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Trentième dimanche ordinaire A - 23 octobre 2005
 
« Tu aimeras »

Le premier de tous les commandements (Matthieu 22, 34-40)
Autres lectures : Exode 22, 20-26; Ps 17(18); 1 Thessaloniciens 1, 5c-10

Des spécialistes de la Bible demandent à Jésus de se prononcer sur le contenu essentiel de la Révélation divine. Des « docteurs » diplômés de la ville et reconnus par la société comme étant à la fine pointe de l'interprétation des textes sacrés confrontent Jésus, le paysan populaire, sans grande éducation.

   Derrière leur question apparemment pieuse et innocente se cachent une foule de préjugés condescendants : « Que peux-tu bien comprendre à la Loi, toi, un charpentier du village de Nazareth? On ne t'a jamais vu à l'école de quelque rabbi prestigieux. Saurais-tu mieux que nous résumer l'essentiel de la volonté de Dieu d'après les Écritures? Compte tenu du nombre de textes, de lois et de règlements pour les appliquer selon toutes les circonstances inimaginables, ce n'est pas une mince tâche! À coup sûr, cela prend de longues études et une familiarité avec les discussions savantes en cours... Que vas-tu bien nous sortir comme réponse? »

Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur...
     Jésus n'essaie pas du tout d'entrer en compétition avec les docteurs de la Loi. L'homme de Nazareth ne se fixe pas pour objectif d'impressionner ses interlocuteurs par des considérations et des nuances savantes, qui ne sont pas son fait. En bon paysan Juif pratiquant, Jésus se limite à réciter humblement le début du «Je crois en Dieu» de sa tradition religieuse. On trouve cette émouvante confession de foi dans le livre du Deutéronome (Dt 6, 4ss) : Écoute, Israël : le Seigneur, notre Dieu, est notre seul Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu... Sans prétention aucune et sans apparat, la réponse est ajustée à souhait. Qui pourrait contester le Credo d'Israël? Ainsi, l'humilité de Jésus lui permet de voir, au cœur de la Révélation divine, l'amour de Dieu, tout simplement.

    L'humilité de Jésus lui permet de s'exprimer justement, sans fausseté ni compromis. Or, Jésus n'en reste pourtant pas là, mais il va au-devant de la prochaine question qui aurait pu jaillir de la bouche de ses savants interlocuteurs : « Oui, comme c'est beau! Mais, en quel sens...? Comment aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit? C'est là-dessus que les divergences d'opinion commencent. Qu'en dis-tu?» Jésus était prêt pour cette réplique, qui aurait sûrement été exprimée avec un sourire condescendant aux lèvres. En effet, toutes les grandes religions et tous les grands maîtres spirituels prêchent l'amour, rien de nouveau sous le soleil! Des guerres de religion se déclenchent, cependant, du moment où on essaie de spécifier en quoi consiste l'amour. Jésus voit venir le coup et il le pare à l'avance en proposant d'identifier lui-même un second commandement, tout aussi important que le premier. Là, il surprend à coup sûr ses interlocuteurs, qui non seulement ne s'attendent pas à un surplus d'information, mais qui savent qu'il n'existe pas de commandement arrivant à la cheville du premier, dans tous les livres de la Loi et des Prophètes. « Ça y est! – ils se disent – Jésus va s'enfoncer dans une erreur monumentale au vu et au su de tout le monde présent à la discussion. Son ignorance va être manifeste pour tous », espèrent-ils.

Tu aimeras ton prochain comme toi-même
     Jésus risque le tout pour le tout et cite un vieux commandement enfoui dans le livre du Lévitique (Lv 19, 18) : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. D'après la spiritualité de Jésus, ce verset que les docteurs de la Loi auraient pu qualifier de mineur, s'avère capital pour comprendre et pratiquer le commandement fondamental d'Israël. Jésus fournit donc ouvertement à ses adversaires la clef de lecture qui l'autorise à tout subordonner – même le culte au Temple et le repos du sabbat – au soin à apporter aux plus démunis de la société : pauvres, malades, impurs, pécheurs, exclus de toute sorte, etc. Jésus adhère de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit à l'amour de Dieu. Néanmoins, pour le prophète de Nazareth, cet amour de Dieu trouve son expression la plus parfaite, la plus sublime, la plus noble, la plus acceptable pour Dieu, dans l'amour dévoué pour la personne humaine et dans la lutte constante pour qu'elle retrouve sa dignité et son bonheur. Selon Jésus, impossible d'aimer Dieu sans se soucier des autres, surtout des plus mal-pris, quelle que soit leur origine, leur condition sociale, leur statut juridique, leur valeur morale même! En effet, dans un autre passage saisissant de l'Évangile (Luc 10,29-37), Jésus spécifiera au moyen d'une parabole que, pour lui, «son prochain» veut dire toute personne en détresse devant soi, bien au-delà de la famille, des amis et des gens aux intérêts semblables. Bref, la réponse de Jésus est : « Aide par tous les moyens à ta disposition quiconque en a besoin, et tu aimeras ainsi Dieu comme Il le veut ». Toute autre interprétation du premier commandement conduit selon Jésus à se faire d'autres dieux que le seul Seigneur qu'il faut adorer. L'égoïsme, l'argent, notre seul plaisir deviennent alors des idoles, que même la prière pieuse ne peut écarter.

La charité et la compassion au cœur de l'Alliance
Exode 22, 20-26
...« Tu nemaltraiteras point l'immigré qui réside chez toi, tu ne l'opprimeras point...»

    L'Évangile d'aujourd'hui est merveilleusement complété par une série des commandements tirés du livre de l'Exode (Ex 22,20-26), illustrant point par point en quoi consiste aimer son prochain comme Jésus le propose. Pas de traitement de seconde classe pour les immigrants, d'où qu'ils viennent, peu importe leur race, leur langue ou leur religion. Pas d'abus envers ceux qui ne peuvent se plaindre : les veuves et autres femmes seules, laissées à se débrouiller par leurs propres moyens... les orphelins et autres jeunes dans la rue, sans la protection d'un parent bienveillant... les personnes sans domicile, sans travail, sans papiers... Pas d'intérêt quand il s'agit de prêter de l'argent aux plus pauvres! Pas de chantage ou de condition imposés à ceux qu'on consent à aider. Ces lois de l'Ancien Testament ont orienté les engagements de Jésus, pourquoi pas les nôtres?

Attention aux idoles
1 Thessaloniciens 1, 5c-10
...« Vous avez commencé à nous imiter, nous et le Seigneur, en accueillant la Parole au milieu de bien des épreuves avec la joie de l'Esprit Saint... ».

    Paul loue les chrétiens de Thessalonique, parce qu'ils se sont détournés des idoles afin de servir le Dieu vivant et véritable, à la manière de Jésus. Nous qui confessons notre foi en Jésus Christ, puissions-nous constamment nous détourner des idoles qui nous sont présentées, pour qu'en adorant l'unique Seigneur de nos vies, nous consacrions toutes nos énergies à soulager et à combattre la misère du pauvre monde.

Rodolfo Felices Luna, bibliste
Iles-de-la-Madeleine

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2028. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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