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La lampe de ma vie
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chronique du 3 juin 2016

 

Jérémie : annoncer l’alliance lorsque tout s’effondre

Jérémie

Le prophète Jérémie
Marc Chagall (1887-1985)
Huile sur toile de lin, 1968, 115 x 146,3 cm
Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou, Paris

Deux événements tragiques vont marquer l’histoire du petit peuple d’Israël : les destructions d’Israël et de Juda. Pour le prophète Jérémie, ces tragédies seront occasions de renouveler l’alliance avec Dieu. 

Un peu d’histoire…

     En 722 avant J.C, le royaume d’Israël entre en guerre contre le roi d’Assyrie, mais il accumule défaite sur défaite et la capitale Samarie est prise et détruite par Sargon II. Israël devient une province du grand voisin assyrien et une partie de la population est emmenée en exil alors que d’autres populations sont autorisées à occuper la terre de l’ancien Israël en grande partie vidée de ses habitants.

     Ceux qui ont pu échapper à l’exil et à la tutelle mésopotamienne trouvent refuge à Jérusalem et dans le petit royaume de Juda qui connaît à cette époque un renouveau considérable et le développement de l’écriture. Les scribes de Samarie sont venus avec leurs premiers écrits et traditions. Désormais ils réécrivent ou interprètent l’histoire autour du destin de Juda, la royauté issue de David et le seul temple restant debout, celui de Jérusalem. Cependant vers 586 av. J.-C., une nouvelle catastrophe s’abat sur le peuple hébreu. Le petit royaume de Juda voit arriver les armées de Nabuchodonosor. Le siège de Jérusalem commence et s’achève par la prise et la destruction de la ville et de son temple.

De grandes questions qui taraudent le cœur humain

     Tout est pillé, détruit, brûlé. Du temple qui constituait le point central autour duquel se rassemblait tout un peuple et se formait son identité, il ne restera qu’un champ de ruine. C’est le point de départ d’une série de lourdes questions qui visent à chercher le sens de cet événement. Yahvé a-t-il abandonné son peuple? Est-il trop faible pour le sauver? Pourquoi le livre-t-il au malheur et à la violence? Quelle en est la raison? D’où vient cette violence qui se déchaîne parfois et frappe si durement les hommes?

     Pour comprendre ces questions, il faut se souvenir de la conception du divin à l’époque. La divinité que vénérait un peuple était généralement censée se battre aux côtés de ce peuple. La victoire des armées lui était attribuée, ainsi que la défaite perçue comme une faiblesse. C’est la raison pour laquelle, les peuples conquis adoptaient généralement les dieux de leurs vainqueurs. Il en alla différemment pour Israël. Contrairement aux autres, ce petit peuple parvient à garder son identité et découvre une nouvelle facette du visage de son Dieu. Il le fait grâce au message de deux hommes particuliers, Jérémie d’abord, puis Ezéchiel, le prêtre visionnaire qui accompagne les déportés de Jérusalem à Babylone. Quelle parole vont-ils apporter?

     Pour ressentir un peu le désarroi face à la violence inouïe et la tragédie qui les frappe, écoutons la complainte de Jérémie :

Tu leur diras cette parole (dit le Seigneur Dieu) : Que mes yeux ruissellent de larmes nuit et jour, sans s’arrêter ! Elle est blessée d’une grande blessure, la vierge, la fille de mon peuple, meurtrie d’une plaie profonde. Si je sors dans la campagne, voici les victimes de l’épée ; si j’entre dans la ville, voici les souffrants de la faim.

Même le prophète, même le prêtre parcourent le pays sans comprendre. As-tu donc rejeté Juda? Es-tu pris de dégoût pour Sion? Pourquoi nous frapper sans remède? Nous attendions la paix, et rien de bon ! le temps du remède, et voici l’épouvante! Seigneur, nous connaissons notre révolte, la faute de nos pères : oui, nous avons péché contre toi! À cause de ton nom, ne méprise pas, n’humilie pas le trône de ta gloire! Rappelle-toi : ne romps pas ton alliance avec nous! (Jérémie 14,17-21)

Annoncer l’alliance lorsque tout s’effondre

     Le traumatisme face à la violence est immense. Jérémie ne comprend pas. Dieu a-t-il rejeté son peuple? Ou bien, comme certains disent aujourd’hui, Dieu ne serait-il qu’une illusion, lui qui ne fait rien contre le déchaînement de la violence qui affecte les humains ? Jérémie ne doute pas de Dieu. Il prend conscience que l’homme en est le premier responsable et la première victime. Il rappelle les révoltes et la faute de tout un peuple… oui, nous avons péché contre toi!Cette prise de conscience n’empêche pas le prophète de rappeler à Dieu l’alliance conclue avec lui. Rappelle-toi : ne romps pas ton alliance avec nous!Jérémie est mû par une foi indéfectible. Alors que tout s’effondre autour de lui, il annonce déjà une alliance nouvelle. Il n’a pas d’illusions sur les capacités de l’homme à se sortir lui-même de la violence qu’il génère. Mais Jérémie ne doute pas du dessein de Dieu. Son amour pour son peuple est premier et se montrera le plus fort :

Écoutez, nations, la parole du Seigneur ! Annoncez dans les îles lointaines : Celui qui dispersa Israël le rassemble, il le garde, comme un berger son troupeau. Le Seigneur a libéré Jacob, l’a racheté des mains d’un plus fort. Ils viennent, criant de joie, sur les hauteurs de Sion : ils affluent vers les biens du Seigneur, le froment, le vin nouveau et l’huile fraîche, les génisses et les brebis du troupeau.  Ils auront l’âme comme un jardin tout irrigué ; ils verront la fin de leur détresse. La jeune fille se réjouit, elle danse ; jeunes gens, vieilles gens, tous ensemble! Je change leur deuil en joie, les réjouis, les console après la peine. (Jr 31,10-13)

     Si Jérémie assiste impuissant à la mise à sac de Jérusalem par les troupes de Nabuchodonosor, s’il décrit le pillage de la ville et la main mise « des païens » sur tous les objets du temple et la destruction du sanctuaire par le feu, il n’accompagnera pas les exilés à Babylone. Un autre homme va prendre sa place, un ancien prêtre du temple, Ezéchiel. C’est de ce prophète que nous parlerons dans la prochaine chronique.

Roland Bugnon

Article précédent :
Osée : la révélation du Dieu de tendresse et de pitié

 

 

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