Une plongée
dans le Christ Jésus
Baptême et tentation de Jésus
Marc
1, 12-15
Autres lectures : Genèse
9, 8-15; Psaume
24 (25); 1
Pierre 3, 18-22
Chaque année, nous entrons en carême en contemplant
Jésus qui, conduit par lEsprit au désert, y
est tenté par Satan pendant quarante jours. Cest dailleurs
en cherchant, comme lui, à résister à la tentation
et à nous laisser guider par lEsprit que nous nous
préparons, pendant quarante jours, à célébrer
la Pâque du Christ : son passage à travers la mort,
sa victoire où il nous entraîne avec lui jusquen
vie éternelle.
La brièveté du récit
des tentations chez Marc a de quoi dérouter les plus vaillants
dentre nous. Où sont donc passées les trois
tentations auxquelles nous ont habitués Matthieu et Luc?
Le texte de Marc ne nous dit pas si Jésus a jeûné
pendant son séjour au désert ! Il semble bien
que non puisque, pendant ces quarante jours, les anges le servaient!
Que veut donc nous dire Marc ? Comment ce texte nous invite-t-il
à entrer en carême ? Cherchons à y voir
plus clair.
Une expérience enracinée
dans le baptême de Jésus
Pour bien comprendre le récit
des tentations de Jésus chez Marc, il importe de le situer
dans son contexte. La Bonne Nouvelle de Jésus Christ,
le Fils de Dieu (1,1) commence avec la proclamation de Jean
le Baptiste qui, dans le désert [
] proclamait un
baptême de conversion pour le pardon des péchés
(1,4). La conversion est un mouvement de lêtre humain
vers Dieu, le fait de se tourner vers son créateur. Cest
un mouvement en vue du « pardon des péchés »,
un pardon que lêtre humain ne peut se donner à
lui-même. Qui donc peut pardonner les péchés,
sinon Dieu seul ?, demanderont les scribes en Mc 2,7. Jean
Baptiste invite donc les hommes et les femmes de son temps à
faire un mouvement vers Dieu dans lespérance que celui-ci
se laissera toucher le cur et leur pardonnera en retour.
Or, cet appel à la conversion est
entendu par un grand nombre de personnes comme l'indique la
répétition de : Toute la Judée, tout Jérusalem,
venait à lui. Tous se faisaient baptiser par lui dans les
eaux du Jourdain, en reconnaissant leurs péchés
(1,5). Ce retour vers Dieu crée donc une situation qui étonne :
la ville devient déserte tandis que le désert devient
habité. Le texte nous dit que tous ces gens « se
faisaient baptiser » ou, plus littéralement, « se
faisaient plonger » par Jean dans les eaux du Jourdain.
Mais, fait étrange, le texte ne précise pas si ceux
qui descendent dans leau finissent par en remonter. On a limpression
que les hommes et les femmes qui répondent à lappel
de Jean Baptiste sont capables de sabaisser en reconnaissant
leurs péchés, mais quils sont incapables, par
eux-mêmes, de remonter des eaux.
Heureusement, tout cela change quand Jésus
vint de Nazareth, ville de Galilée, et se fit baptiser par
Jean dans le Jourdain (1,9). Notons dabord quà
la différence de tous ceux et celles qui lont précédé
dans cette démarche, Jésus ne vient pas se faire baptiser
« en reconnaissant ses péchés »
(1,5). Comme le dira lÉpître aux Hébreux
: En toutes choses, il a connu lépreuve pour nous,
et il na pas péché (4,15). Jésus,
parce quil est sans péché, navait pas
besoin dêtre baptisé par Jean. Mais, parce que
Jésus se rend solidaire de la démarche de conversion
de ses contemporains, parce quil se laisse plonger à
son tour dans les eaux du Jourdain, ce qui jusque-là était
impossible devient réalité. Au moment où
Jésus sortait de leau, Jésus vit le ciel se
déchirer
(Mc 1,10). Non seulement Jésus
est le premier dont Marc nous dit quil est sorti des eaux
mais, ce faisant, les cieux souvrent et le pardon redevient
possible. Il suffit alors que ceux et celles qui ont fait la démarche
de conversion suivent maintenant Jésus en remontant à
leur tour des eaux où ils ont confessé leurs péchés.
