chronique
du 28 avril 2000
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Pas fanatique, mais très radical! (2) Un prochain qui dérange Nombreuses aussi sont les citations qui explicitent la consigne d'aimer son prochain. À ceux qui y verraient une simple adhésion de principe, Matthieu nous rapporte: « Ainsi, tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux » (Mt 7,12). Et le faire surtout à des personnes qui, en retour, ne peuvent nous le rendre: « Si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quelle reconnaissance vous en a-t-on? Les pécheurs eux-mêmes en font autant. » (Lc 6,33). Et cette attitude fondamentale prend plusieurs formes: éviter toute colère, toute injure, toute vengeance; ne pas juger, supporter même la violence, pardonner « jusqu'à soixante-dix fois sept fois » (Mt 18, 22). Et plus radicalement: « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent » (Lc 6,27). Tendre l'autre joue Une telle attitude trouve son sens dans le comportement même de Jésus. Se mettre à sa suite, c'est aussi adopter quelque chose de son attitude et de son comportement. Et Jésus en tant que Fils, nous révèle le Père: « Soyez généreux comme votre Père est généreux » (Lc 6,36) « car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes. « (Mt 5,44-45). Par sa vie, Jésus se fait le serviteur de tous, surtout des petits. Et en cela il nous révèle le visage du Père qu'il nous invite à imiter. Principale source d'interférence Les versets radicaux des évangiles dérangent, cela va de soi. Mais peu de versets ont suscité autant de discussions que ceux qui traitent des biens matériels. Car tous n'ont pas à affronter des situations extrêmes qui mettent en danger notre existence au nom l'amour de Dieu ou du prochain. Mais tous vivent quotidiennement avec les biens et les utilisent. Les textes sont trop nombreux -- spécialement dans l'évangile de Luc -- pour ne pas y voir un sérieux avertissement. Et ce n'est pas sans un certain malaise que nous lisons: « De la même façon, quiconque parmi vous ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut être mon disciple » (Lc 14,33). Ou encore, après le récit de l'homme riche: « Qu'il sera difficile à ceux qui ont les richesses d'entrer dans le Royaume de Dieu! » (Mc 10,23) Dans l'évangile de Luc, les richesses sont parfois personnifiées sous les traits de « Mammon ». Et le message est explicite: « Vous ne pouvez servir Dieu et l'Argent » (litt. mamona). Car les soucis, les richesses et les plaisirs de la vie étouffent la Parole, c'est-à-dire l'empêchent de porter du fruit, d'être mise en pratique (Lc 8,4-15). Les richesses isolent le riche; il ne reste plus de place pour Dieu et le prochain! « Là où est votre trésor, là aussi sera votre coeur » (Lc 12,34). Si bien que la condition de « riche » -- qui est toujours matérielle dans l'évangile de Luc -- est exposée comme une situation négative. Le riche doit être sauvé; et quand il l'est, il n'accumule plus (voir Zachée, Lc 19,1-10). Il s'ouvre aux besoins des autres. Le rappel de l'Alliance Une grande partie des appels radicaux des prophètes nous plongent au coeur de l'Alliance. Ils rappellent l'essentiel qui souvent disparaît dans des pratiques qui deviennent de plus en plus complexes. Les paroles radicales de Jésus ne font pas exception. Elles ne font que formuler, en des phrases-chocs qui provoquent l'imagination, les exigences d'une vie évangélique. Par des exemples variés et provocants, Jésus nous montre jusqu'où peut aller une vie guidée par l'amour de Dieu et du prochain. Le chrétien radical: un fanatique? Est-ce à dire qu'un chrétien porte un germe de fanatisme? Est-ce que Jésus était un fanatique? Non. Car la conversion la plus radicale à Dieu nous oriente immanquablement vers le service du prochain, surtout le plus petit, le plus faible. En aucun temps elle suscite un « pur » ou un « parfait » qui a pour mission de se couper d'une multitude de « pécheurs ». Car le fanatisme d'un groupe est nourri par la certitude de tout comprendre et de tout faire en conséquence. À l'opposé, le coeur du radicalisme évangélique, c'est l'amour de Dieu et du prochain. Et, en cette matière, nous ne pouvons qu'être des débutants. Le radicalisme évangélique, c'est aussi la profonde conviction que l'amour de Dieu passe inévitablement par l'amour du prochain. Surtout celui que je serais tenté de mépriser (voir parabole du bon Samaritain, Lc 10,29-37). Par conséquent, l'Évangile radical de Jésus nous oriente à l'opposé du fanatisme. Il n'est ni fanatique, ni modéré. Mais très dérangeant. Guylain Prince Source: Parabole 18/3 (1996) Chronique
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