La sainteté
d'un enfant
et
ses effets
La
fuite en Égypte (Matthieu 2, 13-15.19-23)
Autres lectures : Siracide
3, 2-6.12-14;
Ps 127 (128); Colossiens
3, 12-21
Comment l'évangile peut-il affirmer que la famille, le terreau
de nos relations humaines, soit un lieu privilégié
de communication avec Dieu? En mettant en scène une parcelle
de l'intimité croyante de la Sainte Famille de Nazareth.
Deux songes de Joseph déclenchent une série d'actions
du père de Jésus suivie d'une explication de ces comportements.
Peu de gens, dans notre société,
oseraient apprécier un personnage sur la base d'un songe.
Il s'agit en effet d'un état de conscience altéré.
Cependant, pour 90% des sociétés humaines actuelles,
c'est encore un moyen crédible d'information et de conduite
de la vie. Dans ce genre de situation, la relation de l'individu
au monde est améliorée par la modification des sensations
et des connaissances.
Dans l'évangile, le récit
des songes de Joseph et leur interprétation par le narrateur
permettent d'abord d'illustrer à quel point Joseph est un
juste, un personnage qui accorde son comportement aux vues divines
et dont la vie sera transformée.
De plus, ces songes justifient l'étonnante
carrière de Jésus. Comment une personne née
dans les bas-fonds montagneux de Galilée, à Nazareth,
pouvait-elle prétendre au titre de « fils de Dieu »?
La logique sociale voulait que l'on reproduise exactement les fonctions
du père. Qui s'écartait de ce filon défini
pour toujours devait être un fraudeur ou un accapareur des
ressources des autres. Les premières générations
chrétiennes devaient justifier le tournant étrange
de la vie de Jésus. Comment un fils d'ouvrier a-t-il pu légitimement
fonctionner comme rabbin, comme enseignant?
La citation du prophète Osée
au verset
15 établit une équivalence étonnante en
faveur de Jésus. En effet, le fils dont il est question dans
le texte prophétique original, c'est Israël, c'est tout
le peuple. Jésus se voit investi d'une tâche de représentation
collective entérinée par Dieu lui-même.
Au verset
23, un texte inconnu valide le titre (ambigu) de Nazaréen.
Le mot peut signifier « gardien, protecteur ». Il peut
faire référence aux sobriquets donnés aux premiers
chrétiens. Mieux encore, il peut servir d'allusion à
Isaïe
11, 1 où on célèbre la merveille du surgeon,
de la branche qui relance la croissance de l'arbre que l'on croyait
mort...
Par sa construction, par son recours
à un mode de communication réputé valide et
par ses liens avec d'autres textes bibliques, l'évangile
nous convie à prendre en exemple la transformation de la
vie de Joseph, père de Jésus.
Alain Faucher, ptre
Directeur des programmes de premier cycle
en études bibliques, études pastorales et théologie
Faculté de théologie et de sciences religieuses
Université Laval
Source: Le Feuillet biblique,
no 1994. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre
biblique de Montréal.
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