chronique du 22 janvier 2010
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L’homosexualité et la BibleTombe de Niankhkhnum et Khnumhotep Je suis curieux sur le fait que Jésus de Nazareth ne parle pas de l’homosexualité. Y a-t-il un passage dans la Bible qui en parle? (Jean-Guy) L’homosexualité a toujours existé. Des tablettes babyloniennes ainsi que des figurines datant du Ier millénaire avant notre ère en décrivaient déjà les ébats. Pourtant il est vrai que Jésus n’en parle pas, directement du moins. Mais pour Jésus, « l’impureté » a sa source non pas dans un acte mais dans le cœur. C’est ce qui sort du cœur de l’homme qui le rend « impur » (Mt 15,11) et notamment ses jugements à l’égard d’autrui. Dans le Premier Testament, on parle à quelques reprises de l’homosexualité. Elle est parfois présentée sous forme de violence faite par des gens du pays à des étrangers dans le but de les soumettre. Elle prend alors la forme d’un viol. Le passage biblique le plus connu est celui où les habitants de Sodome demandent à Loth de faire sortir ses deux invités « pour que nous les connaissions » (Gn 19,5). Cette connaissance a une dimension charnelle, comme le montre un autre passage biblique qui utilise le même verbe (Gn 4,1). Le mot « sodomie » pour décrire ce désir sexuel des habitants de Sodome à l’égard de ces étrangers est resté, depuis ce temps, dans le langage. Le même désir sexuel, énoncé dans les mêmes termes, se retrouve aussi dans un autre texte où des vauriens (litt. « les fils de Bélial » : les fils d’inutilité ou les fils de la méchanceté) cernent, à Guivéa, la maison d’un vieillard qui hébergeait un lévite de passage (Jg 19,22). L’homosexualité est présentée dans ces deux récits comme une infamie en raison de son caractère violent, dominateur et inhospitalier. L’homosexualité est aussi parfois liée à l’idolâtrie car il y avait, dans le monde païen, des prostitués sacrés que le peuple d’Israël désignait métaphoriquement par le terme de « chien » (Dt 23,19). Cette prostitution homosexuelle était interdite aux fils d’Israël (Dt 23,18) comme l’était également toute conduite homosexuelle (Lv 18,22). Le peuple d’Israël était d’ailleurs le seul peuple du Moyen Orient Ancien à ordonner la mort pour une telle conduite (Lv 20,13). Si cette pratique subsistait ailleurs, elle ne devait pas exister chez eux. Cette interdiction faisait partie de la Loi de Moïse et l’obéissance à cette Loi faisait de ce peuple, un peuple saint, consacré à YHWH (Lv 20,26). Cependant, il est bon de remarquer que les codes de Loi du Lévitique, remodelés par la caste sacerdotale au moment de l’exil à Babylone, n’ont pas toujours été en accord avec d’autres pratiques ou coutumes existantes dans l’histoire du judaïsme. Ainsi, par exemple, l’inceste est puni plus sévèrement dans le livre du Lévitique (Lv 20,11) qu’à l’époque patriarcale. Ruben n’a pas été « mis à mort » pour avoir couché avec la femme de son père (Gn 49,4). Au contraire, malgré sa disgrâce, il a donné naissance à l’une des tribus d’Israël. Est-ce que la profonde amitié qui liait David et Jonathan est à comprendre dans le sens d’une possible homosexualité? Leur proximité existentielle est indéniable. « Jonathan s’attacha à David et l’aima comme lui-même » ou, littéralement : « L’âme (nefesh) de Jonathan est devenue un avec l’âme (nefesh) de David et il l’aima dans son âme (benefesh) » (1 S 18,1). Cet amour était partagé puisque à la mort de Jonathan, David dira à son tour : « Que de peine j’ai pour toi, Jonathan, mon frère! Tu m’étais très cher. Ton amour pour moi était merveilleux, plus merveilleux que l’amour des femmes » (2 S 1,26). Aimer « dans son âme » durant sa vie, ou aimer « plus que des femmes » lors du décès d’une personne, implique-t-il une relation physique, sexuelle avec la personne? Certes Jonathan, dans cette communion d’âme, « se dépouilla du manteau qu’il portait et le donna à David ainsi que ses habits, et jusqu’à son épée, son arc et son ceinturon » (1 S 18,4). Quel sens doit-on donner à ce dépouillement? L’expression consacrée dans la Bible pour décrire la relation sexuelle est « couvrir de son manteau » (Ez 16,8; cf. Ruth 3,9). Jonathan ne couvre pas David, il lui donne son manteau et les insignes de sa légitime future royauté. En faisant cela, Jonathan renonce au trône auquel il avait droit. Ce geste ayant un sens politique ne peut décrire une possible relation homosexuelle. Leur amour est à interpréter comme une profonde amitié. Si Jésus ne parle pas d’homosexualité, Paul, par contre, en parle explicitement. Il vit dans un monde grec où l’homosexualité est permise. Mais il est juif, « pharisien » (Ac 23,6) de surcroît. Sa référence n’est donc pas le monde ambiant, mais le livre du Lévitique qu’il reprend dans son adresse aux Corinthiens. La communauté qui veut appartenir au Christ (1 Co 5,1-7,40) doit accepter de corriger les cas déviants, notamment un cas d’inceste (1 Co 5,1-13), s’abstenir de recourir aux tribunaux païens dans le procès entre frères (1 Co 6,1-11) et pratiquer une morale personnelle et sexuelle adéquate (1 Co 6,12-20) sous peine, d’être exclu du Royaume des cieux. L’homosexualité se retrouve insérée dans cette dernière section où, dans une liste d’actes répréhensibles, se trouvent ceux à caractères sexuels dont les débauches (pornoï) et les adultères (moixoi). Pour décrire les rôles passif (malakoï) et actif (arsekoïtai) de l’acte homosexuel, Paul va même jusqu’à créer des néologismes pour lever toute ambiguïté quant à la culpabilité de l’acte (1 Co 6,9). Dans l’Épître aux Romains, l’homosexualité fait partie de la longue liste des vices (Rm 1,28b-31), mais ce passage est lui-même inséré dans une section (Rm 1,18-3,20) où il n’y a pas de justes. Tous, juifs et païens, ont péché. Tous ont donc besoin d’être justifiés. Comme Jésus a expié dans sa chair, par sa mort, la colère de Dieu à l’égard de tous les hommes (Rm 3,18.20), ils seront tous, dans cet Épître, rejoints par sa grâce à condition de croire en la Rédemption (Rm 3,21-5,21). En résumé, dans la Bible, l’homosexualité n’est pas traitée en elle-même, mais dans son rapport aux coutumes des peuples ambiants ou dans son rapport à YHWH ou au Christ. Elle est interdite en raison de l’identité présente au cœur de l’homme. Elle est aussi interdite parce que, dans l’histoire de la création, Dieu donne à Adam un vis-à-vis et non un semblable. « L’être comme devant lui » (Gn 2,19) sera une femme (Gn 2,23) et non un homme. Un couple implique nécessairement, dans l’esprit biblique, une différenciation sexuelle. Chronique
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