-il
(Luc 23,42). Le « bon » larron est lucide. Il
sait que Jésus ne peut rien faire pour le détacher
de sa croix, cloué quil est à la sienne. Cela
ne lempêche pas de croire en la royauté de Jésus.
Seulement, le « bon » larron voit cette royauté
comme un événement à venir. Selon lui, la croix
nest pas le dernier mot de Dieu. Jésus sera justifié,
sa bonté sera reconnue. Ce sera un grand jour, le début
dun Règne nouveau : le Règne du Messie, lÉlu
de Dieu. Même la mort de Jésus ne saura arrêter
ce projet de Dieu!
La réponse de Jésus est encore plus surprenante.
Inutile dattendre au dernier jour pour voir la victoire de
Dieu. Aujourdhui, avec moi, tu seras dans le Paradis
(Luc 23,43). La vie resurgit ailleurs, là où
les Romains, les prêtres juifs ou la foule macabre nont
plus demprise. Jésus règne déjà
sur ce jardin de délices auquel nous aspirons tous.
Comprendre que Jésus est Roi précisément
parce quil assume sa Croix, cela nous aide à voir dans
nos misères quotidiennes autant de portes grand ouvertes
pour rejoindre Dieu, dès à présent, dans son
jardin. Les limites de notre monde nempêchent pas Dieu
de nous envahir de son amour. Le Christ en Croix, Roi de lUnivers,
nous la ainsi révélé.
La royauté de David
2 Samuel 5, 1-3
Ils donnèrent lonction à David (2
Samuel 5, 3).
La royauté en Israël était conférée
par une onction dhuile pure sur la tête de lhomme
désigné par Dieu. Le roi était lÉlu
du Seigneur, son lieutenant sur terre, chargé de veiller
sur les brebis de Dieu comme un Pasteur. Le roi dIsraël
devait être le défenseur des pauvres, des veuves et
des orphelins. On y reconnaît les priorités du Nazaréen.
Pas étonnant alors que Jésus ait été
acclamé par ses disciples comme le roi dIsraël,
même si les prêtres de son temps ne lont jamais
oint. Messie en hébreu et Christ en grec veulent dire «
Oint » en français. Ainsi, « Jésus Christ
» est une confession de foi, une sorte de slogan des sympathisants
: « À Jésus, lonction! ».
Lonction de Jésus est reprise sur le front
de tous les baptisés, faisant de nous tous et toutes des
rois et des reines à sa suite. « Chrétiens »
veut dire « Oints ». Nous sommes consacrés comme
Jésus à nous occuper des plus mal pris de notre monde.
Cest notre mission. On lappelle communément aussi
« Pastorale », car nous sommes les bergers et les bergères
que Dieu envoie aux brebis souffrantes de notre temps. Quelles ressources
notre communauté chrétienne consacre-t-elle à
la « Pastorale »?
Le Royaume de lumière
Colossiens 1, 12-20
Il nous a arrachés au pouvoir des ténèbres,
il nous a fait entrer dans le royaume de son Fils bien-aimé
(Colossiens 1,13).
Ce bel hommage fait au Christ par lauteur de
lÉpître aux Colossiens nous rappelle que
nous ne sommes pas prisonniers dun monde insensé. Les
ténèbres semblent régner autour de nous, tant
la violence se déchaîne, provoquant des injustices
et de la souffrance. Or, même ici-bas, lamour sait percer
cette toile dégoïsme qui étouffe notre
monde. Lorsque nous reconnaissons Jésus comme notre seul
et unique Roi, nous vivons ici-même à contre-courant
des ténèbres, nous laissant guider par son Esprit
de générosité, de justice et de paix. Nous
ouvrons alors une porte sur le Royaume et nous faisons aussi à
ce Royaume une petite place sur notre planète. La terre et
les cieux ont été réconciliés par le
Christ Roi, offrant son sang sur la Croix. Depuis cet événement
aux répercussions cosmiques, tout subsiste en lui (Colossiens
1,17). En dépit des ténèbres qui passent,
le Royaume de lumière brille déjà.
Source: Le Feuillet biblique,
no 2119. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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