Une vie
Les préparatifs du repas pascal
Marc
14, 12-16.22-26
Autres lectures : Exode
24, 3-8; Psaume
115 (116); Hébreux
9, 11-15
Nous célébrons aujourd'hui le mystère du
salut chrétien, mystère concentré dans le don
tout entier que Jésus fait de sa vie.
Vie et survie
Notre
vie est palpable dans la chaleur de notre corps, dans la régularité
de notre souffle, dans la constance de notre pouls. Notre vie est
assurée par le précieux sang qui circule dans nos
veines, sang qu'il nous faut nourrir, oxygéner et purifier.
Nous sommes des êtres de chair et notre vie, toute fragile,
dépend de notre sécurité physique.
Comme chez tous les êtres vivants
de ce monde, beaucoup de nos énergies sont dépensées
à assurer notre survie et celle de notre progéniture,
en réponse à la bénédiction divine :
Soyez féconds, multipliez-vous (Genèse
1,22.28). Dieu aime la vie et Il souhaite la propager. Notre instinct
de survie a été voulu et béni par notre Créateur.
Cependant, le mal a aussi fait irruption
dans notre monde. Une vie entre en compétition contre une
autre et cela devient parfois une course sauvage visant à
détruire l'autre pour s'assurer soi-même un lendemain.
L'égoïsme des forts anéantit l'espérance
des plus faibles et la loi de la compétition l'emporte sur
la grâce de la coopération. Avec la profusion de la
violence et la logique aveugle du «rien- que-pour-soi»,
la vie court le risque de se saborder elle-même sur notre
petite planète.
Une vie partagée par amour
C'est sur ce fond de scène
dramatique que prend toute sa véritable dimension le geste
radical de Jésus. Au lieu de prendre soin exclusivement de
sa propre vie, Jésus s'est dédié à aider
celle de tous les autres autour de lui, surtout celle des plus mal
pris. Et il a invité ses disciples à faire de même,
à répandre la grâce de la coopération
en lieu et place de l'impitoyable loi de la compétition.
Exhortant les siens à bien plus que s'abstenir de faire du
tort à autrui, Jésus a donné l'exemple d'une
vie tournée vers les autres et soucieuse du bonheur des petits.
En fait, Jésus de Nazareth est allé jusqu'à
verser son propre sang pour tous ceux et celles qu'il aimait d'un
cur sincère. Jésus a littéralement donné
sa vie pour nous.
Ce geste déraisonnable et
scandaleux du sacrifice total d'un humain en faveur de ses semblables
n'a d'autre source que l'amour divin, qui dépasse toutes
nos mesquineries. Le cur de Jésus était rempli
d'un amour responsable, mature et audacieux, sans compromis. Il
a donc tout donné sans rien espérer en retour, jusqu'à
la dernière goutte de son sang.
Le don de l'espérance
Le plus merveilleux, pourtant, demeure
le don qui a accompagné cette effusion de sang : le don de
l'espérance. Le geste de Jésus n'en est pas un de
désespoir, de résignation, ou de dépit pour
la vie. Jésus était persuadé que son sacrifice
était porteur de vie en abondance. Il croyait, paradoxalement,
que la mort qu'il assumait avec courage et détermination
allait engendrer la vie. C'est ainsi qu'il comprenait le mystérieux
dessein de Dieu pour sauver l'humanité de cette folie égoïste,
abusive et meurtrière. Il fallait et il faut toujours!
arrêter le cercle infernal de la violence par un don
gratuit, par une offrande pure et sans compromis, sans intérêt
immédiat. Voilà la conviction qui l'animait, même
aux heures les plus sombres, angoissantes et difficiles de sa trop
courte vie. C'est pourquoi, peu avant de mourir, il affirmait toujours
son espérance en la victoire du Roi des Cieux : ...jusqu'à
ce jour où je boirai un vin nouveau dans le royaume de Dieu
(Marc 14,25).
Partager sa vie en communion avec le Christ
Jésus n'a pas seulement donné
l'exemple, il n'a pas seulement consenti au sacrifice ultime, il
ne nous a pas seulement légué le témoignage
de son indéracinable espérance. Jésus nous
a aussi invités à participer à son noble geste
et à y voir le signe engageant de l'Alliance du Dieu de la
vie avec les humains. Prendre le pain brisé de son corps,
boire à même la coupe de son sang, c'est nous nourrir
de son espérance inébranlable, c'est faire nôtres
ses propres choix de vie en faveur des «perdants» de
ce monde, c'est prendre les forces nécessaires pour poser
les gestes de don de soi à notre portée et dénouer
ainsi l'impasse du péché. Traversée par la
mort et l'effusion de sang du Seigneur, l'Eucharistie est finalement
porteuse de vie, bien au-delà de nos attentes. Prenons donc
place à table, faisons sur nous le signe de la croix, et
participons au projet de Dieu en acceptant les termes de son Alliance,
par une bouchée de pain et une gorgée de vin. Ayant
ainsi revêtu le Christ, sortons poser de bon cur les
gestes dignes de son Nom.
Le repas de l'alliance
Exode 24, 3-8
Moïse prit le sang, en aspergea le peuple, et dit : «
Voici le sang de l'alliance que, sur la base de toutes ces paroles,
le Seigneur a conclue avec vous ».
Le passage du livre de l'Exode
(première lecture) rappelle la conclusion de l'Alliance entre
Dieu et son peuple Israël. Le récit éclaire notre
compréhension du sacrifice juif comme étant un repas
solennel, partagé avec Dieu pour sceller un pacte sacré.
Le repas est célébré à la lecture des
commandements divins et les fils d'Israël font ce serment :
Toutes ces paroles que le Seigneur a dites, nous les mettrons
en pratique (Exode 24,3). Le sang des animaux immolés
pour être servis à table est aspergé rituellement
sur les convives et sur l'autel, signifiant par là le lien
désormais inviolable et sacré entre Israël et
Yahvé. La Pâque de Jésus est une reprise approfondie
de ce geste. En présentant son sang comme étant le
sang de l'Alliance, Jésus non seulement adhère de
tout son être à la volonté de Dieu exprimée
dans l'héritage d'Israël, mais il souligne le don radical
de soi qui est nécessaire pour que l'Alliance avec Dieu devienne
efficace.
Le sacrifice du Christ
Hébreux 9, 11-15
...Le sang du Christ, lui, fait bien davantage : poussé
par l'Esprit éternel, Jésus s'est offert lui-même
à Dieu comme une victime sans tache; et son sang purifiera
notre conscience des actes qui mènent à la mort pour
que nous puissions célébrer le culte du Dieu vivant.
Cet extrait de la Lettre aux Hébreux
développe une interprétation spirituelle du sacrifice
du Christ sur la croix, en se basant sur la tradition rituelle d'Israël.
Jésus est présenté à la fois comme temple,
comme grand prêtre et comme victime du sacrifice parfait et
définitif qui scelle désormais la Nouvelle Alliance
de Dieu avec l'humanité.
Source: Le Feuillet biblique,
no 2062. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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biblique de Montréal.
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