Nest-ce pas déjà lappel pressant auquel
nous convie le carême ?
Le désert a refleuri
La première action quaccomplit
Jésus après son baptême est de se laisser pousser
au désert par lEsprit, pour y demeurer pendant quarante
jours. En agissant de la sorte, il agit comme un nouveau Moïse
qui, après avoir fait passer le peuple au milieu de la mer
Rouge, le conduisit au désert pendant quarante ans. Pour
les Hébreux, le désert fut un lieu dépreuve
où ils sont bien souvent tombés. Pour Jésus,
ce lieu dépreuve est aussi lieu de victoire. Au temps
de Moïse, le Seigneur disait au peuple dIsraël :
Je vais envoyer un ange devant toi pour te garder en chemin et
te faire parvenir au lieu que je tai préparé (Ex
23,20). Pendant le séjour de Jésus au désert,
les anges le servaient (Mc 1,13). Pendant son séjour
au désert, le peuple dIsraël a été
confronté aux bêtes sauvages. Parce que les Hébreux
avaient récriminé contre lui, le Seigneur envoya
contre le peuple des serpents à la morsure brûlante,
et beaucoup en moururent (Nb 21,6). Jésus, au contraire,
vivait parmi les bêtes sauvages (Mc 1,13) sans
les craindre, comme au temps du déluge, lorsque Dieu parla
ainsi à Noé et à ses fils : Voici que
moi, jétablis mon alliance avec vous, avec tous vos
descendants, et avec tous les êtres vivants qui sont autour
de vous : les oiseaux, les animaux domestiques, toutes les
bêtes sauvages, tout ce qui est sorti de larche pour
repeupler la terre (Gn 9,9-10 ; 1re lecture).
La création est renouvelée
Jésus, nouveau Moïse, veut guider
le nouveau peuple de Dieu à travers le désert. Parce
quil est venu rejoindre les siens dans leur démarche
de conversion, les cieux se sont ouverts, les temps sont accomplis :
le règne de Dieu est tout proche. Là où
le peuple dIsraël était tombé dans la récrimination
et le péché, Jésus est venu apporter la Bonne
Nouvelle et la délivrance. Ce faisant, Jésus est aussi
le nouvel Adam.
Le premier Adam avait préféré
la parole dun être inférieur à la parole
de son créateur. Il avait voulu être son propre Dieu.
À cause de cela, le sol a été maudit :
De lui-même, il te donnera épines et chardons, mais
tu auras ta nourriture en cultivant les champs. C'est à la
sueur de ton visage que tu gagneras ton pain, jusqu'à ce
que tu retournes à la terre dont tu proviens ; car tu es
poussière, et tu retourneras à la poussière
(Gn 3,18-19). Jésus, lui, en foulant le sol poussiéreux
du désert, se laisse poussé par lEsprit. Bien
plus, en allant jusquau bout de son parcours sur notre terre,
en donnant sa vie sur la croix et en ressuscitant des morts, Jésus,
nouvel Adam, rouvre laccès à larbre de
vie, accès qui avait été interdit suite au
péché (voir Gn
3,24).
Suivre Jésus sur le chemin de vie
Dans le désert, Jésus rouvre
le chemin de vie, il rend toutes choses nouvelles. Il est lui-même
le chemin, la vérité et la vie (Jn 14,6).
Ce chemin souvre devant nous en ce début de carême,
un chemin où chaque baptisé(e) est invité(e)
à sengager envers Dieu avec une conscience droite,
et participer ainsi à la résurrection de Jésus
Christ (1 P 3,21). Bon carême et bonne route !
Yvan Mathieu, SM
Faculté de théologie, Universié d'Ottawa
Source: Le Feuillet biblique,
no 2047. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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biblique de Montréal.
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