«
Personne ne va vers le Père
sans
passer par moi »
Jésus,
chemin vers le Père pour ceux qui croient en lui (Jean
14, 1-12)
Autres lectures: Ac
6, 1-7; Ps 32 (33) ; 1
Pi 2, 4-9
Le Christ se présente, dans cet extrait célèbre
du quatrième évangile, comme étant le seul
chemin possible vers Dieu, Père de l'humanité. Ses
paroles sont sans équivoque : Moi, je suis le Chemin,
la Vérité et la Vie; personne ne va vers le Père
sans passer par moi (14,6). Pareils propos sauraient à
juste titre paraître prétentieux, voire même
insupportables dans la bouche de n'importe qui. Qui pourrait dire
aussi sans rougir : « Regardez-moi et vous verrez Dieu?
» Quiconque oserait parler ainsi récolterait l'indignation
et le mépris, sinon les rires de tout le monde. Pourtant
Jésus dit à Philippe : Celui qui m'a vu a
vu le Père (14,9). Comment le Christ, que nous prenons
comme un exemple digne d'être suivi, peut-il se permettre
de tels propos prétentieux?
Nous pourrions parler du privilège
divin du Fils de Dieu de révéler le Père, de
l'unicité irremplaçable de son témoignage,
de sa dignité inégalée parmi les hommes, etc.
Ce serait esquiver dogmatiquement la question et annuler le témoignage
de Jean. Jésus de Nazareth n'aurait jamais tenu de tels propos,
nous pouvons en être sûrs! C'est Jean l'évangéliste
qui les place dans la bouche de son personnage « Jésus
», dans son évangile, pour mieux illustrer tout ce que
l'humble prophète de Nazareth est devenu après Pâques
pour lui. C'est son témoignage de foi que nous lisons,
pas une biographie impartiale ou un reportage en direct. Pour Jean
et sa communauté chrétienne, le Christ Jésus,
ressuscité d'entre les morts, est devenu le chemin, la vérité
et la vie. Il le crie alors tout haut, tout fort, sans gêne.
Soit. Mais dans quel sens?
Il est toujours utile de replacer
un texte dans son contexte, afin de mieux le comprendre. L'extrait
de ce dimanche fait suite aux propos de la dernière Cène
(Jean
13). Il ne faut pas oublier le geste que Jésus vient
d'accomplir et dont nous faisons mémoire le Jeudi Saint.
Le noble maître quitte ses vêtements et se met, comme
un esclave ou un serviteur, à laver les pieds des disciples
attablés. C'est tandis qu'il est à genoux, aux pieds
des gens, en train de les servir humblement, que Jésus est
visage de Dieu découvert, vérité de Dieu exposée
à nu, unique chemin vers Dieu dévoilé. Toute
personne qui adopte pareille attitude et qui choisit courageusement
le service des plus humbles comme priorité, rappelle le Christ
comme icône sacrée de l'amour de Dieu.
Relue dans son contexte, la prétention
du personnage Jésus se transforme en vive interpellation :
le seul chemin véritable qui mène à la vie
de Dieu est la voie du service. Ce n'est même pas le chemin
du culte ou de la prière, bien qu'ils puissent s'avérer
utiles en cours de route. Le Christ à genoux, le Christ en
croix, voilà le seul chemin possible. Serons-nous de la route?
Rodolfo Felices Luna
Source: Le Feuillet biblique,
no 1881. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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