ISBN : 978-2213654843
Cette présentation a d’abord été publiée dans Rencontre, le bulletin du Centre culturel chrétien de Montréal, septembre-novembre 2013 — vol. 3, no 4.
[1] NDLR - Le texte de l’Évangile de Jean affirme qu’il repose sur le témoignage du disciple bien-aimé. Pourtant plusieurs exégètes affirment qu’il y a eu plusieurs étapes à la rédaction de cet Évangile dont la compilation finale n’est pas à attribuer au disciple bien-aimé.
Jésus
Jean-Christian Petitfils
Paris, Fayard, 2011, 668 p.
Historien de réputation internationale, Jean-Christian Petitfils lançait en 2011 un livre intitulé tout simplement Jésus avec, en couverture, le superbe visage du Christ de Rembrandt. On a, avec raison, qualifié ce livre de biographie événement. L’originalité de cet ouvrage est d’intégrer des données dispersées dans un récit biographique, clair et fluide, s’efforçant de reconstituer la vie et le caractère du Jésus de l’histoire. Que sait-on de lui? Comment était-il perçu par ses contemporains? Un prophète, un Messie? Pour quelles raisons a-t-il été exécuté? Misant sur les dernières découvertes archéologiques et les acquis de l’exégèse biblique, Jean-Christian Petitfils replace le Jésus de l’histoire dans l’environnement religieux, culturel et politique de la Palestine de son temps. Il nous présente un Jésus qui est plus qu’un sage; sa personne est un mystère. Il est un juif inséré dans sa tradition. Son insertion dans l’histoire se produit à un moment où l’attente messianique était grande en Palestine jusqu’au IIe siècle. Il est le Messie, mais il prend ses distances. Il est de descendance davidique, les Nazôréens, de pacifiques paysans, cultivateurs ou artisans ruraux. Petitfils nous le présente comme un homme pleinement juif, mais annonçant quelque chose d’autre, un mystère. Il annonce le Royaume, ce qui est nouveau dans la tradition juive. Il se dit fils de l’homme. À cet égard, il bouscule la foi juive. « Il vous a été dit, moi je vous dis... » Il parle avec une autorité qui questionne. Il appelle son père Abba, alors que pour les juifs, le père, c’est Abraham.
Jésus de l’histoire et Jésus ressuscité : la distinction n’est pas si étanche. Mais l’historien fait son travail et se refuse à passer la ligne jaune. La figure du Christ ressuscité procède d’une démarche de foi. L’historien ne va pas jusque-là. Il ne peut pas affirmer que les miracles se sont véritablement produits. Mais l’historien doit expliquer que, dans la mémoire des disciples et des premières générations chrétiennes, ces événements ont pris une importance et une signification capitales. L’historien ne peut dire que Jésus est fils de Dieu. Mais Jésus, lui, se disait Fils de Dieu.
Petitfils s’appuie sur l’évangile selon Jean. En quoi est-il plus fiable que les synoptiques? À la différence des autres évangélistes, Jean est un témoin oculaire [1]. Il faut donc lui faire confiance. Jean, l’évangéliste, n’est pas l’un des douze apôtres, le frère de Jacques et fils de Zébédée. Il s’agit d’un prêtre important de Jérusalem. Il a donc assisté à de nombreux discours de Jésus. L’évangile de Jean est le plus mystique et le plus historique, fournissant divers détails. Qu’on pense au récit des noces de Cana. On n’y trouve pas de récit de l’institution de l’eucharistie, mais le lavement des pieds, dont la portée est considérable (Sens de l’eucharistie, ch. 6). Pourquoi? La question demeure sans réponse...
En somme, un grand livre, accessible à tous, écrit par un grand auteur…
Guy Lapointe, théologien