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Justice sociale
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chronique du 27 février 2015

 

La Sagesse lance un appel. N'entendez-vous pas?

girouette


La Sagesse lance un appel, l'intelligence élève la voix. N'entendez-vous pas ? 
Sur les hauteurs dominant la route, à la croisée des chemins, la Sagesse se tient debout. 
Aux lieux de passage de la ville, à côté des portes d'entrée, voici ce qu'elle proclame : 
« C'est vous, les humains, que j'appelle. Je m'adresse à tout le monde. 
Vous, les ignorants, apprenez à avoir du bon sens.
Vous, les sots, apprenez à avoir de l'esprit. 

Écoutez, j'ai à dire quelque chose d'important, c'est ouvertement que je vous parle. 
En effet, mes lèvres annoncent la vérité, je déteste parler pour dire du mal. 
Je ne prononce que des paroles justes, aucune n'est mensongère ou trompeuse. 
L'homme intelligent les reconnaît exactes, ceux qui sont instruits les trouvent sûres. 
Recherchez l'éducation que je donne plutôt que l'argent, la connaissance de préférence à l'or pur. 
Car moi, la Sagesse, je vaux mieux que les perles. Aucun trésor n'a autant de valeur. »

Le Seigneur m'a conçue il y a très longtemps, comme la première de ses œuvres, avant toutes les autres. 
J'ai été établie dès le début des temps, avant même que le monde existe. 
Quand je suis née, il n'y avait pas d'océans, pas de sources d'où les eaux jaillissent. 
Avant la formation des montagnes, avant les collines, j'ai été enfantée. 
Le Seigneur n'avait fait alors ni la terre ni les espaces, ni le premier grain de poussière du monde. 
J'étais déjà là quand il fixa le ciel et traça l'horizon au-dessus de l'océan primitif. 
Il plaça les nuages dans les hauteurs et donna leur force aux sources profondes. 
Il imposa à la mer une limite que les eaux ne doivent pas franchir. Il posa les fondations de la terre. 
Pendant ce temps, j'étais à ses côtés comme architecte. Jour après jour, je faisais sa joie,
je jouais sans cesse en sa présence, sur le sol du monde créé par lui.
Depuis lors, ma joie est d'être au milieu des humains. »

(Livre des proverbes, chapitre 8)

Une Église à recentrer sur l’Évangile

     Communauté de disciples, nous avons reçu une mission de Jésus qui nous a dépêchés aux quatre coins du monde pour annoncer une Bonne Nouvelle aux pauvres. Mais très tôt, (depuis Constantin), l’Église s’est alliée au pouvoir impérial et est devenue une institution puissante. Elle doit maintenant se défaire de 16 siècles de mauvaises fréquentations avec les pouvoirs politiques et réassumer sa mission au service de la libération des pauvres. Elle vit une crise profonde dans nos sociétés libérales laïques où elle n’a que peu d’influence et se voit soumise à un intense processus de sécularisation. Sa parole trop souvent dogmatique, moralisatrice et rigide n’est plus écoutée. Le temps de la « chrétienté », que Jean-Paul II et Benoît XVI rêvaient de restaurer est définitivement révolu. Nous sommes renvoyés à une Église des catacombes, à la marginalité, confrontés que nous sommes tels les disciples pauvres et dépossédés des premiers siècles qui rêvaient d’un monde d’égalité, de fraternité et de liberté.

     Plus particulièrement au Québec, l’effondrement de l’institution catholique est spectaculaire par sa rapidité et son ampleur. Les communautés religieuses, si fécondes dans les siècles passés, disparaissent aujourd’hui dans les infirmeries pour personnes âgées. Le clergé qui fut la clé de voûte du catholicisme est une espèce en voie de disparition. La vente et la démolition des innombrables lieux de culte en témoignent. C’est la fin d’une étape. Mais ne soyons pas moroses;  voyons dans ces changements le Souffle de Jésus qui nous recentre sur notre mission.

     Nous avons présentement la joie d’avoir à la tête de la grande famille catholique un homme, François, qui nous oriente vers une Église des pauvres et des exclus, un homme de dialogue et d’ouverture. Dans cette lourde structure vaticane, bien éloignée de l’Évangile de Jésus par son faste et son pouvoir autocratique sacralisé, François ouvre la porte à des réformes et nous recentre sur l’Évangile. Ne le laissons pas agir seul. Prenons exemple sur lui pour sortir de nos rituels routiniers, de notre confort spirituel sans audace, de notre foi détachée des réalités terrestres et nous ouvrir aux défis que la mission nous impose.

Rechercher la Sagesse

     Cessons de demander à nos vieux textes sacrés des solutions toute faites pour répondre aux défis modernes. La Bible n’est pas un livre de recettes pour résoudre les problèmes d’aujourd’hui. Chercher dans les textes des réponses révélées relève du fondamentalisme : « Jésus était un homme et il a choisi des hommes comme apôtres; donc on ne peut ordonner des femmes prêtres!’ » : voilà une position rigide et passéiste, comme si Jésus avait pu prévoir une telle évolution. Même chose pour la morale sexuelle qui considère toute activité sexuelle hors mariage comme une atteinte à la loi divine; pourtant Abraham, le père de la foi, était polygame et Dieu l’a bénit avec toutes ses femmes. David fut adultère, et cette femme hittite lui donna Salomon, grand modèle de sagesse.

