Jézabel
Alan Gold
traduit de langlais par Isabelle St Martin
Michel Lafon, 2003, 321 p.
On parle peu de cette princesse phénicienne dans la Bible. Les quelques mentions quon y trouve sont concentrées dans les Livres des Rois. Pour des raisons politiques et commerciales, elle est devenue lépouse dAchab, roi dIsraël. À la lecture du roman, on remarque une reconstitution convainquante des sociétés israélite et phénicienne du IXe siècle avant notre ère. On dénote une bonne connaissance des religions du Proche-Orient ancien et des querelles incessantes entre les petits royaumes de la Syrie-Palestine.
Jézabel est dépeinte comme une jeune femme intelligente et pleine dassurance qui règne avec Achab. Comme il lexplique dans lavant-propos, Alan Gold veut réhabiliter la figure de Jézabel en envisageant « les événements historiques dans une perspective totalement différente de celle qui nous est relatée par lAncien Testament ». Sa Jézabel est une adepte du culte dAstarté, présentée davantage comme la déesse du plaisir sexuel et de la séduction que comme la déesse de la fertilité. La reine se heurte à Élie représenté sous les traits dun prophète austère et fanatique qui ne tolère aucune concession en ce qui concerne la foi yahviste.
Une faiblesse du roman est la lecture historisante et réductrice qui est faite des récits de miracles du cycle dÉlie. Probablement mal à laise avec le merveilleux de ces récits, lauteur en a évacué le symbolisme pour proposer une explication acceptable pour un lecteur occidental, comme on le faisait au XIXe siècle avec ce genre de textes. Il en résulte un renversement de lhistoire car la voix de Jézabel est réhabilitée au détriment de la figure de lun des grands prophètes du judaïsme. Il aurait été plus juste, il me semble, datténuer lantagonisme entre Jézabel et Élie (exagéré dans la Bible) et de montrer, dans le roman lui-même, que le culte de Baal et dAstarté a été introduit en Israël bien avant larrivée de la princesse phénicienne.
Sylvain Campeau
Bibliste, Laval