Les foules
sont fatiguées et abattues
Jésus
et les foules sans berger (Matthieu 9, 34 - 10, 8)
Autres lectures: Exode
19, 2-6a; Ps 99 (100); Romains
5, 6-11
Jésus, voyant les foules, eut pitié d'elles...
Il n'est pas dit ici qu'il donne un enseignement comme il l'a fait
sur la montagne, qu'il guérit les foules qu'on lui amène
souvent. Non! ici Jésus « fut ému jusqu'aux entrailles
» comme l'indique l'étymologie du mot en hébreu.
Il jette un regard neuf sur ces femmes et ces hommes épuisés,
abattus et prostrés. Il constate une situation spirituelle.
D'ailleurs, l'image des brebis sans bergers, familière aux
croyants du Premier Testament, précise cette perception.
Dans Ézéchiel, on entend : Je vais appeler à
leur tête un berger et un seul qui prendra soin d'elles...Moi,
Yhwh, je serai Dieu pour elles (Ézéchiel 34, 23).
Yhwh, mon berger, je ne manque de rien. Grâce à
toi, couché dans l'herbe des prés verte, guidé
vers les eaux calmes, tu me redonnes des forces, tu m'indiques le
sentier le plus juste (Psaume 23, 1-3).
Dans un récit de guérison,
il est question d'un bienfaiteur et de bénéficiaires.
Le cas, ici, est différent : l'image d'Ézéchiel
révèle une réciprocité, celle d'une
alliance. Chez Jésus, son émotion et sa vision autre
de la foule font jaillir l'invitation à une prière
de demande : Priez donc le maître de la moisson d'envoyer
des ouvriers pour sa moisson (v. 38). Une prière qu'on
pourrait entendre avec une certaine nuance, celle-ci :« n'envoie
pas d'autres que nous », mais « envoie nous comme ouvriers
pour la moisson ».
C'est le Seigneur qui appelle les
Douze et leur donne le pouvoir. L'appelé est celui qui écoute
et reçoit l'appel, il est celui qui va vers les autres. Son
appel est un don, sa mission, une conviction. Son assurance repose
sur la confiance qu'il met en Celui qui l'a appelé. Chez
l'évangéliste Matthieu, le groupe des Douze est introduit
sous le régime de l'identité avec le Maître
: « des semblables au Maître », c'est-à-dire
même pouvoir, mêmes fins. Ils ont à réussir
ce qu'il est, Lui, Jésus. Les foules alors, dans le regard
de Jésus, puis des Douze, deviennent les partenaires possibles
de l'Alliance.
Paul a rappelé l'amour immensément
gratuit de Dieu. Les ministères dans l'Église (les
services) sont des dons reçus gratuitement; les fruits de
l'apostolat ne dépendent pas avant tout des capacités
personnelles du serviteur. Il n'y a pas de doute que « les
serviteurs inutiles » qui posent des gestes qui font vivre
et qui risquent une parole vraie désaltèrent et nourrissent
le peuple « épuisé et prostré ».
Julienne Côté, CND
Source: Le Feuillet biblique,
no 1888. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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biblique de Montréal.
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