chronique
du 4 mai 2001
|
|||||
Les pauvres d'abord? Est-il juste de dire que Jésus est d'abord venu pour les pauvres? Si oui, qu'advient-il de nous? (C. Milette) La personne qui m'écrit pareille question doit posséder quelques biens sinon elle ne lui causerait pas tant de soucis. Il faut commencer par un constat: dans les évangiles, aux côtés de qui Jésus se retrouve-t-il le plus souvent? Généralement, on peut dire que Jésus fréquentent les gens pauvres. À son époque, le judaïsme est à la fois très éclaté et très catégorisé. Les gens qui appartiennent à des groupes ou à des clans « plus purs » hésitent à faire alliance ou même à fréquenter des gens « moins purs ». Les hommes de clans de prêtres ne mariaient pas les femmes d'autres clans; les femmes se cherchaient, évidemment, un bon parti parmi les familles honorables. Tout cela est naturel mais devenait, on s'en doute, source d'intolérance. À l'époque de Jésus, il faut ajouter la dimension « d'impureté » ou de péché qui était associée avec certains groupes de personnes ou même certains métiers. Les malades, infirmes ou blessés de toute sorte étaient souvent réduits à mendier. D'aucune façon, on leur permettait de vivre une vie normale au sein de la communauté ou de gagner convenablement leur vie. Certains métiers étaient hautement suspects. Ainsi, les bergers, les médecins, les tanneurs qui avaient un contact fréquent avec le sang, la peau ou les cadavres, étaient tenus à distance. Leur métier les empêchant, bien souvent, de pratiquer scrupuleusement leur religion. Au minimum, on les considérait comme méprisables... tout juste sur la frontière de la bonne « judaïté ». On constate, de plus que Jésus parle avec des gens que l'on considérait passibles de mort dans la société de son temps: les personnes adultères (Jn 8,1-11). Plus rarement, on voit que Jésus fréquente des gens riches mais qui sont méprisés par la population. Parmi les collecteurs d'impôt, on peut se rappeler Lévi et Zachée (voir Mc 2,14; Lc 19,2). Plus généralement, on lui reproche d'aimer leur compagnie ainsi que celles des pécheurs publics (Lc 15,1-4). Il est très difficile de trouver des passages où Jésus se trouve en contact durable avec des personnes dites « riches » et « respectables ». En fait, il est très difficile, à la lumière des évangiles, de deviner la situation économique des nombreuses personnes qui gravitent autour de lui. On pourrait croire que certains pharisiens vivent dans une certaine aisance, mais ce serait spéculer puisque la majorité, croyons-nous aujourd'hui, menait une vie modeste. Nicodème ou encore Joseph d'Arimathie appartient aux « notables juifs » (Jn 3,1; Mc 15,43), mais leurs liens avec Jésus semblent plus ou moins marqués par le secret. Le jeune homme riche, finalement, s'en retourne un peu penaud, puisqu'il lui manquait de se départir de ses biens pour suivre Jésus (Mt 19,22). Est-ce que Jésus fréquentait surtout des pauvres? Je crois qu'à la lumière de notre survol, nous pouvons dire que oui. En fait, il serait plus juste de dire que Jésus se retrouve en compagnie des exclus, parmi lesquels se trouvent des pauvres, malades, mendiants et gens méprisés. Lui-même décrit sa mission première comme étant envoyés auprès des « brebis perdues d'Israël » (Mt 15,24) et il invite ses disciples à se faire proches des mêmes personnes (Mt 10,6). Dans un monde où l'on faisait très attention pour ne pas frayer avec n'importe qui, ce comportement étonne... En étant parmi les exclus, Jésus, le « Rabbi », a créé tout un scandale. Qu'advient-il de nous? D'abord, Jésus n'a pas dédaigné toute personne qui souhaitait le rencontrer sincèrement. Mais, comme toute rencontre avec lui, nous devons reconnaître qu'il s'y trouvait une part d'interpellation. À nous qui vivons dans une société parmi les plus favorisées du monde, sans doute, entendre un appel à la modération et même à la simplicité ne nous ferait pas de tord. Au contraire. Mais par dessus tout, je crois que la fréquentation des petits saura, dans bien des cas, dénouer nos inquiétudes et nous orienter résolument sur les traces de notre Seigneur. Il n'a pas hésité, lui, au risque d'y perdre sa « bonne réputation », à fréquenter les exclus de son temps... Guylain Prince
Chronique
précédente :
|
|||||
| Accueil | SOURCE (index) | La lampe de ma vie (index) | Vous avez des questions? | www.interbible.org
|
|||||