L'annonciation...
prise 2
Joseph
et la visite d'un ange (Matthieu 1, 18-24)
Autres lectures : Isaïe
7, 10-16; Ps 23 (24); Romains
1, 1-7
La tradition chrétienne accorde une très large place
au récit de l'annonciation faite à Marie. Lors de
cette « première » annonciation, l'ange Gabriel
rassure Marie et lui fait part du mystérieux projet de Dieu.
Bien que Marie soit vierge, l'ange annonce à Marie qu'elle
mettra au monde un fils : Jésus. Encore aujourd'hui, ce texte
du premier chapitre de l'Évangile de saint Luc inspire
les croyants. Et la liturgie y recourt abondamment pour nourrir
la foi des baptisés.
Dieu a avisé Marie de son
indicible dessein. Mais aurait-il oublié d'informer quelqu'un?
Joseph, lui, devait-il tout comprendre par lui-même? Après
tout n'est-il pas l'un des principaux concernés? Comment
un homme, laissé à lui même, peut-il saisir
l'intervention insaisissable de Dieu? Bien qu'il ne porte pas l'enfant
en lui, en père responsable ne devrait-il pas supporter Marie,
son épouse?
L'Évangile de saint Matthieu
présente le « deuxième » volet de l'annonciation.
Voilà l'un des rares épisodes évangéliques
où Joseph tient un rôle de premier plan. Ici, toute
l'action tourne autour de lui. C'est à son tour de recevoir
un message de l'Ange du Seigneur.
Joseph, le juste
Pour bien comprendre l'annonce faite
à Joseph, il faut rappeler que le mariage juif se déroulait
en deux temps. Les époux échangeaient d'abord leur
consentement. Par la suite, l'épouse déménageait
dans la demeure de l'époux pour y mener la vie commune. Or
un certain temps s'écoulait entre ces deux étapes
du mariage. Et l'annonciation du jour s'inscrit dans ce laps de
temps : Marie et Joseph ont fait l'échange de leur promesse,
mais ne vivent pas encore ensemble. À l'époque, il
était impensable qu'une femme puisse alors avoir un enfant.
Avant de vivre avec son épouse,
Joseph s'aperçoit donc que sa conjointe est enceinte. Il
sait bien, lui, ne pas en être le père. Quel dilemme!
Comment réagir? Sa foi le pousse sûrement à
s'inspirer de la Loi. Or, voici le châtiment prescrit par
le Deutéronome : Vous les ferez sortir de cette
ville, vous les lapiderez avec des pierres, et ils mourront
(22, 24). Joseph ne souhaite pas infliger cette lourde sentence
à Marie, mais il doit se protéger.
Bien qu'aucune décision ne
soit encore prise, il envisage de la répudier en secret.
À cet instant se produit la « deuxième »
annonciation. Lors d'un songe, l'Ange du Seigneur informe Joseph
du projet de Dieu.
Joseph fit...
Joseph réagit promptement
au message de l'envoyé de Dieu. À partir de ce moment,
il accueille son épouse chez lui, ce qu'il hésitait
à faire jusqu'à maintenant. Il s'agit d'une attitude
complètement nouvelle, puisque avant le songe, Joseph pensait
même renvoyer Marie. À n'en pas douter, Joseph se laisse
transformer par Dieu... il harmonise son agir pour que s'accomplisse
le plan de Dieu.
Dans le songe, Joseph se voit confier
la tâche de donner le nom de « Jésus » à
l'enfant qui naîtra. Il ne s'agit pas d'un geste banal. Au
contraire, dans la tradition biblique, donner un nom à un
enfant équivaut à le reconnaître comme son fils.
Parce que Joseph accepte ce rôle, il devient le père
légitime de Jésus. Ce faisant, il permet à
Jésus de s'insérer dans la descendance de David (prérogative
du Messie attendu par les juifs).
Au fiat de Marie, lors de
la première annonciation, s'ajoute le il fit de Joseph.
Voilà deux modèles extraordinaires pour tous les chrétiens.
Daniel Montpetit, bibliste
Professeur au Collège Jean-Eudes
Source: Le Feuillet biblique,
no 1993. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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