La gloire
et l'amour
Introduction
aux discours d'adieu (Jean 13, 31-33a.34-35)
Autres lectures : Actes
des Apôtres 14, 21b-27; Ps 144 (145);
Apocalypse
21, 1-5a
Qui ne rêve pas de ces deux réalités? C'est
justement de cela dont Jésus va entretenir ses disciples
lors de la dernière soirée passée avec eux.
Après leur avoir lavé les pieds (Jean
13, 1-17) et avoir annoncé la trahison de Judas (Jn
13, 21-30), il entreprend son long discours d'adieu, sorte de
testament laissé non seulement au petit groupe des fidèles
qui l'entourent en ce moment particulièrement dramatique
mais aussi à toute l'Église de toutes les générations
(Jn
13, 31 - 17, 26).
La gloire
La gloire fait partie du vocabulaire
caractéristique du quatrième évangile. Il ne
s'agit pas seulement de la célébrité ou de
la bonne réputation. L'idée biblique de gloire
se rapporte d'abord à Dieu; elle veut exprimer quelque chose
de la richesse - par ailleurs inexprimable - de son être.
Lorsque des humains sont déclarés glorieux,
c'est qu'ils participent, d'une certaine manière, à
la gloire de Dieu, par exemple, le prophète Élie (cf.
Sir
48, 4).
Le discours de Jésus commence
par une double affirmation portant sur le présent : Maintenant
le Fils de l'homme est glorifié et Dieu est glorifié
en lui (v. 31). L'Heure est maintenant venue pour Jésus
de passer de ce monde à son Père (cf. Jn
13, 1) et ce passage révèle pleinement
qui il est et quelle est sa mission. En allant jusqu'au don de sa
vie, Jésus manifeste le mystère de l'amour de Dieu
pour l'humanité; en ce sens, Dieu est glorifié
en lui c'est-à-dire que la Pâque de Jésus
est la révélation plénière du projet
de Dieu.
Ainsi se trouve réalisé
ce que Jésus avait annoncé un peu auparavant : Voici
l'heure où doit être glorifié le Fils de l'homme
(Jn 12, 23) et exaucée la prière qu'il formulait à
ce moment-là : Père, glorifie ton Nom (Jn 12,
28). Le geste symbolique du lavement des pieds est déjà
une anticipation de son ultime service, sa mort sur la croix. En
se mettant volontairement à la place du serviteur, Jésus
révèle le vrai visage du Père lui qui a
aimé le monde jusqu'à envoyer son Fils pour le sauver
(cf. Jn
3, 16-17).
En réalisant pleinement sa
mission, Jésus sera associé à la gloire
de son Père. Le verbe glorifier est ici au futur (v.
32) car c'est au moment de son élévation
sur la croix que le Christ aura totalement accompli sa mission (cf.
Jn
19, 28-30) et il sait bien que cette Heure est maintenant
toute proche.
...et l'amour
Si on demande à quelqu'un,
même sans formation religieuse spéciale, ce qui est
le plus caractéristique de l'enseignement de Jésus,
il y a de fortes chances qu'il cite le commandement de l'amour
sous l'une ou l'autre de ses formes. Dans l'évangile de
Jean, l'accent porte surtout sur l'amour mutuel. L'amour envers
les personnes extérieures à la communauté chrétienne
n'est pas exclu, mais ce qui apparaît au premier plan, c'est
l'amour des disciples les uns envers les autres. Cette constatation,
jointe aux appels pressants à l'unité conservés
dans le même évangile, nous font supposer que Jean
s'adressait à une communauté en proie à des
rivalités sérieuses (cf. Jn
17, 11.21).
Jésus identifie l'amour mutuel
comme le critère qui permet de reconnaître ses disciples.
De même que Jésus révèle le vrai visage
de Dieu en acceptant de donner sa vie par amour, ainsi les disciples
de Jésus manifestent leur appartenance en essayant d'aimer
comme lui-même l'a fait : Comme je vous ai aimés,
aimez-vous les uns les autres (v. 34). C'est leur manière
à eux de participer à la gloire de Dieu que
de devenir, dans le monde, signes et témoins de son amour.
Le commandement de l'amour
est donc plus qu'une simple règle de bonne conduite, il a
une dimension théologale; aimer à la manière
de Jésus, c'est manifester la gloire de Dieu en montrant
au monde son vrai visage. En cela réside la nouveauté
du précepte donné par Jésus : pas simplement
une règle parmi d'autres mais une ligne directrice qui fait
de toute la vie des disciples une révélation du Dieu
d'amour.
Jérôme Longtin, prêtre, bibliste
Longueuil, Québec
Source: Le Feuillet biblique,
no 1970. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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biblique de Montréal.
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