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Dimanche du St-Sacrement du Corps et du Sang du Christ A - 2 juin 2002
 
« Voulez-vous partir, vous aussi? »

Discours sur le pain de vie (Jean 6, 51-58)
Autres lectures: Dt 8, 2-3.14b-16a; Ps 147; 1 Co 10, 16-17

L'évangile d'aujourd'hui est une sorte de test. Parler de « manger la chair » ou de « boire le sang » de quelqu'un n'avait pas plus de sens à l'époque des premiers chrétiens qu'aujourd'hui. La vive discussion et le départ de nombreux disciples sont sans doute l'écho de ce qui se vivait dans l'Église à laquelle saint Jean destinait son évangile. L'enseignement sur Jésus, Pain de Vie, ne passait pas facilement. On lit d'ailleurs, un peu plus loin (versets 60 et 66) : « Beaucoup de ses disciples s'écrièrent : "Ce qu'il dit là est intolérable, on ne peut pas continuer à l'écouter (...). À partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s'en allèrent et cessèrent de marcher avec lui.»

     Ce ne sont donc pas seulement les adversaires de Jésus, mais aussi ses disciples qui ont, ce jour-là, à « passer le test ». Et aujourd'hui, en cette Fête du Saint-Sacrement, c'est notre tour.

     Mais pas plus qu'à ses premiers disciples, Jésus ne nous demande de comprendre ou de savoir expliquer comment ce pain est sa chair. Il ne donne d'ailleurs lui-même aucune explication, aucune théorie. Le test à passer n'est pas un examen de théologie. C'est un appel à accueillir dans la foi un don inouï.

     Car ce que Jésus nous offre, c'est d'entrer dans le mystère de sa propre existence, qui est le mystère même de Dieu : « De même que moi je vis par le Père, de même aussi celui qui me mangera vivra par moi ». On ne peut faire autrement que penser à ses derniers entretiens, la veille de sa mort, et à la question de Philippe : « Seigneur, montre-nous le Père ». Jésus répondra : « Celui qui m'a vu a vu le Père. Je suis dans le Père et le Père est en moi. (...) Si quelqu'un m'aime... mon Père l'aimera... et nous viendrons chez lui ». (14, 9.10.23)

     Si saint Jean donne tant d'importance dans son évangile à ce débat autour du Pain de vie, s'il souligne la décisive profession de foi de Pierre, c'est qu'il voit dans ce don de la chair du Fils comme nourriture de vie éternelle le point culminant du grand mouvement commencé de toute éternité : « Au commencement était le Verbe. Et le Verbe était auprès de Dieu. Et le Verbe était Dieu. Et le Verbe s'est fait chair » (1, 1.14) Et « à tous ceux qui l'ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu » (1,13).

     La boucle est bouclée. Les disciples qui « mangent la chair » du Verbe-fait-chair deviennent fils avec le Fils. De même que mon corps assimile sa nourriture et la fait chair de ma propre chair, de même, nourri du Pain de Vie, je deviens, dans ma chair, inséparable de Jésus, Verbe fait chair. C'est pour cette union inouïe - cette communion - que Jésus se fait nourriture. « Père, qu'ils soient un comme nous sommes un, moi en eux et toi en moi » (17,22-23) résumera Jésus, la veille de sa mort. Le partage de l'intimité divine, de la vie trinitaire, est notre vocation et notre destin. Par Jésus. Avec Jésus. En Jésus.

     « Voulez-vous partir, vous aussi ? », avait-il demandé aux Douze. La réponse de Pierre est allée droit à l'essentiel : « Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Tu es le Saint de  Dieu » (6, 68).

Bertrand Ouellet
[email protected]

 

Source: Le Feuillet biblique, no 1886. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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« Dieu a envoyé son Fils »