     La Bible contient de très nombreux livres profanes de sagesse ancienne reconnus comme étant Parole de Dieu. Proverbes, Livre de Job, Cantique des cantiques, Paroles de Qohélet, Sagesse de Salomon, Sagesse de Ben Sira, ces livres forment environ le tiers du corpus biblique. Ils nous parlent de la vie quotidienne, des problèmes humains, de la vie courante. Les croyantes et les croyants de tous temps ont cherché dans les sagesses populaires et celles de leurs voisins des réponses à leurs questions existentielles et ont considéré que ces livres étaient inspirés par Dieu et avaient leur place dans le livre sacré : proverbes pas toujours gentils; réflexions sur le mariage, le pouvoir, l’amitié, l’argent, les femmes, etc.; chant d’amour, littérature érotique dans lequel la femme prend l’initiative; enseignements pour l’éducation du futur roi; méditation d’une personne (une femme?) de la communauté sur la vanité de la vie; angoisse de Job sur la souffrance des justes. Pourtant, ces livres sont presque ignorés dans l’Église.

     Acceptons donc de chercher avec nos contemporains, à tâtons et avec patience, la sagesse qui nous fera découvrir la route à suivre. Faisons la promotion du respect des droits humains partout, même à l’intérieur de notre Église dans les domaines de la discrimination envers les femmes, les homosexuels et les divorcés remariés. Dieu nous parle dans la sagesse des peuples. Soyons solidaires! Il y a dans nos sciences, nos lois, nos cultures variées, nos traditions religieuses et spirituelles, et dans les mouvements sociaux ainsi que dans l’humanisme sous toutes ses formes, des sagesses qui nous permettent ensemble de relever les grands défis de l’heure.

     Ces défis sont pressants et concernent l’avenir de la vie sur terre :

  • Combattre les inégalités sociales qui croissent à grande vitesse sous la dictature néolibérale et éliminer la pauvreté sur tous les continents;

  • Sauvegarder la planète soumise à un stress insupportable par le pillage économique, la destruction systématique et le réchauffement climatique bientôt irréversible.

  • Suspendre le commerce des armes et  la militarisation galopante qui alimentent de plus en plus de conflits armés.

  • Promouvoir partout les droits humains autant collectifs que personnels.

  • Favoriser des relations fraternelles entre différentes confessions et religions pour que celles-ci contribuent par leurs traditions spirituelles à la paix et à la justice.

  • Créer des communautés humaines fraternelles et solidaires qui s’impliquent à transformer le monde en le rendant plus humain, plus juste et plus fraternel.

La terre est informe et les ténèbres la recouvrent (Genèse 1,2)

     Une lecture fondamentaliste de la Bible nous incite à croire que le récit de la création nous décrit l’apparition physique de la planète terre. Les théologiens qui ont écrit ce texte avaient plutôt en tête le chaos suscité par la prise de Jérusalem par les Babyloniens en 587 av. J.-C., la destruction de leurs institutions royales et religieuses, la perte de leur territoire et de leur souveraineté et l’exil des élites juives. Pour ces populations juives, c’était la fin d’un monde. Aujourd’hui encore nous pouvons nous écrier : Les ténèbres recouvrent la terre! « Le problème, écrit la théologienne brésilienne Ivone Gebara, c’est que nous pensons que le commencement du monde est loin de nous. Pourtant nous sommes au commencement, créant toujours du neuf, dans la nouveauté et la monotonie quotidienne, dans le semblable et le différent de chaque être. »

     Nous sommes collectivement, femmes et hommes habitant cette planète, la pensée de la création et nous avons une bonne part de responsabilité de la création. « Et si le pouvoir d’en-haut n’était qu’un pouvoir d’en-bas? Qu’arriverait-il? Et si Dieu changeait de lieu et que nous croyions que lui/elle/cela cette force mystérieuse demeure parmi nous et dans tout ce qui existe? » C’est la question que nous renvoie l’amie Ivone et elle poursuit : « La création commence aujourd’hui et la source créatrice est infiniment présente en tous nous autres. Notre expérience religieuse primordiale consiste à sentir en nous la force mystérieuse du Souffle présent en tout ce qui existe et en tout ce que nous faisons. Lire la création comme la libération continue de l’énergie divine en tout et en tous et toutes, et assumer de manière collective notre responsabilité locale pour la création du monde et de nous-mêmes. » [1]

« Je jouais sans cesse en Sa présence, sur le sol du monde créé par Lui.
Depuis lors, ma joie est d'être au milieu des humains »
, dixit la Sagesse.

[1] Ivone Gebara, « El Gemido de la Creación y Nuestros Gemidos », Revista de Interpretación Bíblica Latinoamericana 21, pp. 35-45.

Claude Lacaille

Source: Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

Chronique précédente :
Pourquoi faire mémoire des actes de barbarie?

 

 

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